Expressions - Les oiseaux : « l'oeil de l'aigle » et « la mémoire de l'oie »

Labutě

Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague - Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha! Comme vous le savez certainement, la grippe aviaire - ptačí chřipka, est apparue récemment en République tchèque. Pas moins de huit cygnes - labuť, en ont déjà été victimes, principalement autour d'étangs en Bohême du Sud.Si la maladie n'a pas encore atteint les proportions dramatiques que spécialistes sanitaires et ornithologues prédisent parfois, il n'empêche qu'elle ne lasse pas d'inquiéter et même de faire souffrir amoureux de la nature et des oiseaux - ptáci. Alors, histoire d'oublier un peu tout ça, nous allons entamer une petite série d'émissions relatives aux expressions et comparaisons de la langue tchèque relatives à différentes espèces de volatiles.

Orel mořský,  photo: Dmgultekin,  Creative Commons 3.0
Environ 370 espèces d'oiseaux sont présentes ou de passage chaque année sur le territoire tchèque, parmi lesquelles, pour n'en citer qu'une, l'aigle de mer - mořský orel, le plus grand rapace d'Europe, dont vingt-cinq à trente couples vivent autour des zones d'eau de Bohême de Sud et de Moravie du Sud. Cet oiseau originaire des régions plus froides du nord d'Europe fait d'ailleurs l'objet d'une campagne appelée « Oiseau de l'année » organisée par l'Association ornithologique tchèque et visant à protéger les espèces menacées.

Un peu curieusement, cependant, on ne retrouve dans la langue tchèque l'aigle - orel, que dans une seule expression « hlava nebo orel », soit littéralement « tête ou aigle ». En fait, cela équivaut tout simplement en français au « pile ou face », procédé qui, comme vous le savez, consiste à lancer une pièce de monnaie en l'air pour déterminer le vainqueur d'un tirage au sort ou prendre une décision au grè du hasard. En tchèque, cela se dit « tête ou aigle » parce qu'à une certaine époque, les pièces étaient frappées de la tête du souverain sur un revers et sur l'autre de l'aigle qui symbolisait l'empire. On trouve trace ensuite de deux comparaisons, à savoir « letět jako orel » - « voler comme un aigle » lorsque l'on est très rapide et « mít oči jako orel » - « avoir les yeux de l'aigle », l'animal étant bien connu pour posséder une vue pénétrante et profonde.

Husy,  photo: Barbora Kmentová
Le vol, le passage d'oies sauvages est aussi quelque chose de splendide. Pourtant, disons les choses comme elles sont, l'oie - husa, domestiquée que l'on connaît des basse-cours de nos villages, et dont les Tchèques, pour peu qu'elle soit bien grasse, raffolent une fois dans leur assiette, est généralement une sale bête, agressive envers les intrus. Bref, elle n'est guère appréciée, comme en témoigne l'expression très populaire « être bête comme une oie » - « hloupá jako husa », qui est également employée dans la langue tchèque à propos des femmes. D'une personne curieuse, on pourra dire également qu'elle est « curieuse comme une oie » - « zvědavá jako husa », et d'une autre qui a la mémoire courte ou qui oublie tout qu'elle a « une mémoire d'oie » - « má paměť jako husa ». Enfin, si vous parlez trop vite, on pourra vous reprocher ironiquement de « gazouiller comme une oie » - « štěbetat jako husa », ou comme une pie - straka, avec l'expression « jaser comme une pie », le cri des deux oiseaux étant parfois, selon votre humeur, particulièrement désagréable à l'oreille. Car avouez tout de même, sans vouloir offenser les partisans de Brigitte Bardot, que lorque vous passez à côté d'un groupe d'oies qui, les unes après les autres, se mettent à crier à tue-tête, l'envie ne manque pas de tordre le cou à une ou deux d'entre elles. Pour en revenir à la curiosité, notons encore cette bien jolie expression : « kouká jako husa do flašky », soit « elle regarde comme une oie dans la bouteille ». En fait, cela signifie que la personne en question, indiscrète, qui cherche à connaître ce qui ne la regarde pas, jette un oeil quelque part, dans une pièce par exemple, regarde d'un oeil. Enfin, autre façon de voir les choses très imagée, de quelqu'un qui se porte bien, qui va bien, on dira encore qu'il « va comme une oie à l'auge » - « má se jako husa na krmníku », l'auge étant, rappelons-le pour ceux qui l'auraient oublié ou qui ont une mémoire d'oie, le bassin qui sert à donner à boire ou à manger aux animaux domestiques.

C'est ainsi, telles des oies gavées d'expressions, que prend fin cette première partie de notre série consacrée aux oiseaux - ptáci. Nous poursuivrons cette recherche très bientôt avec d'autres oiseaux que l'aigle - orel, et l'oie - husa. En attendant portez-vous du mieux possible - mějte se co nejlíp!, comme une oie à l'auge serait-on d'ailleurs tenté de dire, portez le soleil en vous slunce v duši!, salut et à bientôt - zatím ahoj!