Expulsions à Ústí nad Labem : la question du logement social ressurgit

Photo: CTK

La polémique autour de l’expulsion de quatre-vingt locataires d’un immeuble insalubre dans un quartier d’Ústí nad Labem ne cesse d’enfler après la manifestation devant le ministère du Travail et des Affaires sociales à Prague le 28 janvier dernier, mettant en cause l’absence totale de politique concernant les logements sociaux. Pendant ce temps, familles et associations cherchent tant bien que mal des solutions.

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Ce n’est pas la première fois qu’une affaire d’expulsion attire l’attention des médias nationaux. Cette fois-ci l’attention se porte sur la ville d’Ústí nad Labem, dans le nord du pays. Quatre-vingt locataires y sont expulsés par l’entreprise propriétaire de leur immeuble insalubre qu’elle a décidé de reconstruire. Les familles, majoritairement roms, résistent en argumentant qu’elles n’ont pas d’autre endroit où aller, des enfants malades à charge, et surtout qu’aucune décision de justice n’oblige l’entreprise à les expulser pour reconstruire le bâtiment. Déjà expulsées une première fois d’un immeuble privé après qu’un plafond s’est effondré, tuant une femme et en blessant une autre, ces familles avaient d’abord été logées par la ville dans un gymnase, puis dans cet immeuble délabré du quartier de Krasné Březno.

« Je ne suis pas préparée à déménager, je n’ai nulle part où aller » : c’est ce que les familles expulsées déclarent toutes à la Télévision tchèque, et ce que la mairie réfute, argumentant qu’elle-même a rempli son devoir d’information et d’accompagnement envers ces familles et qu’elles doivent maintenant se prendre en main. Romana Macová est la porte-parole de la mairie et s’esprime à la Télévision tchèque.

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« Ces gens savaient dès le début que ce logement ne pouvait être que provisoire. Personne n’est chassé de la ville, ils ont reçu une liste de logements disponibles à Ústí nad Labem et dans les environs ; c’est à eux maintenant de décider où ils veulent aller. Ils ont tous la possibilité de déménager. »

Des propos que soutient la CPI, l’entreprise propriétaire de l’immeuble. Selon sa porte-parole Marcela Windlerová, la situation était claire dès le départ, et ces familles avaient le temps de trouver un autre logement. L’entreprise elle-même n’a pas à intervenir dans cette situation qui concerne les locataires et la mairie.

« Nous ne somme pas dans une position qui nous permette d’influencer la situation. Nous avions un contrat de location avec les habitants, et ces gens avaient l’usage du bâtiment en fonction de ce contrat. Ils ont été informés par la ville que c’était un logement provisoire ; ils avaient un contrat dès le début et un préavis de deux mois donc je pense qu’ils avaient le temps de chercher un nouveau logement. Certaines familles ont réussi à en trouver un donc ce n’est pas un problème collectif, nous parlons d’un groupe d’individus qui n’est pas arrangeant ou qui, pour d’autres raisons, n’a tout simplement pas de logement. »

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Certaines familles ont effectivement réussi à être logées ailleurs, principalement grâce à l’aide de l’initiative Logement pour tous qui s’est mobilisée pour trouver des logements disponibles, obtenir l’accord des propriétaires, et surtout qui travaille à rassembler les vingt-cinq mille couronnes, soit près de mille euros de caution et de loyer nécessaires pour reloger toutes les familles.

Une situation loin d’être nouvelle dans le pays : en août dernier c’est tout un quartier d’Ostrava, à l’est du pays, dont les habitants avaient été expulsés. Les associtations avaient alors accusé la ville de vouloir déplacer les populations roms et de n’avoir jamais pris la peine d’entretenir le quartier ou de le reconstruire avant d’en arriver à cette extrémité.

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Les propriétaires renvoient la responsabilité aux mairies, les mairies prétendent n’avoir pas d’argent à consacrer aux logements sociaux et renvoient à l’Etat, le ministère du Travail et des Affaires sociales pris à parti par des manifestants à Prague le 28 janvier renvoit à celui du développement régional… Pendant que chacun se renvoit la balle, une étude réalisée déjà il y a quelques années fait état de trois cents logements ou quartiers insalubres en République tchèque et quatre-vingt mille personnes qui y sont logées, majoritairement des roms.