Faute d’une vaccination suffisante, la coqueluche est de retour en Tchéquie
Appelée « toux noire », la coqueluche fait un retour remarqué en Tchéquie avec un nombre record de cas de contamination depuis le début de l’année. En cause notamment : une vaccination insuffisante, alors que les jeunes de 15-19 ans sont la catégorie de la population la plus touchée.
Avec un peu plus de 3 100 cas diagnostiqués depuis le déut de l’année, dont un bon quart rien que pour la semaine dernière, ce que les Tchèques appellent littéralement « la toux noire » (« černý kašel ») a fait un retour remarqué dans le pays, bien aidée aussi par la polémique dans laquelle s’est retrouvé impliqué le maire de Prague et député Bohuslav Svoboda, auquel il est reproché d’avoir participé, sans masque de protection, à diverses réunions alors qu’il était atteint de la coqueluche et sous antibiotiques. Avec la réélection de Vladimir Poutine, c’est même le principal sujet d’actualité de ces derniers jours.
Il faut dire que cela fait plus de soixante ans que la coqueluche, maladie qui se transmet par voie aérienne, ne s’était plus propagée à une telle vitesse. Il faut en effet remonter jusqu’à 1963 pour retrouver des chiffres supérieurs à ceux actuellement recensés, sauf qu’ils concernaient alors l’ensemble de l’année. Pour autant, et tout en faisant l’objet d’une attention renforcée, l’évolution de la situation sanitaire ne suscite encore qu’une inquiétude très mesurée, comme le confirme Pavla Svrčinová, inspectrice en chef de la santé publique :
« Nous ne prévoyons toujours pas d’adopter de mesures générales. Les chiffres peuvent sembler élevés, mais il ne faut pas oublier que nous sommes plus de 10 millions d’habitants. Cela veut dire que si l’on parle de 810 nouveaux cas de maladie par semaine, le taux d’incidence pour 100 000 habitants n’est pas si élevé. »
Plus encore donc que le nombre croissant de malades, avec un pic de contaminations attendu par les experts dans les semaines à venir, la réapparition presque soudaine d’une maladie que beaucoup pensaient plus ou moins disparue, a rappelé toute l’importance de la vaccination. Si celle-ci est obligatoire en Tchéquie, environ 10 % des enfants, selon Pavla Svrčinová, ne reçoivent pas de rappel quand il le faudrait. Une réalité que regrette également Štefan Hrunka médecin dans la petite ville de Chlumec nad Cidlinou, en Bohême de l’Est :
« Je suis pédiatre, donc pour moi les enfants doivent être vaccinés à l’âge de 10 ans, comme l’a rappelé à juste titre le ministre de la Santé Vlastimil Válek, ou entre 10 et 11 ans. Sans oublier, bien sûr, les enfants en bas âge. Malheureusement, certains parents refusent de vacciner les enfants, même les plus petits. Ils ont pour théorie que puisque la majorité de la population est vaccinée, eux n’attraperont pas la maladie, ce qui, jusqu’à présent, était en partie vrai. Mais aujourd’hui, le problème est qu’un certain seuil a été franchi. Le vaccin protège encore tous les autres, mais la coqueluche commence à se propager au sein de la population. »
L’incidence la plus élevée de « l’épidémie » de coqueluche actuelle en Tchéquie concerne la tranche d’âge des 15-19 ans, dont le total représente environ un tiers des personnes contaminées. Les experts estiment que cette situation peut s’expliquer par le changement de vaccin intervenu en 2007. Si celui-ci présente moins d’effets secondaires que le précédent après son application, sa durée d’immunité est en revanche plus réduite. Par ailleurs, selon les médecins, environ un dixième des parents omettent de vacciner de nouveau leurs enfants à l’âge de 10 ou 11 ans.
À tout cela s’ajoute, plus généralement, une certaine forme de rejet des vaccins par un nombre relativement élevé de Tchèques, que la pandémie de Covid-19 n’a fait qu’accentuer. Štefan Hrunka confirme d’ailleurs que la non-vaccination des enfants n’est pas la seule explication à ce retour de la coqueluche :
« Je pense qu’il s’agit plutôt d’une vaccination insuffisante des adultes. Tous les enfants ne sont plus non plus vaccinés automatiquement comme autrefois, on laisse trop de liberté aux parents. De plus, il est certain que le Covid a eu des effets négatifs sur nous. Les virus de la grippe qui sont habituels pour la saison et cette période de l’année affaiblissent les organismes et se propagent mieux sur les muqueuses plus fragiles des voies respiratoires. »