Hockey : la saga des frères Treille au Sparta Prague

Photo: CTK

Rencontre cette semaine avec les deux seuls Français à jouer dans le championnat tchèque de hockey sur glace. Depuis l’année dernière, les frères Treille, Yorick et Sacha, en plus d’évoluer ensemble en équipe de France, défendent aussi côte à côte les couleurs du plus prestigieux des clubs tchèques, tous sports confondus, le Sparta Prague. Une histoire riche en aventures qui ressemble un peu à un conte de fées…

Yorick Treille,  photo: CTK
Jeudi matin dernier. Dans l’immensité de l’historique Sportovní hala vide de ses 14 000 spectateurs, l’équipe première de hockey sur glace du Sparta Prague s’entraîne et répète une dernière fois ses gammes avant la réception, le lendemain, du grand rival Pardubice pour une énième journée de la saison régulière d’Extraliga. Sur la patinoire, parmi la trentaine de joueurs composant l’effectif de l’un des plus prestigieux clubs tchèques de hockey, deux Français : les frères Treille. Malgré un physique dont ne rougiraient pas même les rugbymen, les deux frangins formés à Grenoble ne sont pas faciles à reconnaître sous leur casque et leurs protections. Un signe, pourtant, ne trompe pas : tandis que le maillot de Yorick, l’aîné, est floqué du numéro 7, celui de Sacha, le benjamin de sept ans, est, lui, barré du 77. Présents en République tchèque depuis plusieurs saisons déjà, Yorick et Sacha Treille, tous deux membres à part entière de l’équipe de France, vivent à Prague et au Sparta une expérience qui ressemble fort à un rêve devenu réalité. A l’issue de l’entraînement, dans les vestiaires d’une salle dont chaque coin transpire le hockey, les frères Treille ont raconté leur aventure tchèque au micro de Radio Prague. Pionnier lors de son arrivée à Ostrava à l’été 2008, Yorick a aussi été le premier à se confier :

Sacha Treille,  photo: Sparta Prague
« Oui, c’est vrai que nous avons la chance de pratiquer un sport qui est notre passion depuis que nous sommes tout petits. Et en plus, aujourd’hui, nous pouvons le faire en tant que professionnels. Nous gagnons notre vie en jouant au hockey ! Alors, oui, c’est un peu une vie de rêve. Jouer pour le Sparta est aussi un honneur au niveau de la République tchèque. C’est un club avec une grande histoire. Sacha et moi sommes passés par d’autres clubs avant, et quand j’ai eu la chance de pouvoir venir au Sparta la saison dernière, je n’ai pas hésité. C’était une belle opportunité, d’autant plus que Sacha a eue la même peu de temps après. Même si ce n’est pas tous les jours facile, avec notamment toutes les blessures que Sacha a eues depuis le début de saison, on est vraiment très contents d’être là. »

Sacha : « Comme le dit Yorick, il y a beaucoup de points positifs. D’abord, Prague est une très belle ville, très agréable à vivre, avec une équipe de hockey qui est reconnue dans toute l’Europe. Et c’est forcément encore mieux de pouvoir jouer avec son frère. On peut dire effectivement que c’est une vie de rêve… »

La vie d’un sportif professionnel est aujourd’hui souvent faite de changements de clubs, de pays, peut-être plus encore pour les hockeyeurs français qui veulent évoluer à un niveau plus élevé que celui du championnat de France. Est-ce donc le hasard qui vous a réunis au Sparta ?

Le Sparta Prague,  photo: CTK
Yorick : « Oui, il y a eu un petit peu de chance au début. J’avais commencé seul l’expérience en République tchèque. Après, Sacha était en Suède quand il s’est retrouvé sans club un été à l’intersaison. C’est alors que Kladno (ville de Bohême centrale, ndlr) lui a donné une chance. Il a fait une très belle saison, donc après ce n’était plus du hasard que le Sparta veuille le recruter. Comme le club souhaitait également me conserver, c’est comme ça que nous nous sommes retrouvés ensemble ici. Mais ce n’était pas à nous de postuler pour un job. Ce sont les dirigeants du Sparta qui sont venus nous chercher. Ce n’est donc pas seulement le hasard. »

On peut quand même supposer que si le Sparta vous a recruté, Sacha, c’est aussi parce que les performances de Yorick lors de sa première saison au Sparta étaient satisfaisantes ?

« Oui, je pense que ça a beaucoup aidé que quelqu’un donne le bon exemple au Sparta. Moi-même, j’ai toujours donné mon maximum à Kladno. Je suppose que pour le manager d’un club, c’est plus facile de faire venir un joueur quand il a déjà son frère… Pour moi, c’était simple : d’abord c’était le Sparta, et ensuite c’était le club de mon frère. Je n’ai donc ‘doublement pas hésité’ à venir. »

Yorick Treille
Pour vous, Yorick, votre venue en République tchèque s’est faite suite à un stage avec l’équipe de France…

« Oui, nous étions en stage à Ostrava. Je sortais d’une saison assez difficile en Allemagne, où j’avais été blessé. J’avais quelques difficultés à trouver un nouveau club et j’étais donc en attente d’offres. Ce stage avec l’équipe de France m’a permis d’avoir l’opportunité de rester pour un essai à Vitkovice (le club d’Ostrava). Cela s’est fait entre autres grâce aux contacts de Daniel Kysela, un ancien joueur tchèque qui a joué en France et qui a également été manager à Vitkovice à une certaine époque. J’ai accepté de rester pour un essai et il m’a ensuite fallu gagner ma place pendant les matchs de pré-saison. Un contrat de deux ans m’a été proposé sur la base de ce mois de tests et de préparation. »

La République tchèque est certes un pays traditionnel de hockey, mais les Français en savent généralement peu à son sujet, peu sur la vie en République tchèque. Beaucoup en gardent l’idée d’un pays d’Europe de l’Est. Par rapport à ça, n’avez-vous donc pas hésité ?

Photo: Jan Beneš,  www.hcsparta.cz
Yorick : « Non, pas vraiment. J’avais déjà été sur place, je connaissais donc un petit peu la République tchèque. Aujourd’hui, on y trouve tout, on y vit très bien et il n’y a pas vraiment de différences avec ‘l’Europe de l’Ouest’. Surtout, en tant que joueur de hockey, quand vous êtes sans contrat et qu’un club vous propose un essai, vous l’acceptez. A cette période-là, je voulais juste trouver une équipe. Et puis c’était dans un très bon championnat et dans un club, Vítkovice, qui possède une très bonne réputation. De ce point de vue-là, je n’ai donc pas hésité. Il m’a certes fallu gagner ma place, c’était dur, mais après, j’ai passé deux années très agréables à Ostrava qui m’ont finalement permis de venir ici au Sparta. Ce n’était donc que du positif. Une année, nous sommes même allés jusqu’en finale des play-offs (série perdue contre le Pardubice du légendaire gardien Dominik Hašek, ndlr. Cf : http://www.radio.cz/fr/rubrique/faits/hockey-yorick-treille-je-ne-voulais-pas-blesser-hasek). J’en garde donc un très bon souvenir et je suis content d’être resté en République tchèque. »

Vous en êtes à votre quatrième saison en République tchèque avec deux donc d’abord à Ostrava, puis la deuxième actuellement à Prague. Quatre saisons qui se sont plutôt bien passées, en revanche, pour vous, Sacha, les choses sont un peu différentes. Vous avez commencé à Kladno, un club traditionnel également du hockey tchèque, c’est notamment la ville et le club d’origine de Jaromír Jágr, le plus grand joueur de l’histoire du hockey tchèque, mais c’est aussi le club d’une ville industrielle qui connaît régulièrement des difficultés financières, un club aussi de bas de tableau de l’Extraliga. Dans ce contexte, est-ce que ça n’a pas été plus difficile pour vous ?

Sacha Treille,  photo: Jan Beneš,  www.hcsparta.cz
Sacha : « Non, je pense qu’intégrer une équipe qui ne jouait pas le haut du tableau m’a permis d’avoir un temps de jeu plus que raisonnable et de faire mes preuves petit à petit. C’est ce qui m’a permis de rejoindre le Sparta plus tard. Vraiment, tout s’est très bien passé à Kladno, j’y étais très content. »

Votre début de saison au Sparta a été gâché par des blessures. Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Sacha : « En fait, j’étais déjà arrivé au Sparta en fin de saison dernière. J’y avais été échangé, ce qui m’avait permis de joueur les six derniers matchs de saison régulière et les barrages avec le Sparta. En début de saison, cet été, nous nous sommes bien préparés avec un tournoi de pré-saison contre différentes équipes européennes. Mais lors du dernier match de préparation, j’ai eu la malchance de me faire une déchirure au niveau du psoas. Cette blessure a été plus ou moins interminable : une fois rétabli, j’ai tout de suite rejoué et ça s’est redéchiré exactement au même endroit. Cette déchirure m’a donc fait perdre trois mois. Et une fois que tout allait bien, avec la fatigue de la reprise et l’envie de revenir au jeu le plus vite possible, je me suis fait une petite entorse au genou… Mais cette série de malchance est maintenant finie, je me sens beaucoup mieux, je suis enfin à 100 % de mes moyens et je suis prêt à réintégrer l’équipe à temps plein. »

Yorick Treille,  photo: Jan Beneš,  www.hcsparta.cz
Vous faites donc votre retour au moment idéal : dans peu de temps, la saison régulière va se terminer. Ce sera alors l’heure des play-offs, pour tout hockeyeur le moment fort de la saison…

Sacha : « Oui, c’est vraiment le bon moment pour revenir au jeu, un mois avant le début des play-offs, ce qui est idéal pour retrouver la forme optimale. J’aurai aussi peut-être moins de fatigue que les autres joueurs qui auront déjà disputé une cinquantaine de matchs depuis le début de saison. Ce sera donc peut-être un avantage pour moi de ce côté-là. »

Vous pourrez entendre la suite des aventures des frères Yorick et Sacha Treille, hockeyeurs français du Sparta Prague, dans une prochaine rubrique sportive.