J-100 avant la présidentielle tchèque 2023 : qui sera sur la ligne de départ ?
Dans cent jours, et pour la troisième fois de leur histoire, les Tchèques éliront leur président au suffrage universel direct. Parmi les favoris figurent l’ex-Premier ministre Andrej Babiš, l’ancien haut représentant de l’Armée tchèque Petr Pavel et l’universitaire Danuše Nerudová.
Selon les politologues, l’enjeu de ces élections est de conquérir l’électorat de Miloš Zeman, figure marquante de la scène politique nationale depuis la révolution de Velours et troisième président de la République tchèque, après Václav Havel et Václav Klaus. En bénéficiant durant toute sa carrière des sympathies d’une partie non négligeable de la population malgré ses positions souvent controversées, c’est précisément Miloš Zeman qui est devenu, en 2013, le premier chef de l’Etat tchèque élu au suffrage universel. Après avoir enchaîné deux quinquennats, Miloš Zeman ne peut plus se présenter à la prochaine élection, dont le 1er tour se tiendra les 13 et 14 janvier prochains.
Une vingtaine de personnalités ont fait part de leur intention de se présenter. Pour cela, elles doivent recueillir les signatures d’au moins 10 sénateurs ou 20 députés, ou celles de 50 000 citoyens.
Le retour de Pavel Fischer
Deux personnalités ont d’ores et déjà étaient nominées par les parlementaires : leur candidature est donc sûre et certaine. Tout récemment, le sénateur sans étiquette Pavel Fischer a annoncé sa décision de se présenter, pour la deuxième fois déjà, bénéficiant du soutien suffisamment fort de ses collègues de la Chambre haute du Parlement.
Candidat malheureux en 2018, l’ancien ambassadeur tchèque en France et conseiller de Václav Havel, Pavel Fischer a terminé 3e avec un score de 10 % lors du dernier scrutin remporté par Miloš Zeman. La presse remarque qu’il bénéficie du soutien constant d’environ 6,5% des électeurs (d’après le sondage de l’agence Median effectué en août dernier), conservateurs et chrétiens-démocrates notamment.
Le deuxième candidat issu du Parlement, le député Jaroslav Bašta, représente le parti d’extrême-droite SPD. L’ancien ministre et diplomate social-démocrate reste toutefois loin des favoris de cette élection, parmi lesquels se rangent en revanche Petr Pavel et Danuše Nerudová, deux candidats issus de la société civile qui mènent depuis plusieurs mois une campagne intense à Prague comme dans les régions.
Bien connu du grand public avant même le début de cette campagne, le général Petr Pavel, 60 ans a derrière lui une brillante carrière militaire. Francophone, il s’est illustré par exemple au sein de la mission de maintien de la paix en ex-Yougoslavie, lors de laquelle il a mis en sécurité 53 soldats français bloqués dans une zone de guerre entre les forces serbes et croates. Chef d’état-major de l’Armée tchèque pendant près de trois ans, il a ensuite présidé le Comité militaire de l’OTAN entre 2015 et 2018.
Son prestige est toutefois entaché, aux yeux de certains, par son adhésion au Parti communiste en 1985, alors qu’il était un jeune soldat. Un épisode de sa vie dont Petr Pavel dit ouvertement n’être « absolument pas fier ».
Pavel face à Babiš ?
« Ramenons l’ordre et la paix en République tchèque », tel est le slogan électoral de cet ancien militaire. « J’ai toujours dit à tout le monde les yeux dans les yeux ce que je pensais », affirme-t-il dans son clip vidéo officiel, profitant de son image d’homme juste et intransigeant, d’un « manager de crise » qui a maintes fois prouvé ses capacités d’organisation et de négociation.
« On me demande souvent si je n’ai pas peur des débats pré-électoraux, par exemple avec Andrej Babiš. Je pense alors aux ‘discussions’ que j’avais avec le chef d’état-major russe après l’annexion de la Crimée et je me dis que je vais probablement m’en sortir », a déclaré Petr Pavel sur Twitter, avant qu’il ne soit désigné, mardi, comme l’un des candidats préférés de la coalition gouvernementale du Premier ministre conservateur Petr Fiala.
Selon les enquêtes d’opinion, Petr Pavel serait crédité d’environ 22% des intentions de vote, ce qui le place juste derrière l’ancien Premier ministre Andrej Babiš (près de 23,5% d’après Median) qui, lui, se prononcera sur son éventuelle candidature (ou celle d’un autre représentant de son mouvement ANO) à la fin du mois d’octobre.
Et si les Tchèques avaient une présidente ?
Au lieu de désigner son propre candidat, la coalition tripartite de centre-droit SPOLU (ODS + KDU-ČSL + TOP09) a effectivement suggéré aux électeurs de choisir parmi le général Petr Pavel, le sénateur Pavel Fischer et l’économiste Danuše Nerudová, qui arrive, elle, en troisième position avec environ 11% des intentions de vote : un chiffre qui ne cesse d’ailleurs de progresser.
Si d’après les sondages, Petr Pavel semble avoir l’avantage de séduire le large public, y compris les partisans de l’opposition et des partis non-parlementaires, Danuše Nerudová, 43 ans, ancienne rectrice de l’Université Mendel de Brno et mère de deux enfants, s’adresse principalement à un lectorat jeune, ainsi qu’aux femmes. Dans sa campagne, elle accentue l’aide aux personnes en détresse, y compris les familles monoparentales et les personnes âgées, le soutien aux entrepreneurs, ainsi que les thèmes écologiques.
D’autres candidats encore pourraient être en lice s’ils arrivent à récolter les 50 000 signatures à travers le pays, à savoir le leader syndicaliste Josef Středula, soutenu par le président Zeman, le milliardaire Karel Janeček ou encore le sénateur et médecin Marek Hilšer qui avait fini 5e lors de la précédente élection présidentielle de 2018.
La liste définitive des candidats à la succession de Miloš Zeman au Château de Prague sera publiée par le ministère de l’Intérieur après le 8 novembre.