Jan Švejnar : le PIB tchèque pourrait baisser de 8% et le chômage monter à 8%
La volonté du gouvernement tchèque de s'attaquer aux impacts économiques de la crise des coronavirus est impressionnante, mais il doit faire beaucoup mieux lorsqu'il s'agit de fournir de l'aide aux entreprises durement touchées, selon le professeur Jan Švejnar de l'Université Columbia, qui a dirigé une équipe d'économistes conseillant la cellule de crise gouvernementale de la République tchèque. Extraits de l’entretien publié lundi par la rédaction en anglais de RPI :
Jan Švejnar : « Oui, c'est vrai pour tous les gouvernements du monde. Vous devez vous assurer que les gens trouvent vos démarches crédibles, que vous êtes prêt, en tant que gouvernement, à investir beaucoup de ressources, afin de réduire l'incertitude, qui est l'un des principaux problèmes de cette période. »
« Et le gouvernement tchèque peut être crédible, car même un déficit substantiel ne rendra pas vraiment sa situation d'endettement insupportable. Donc, dans ce sens, je pense que c'est une bonne idée. »
Selon vous, combien l'économie tchèque est-elle susceptible de souffrir cette année? Quel sera le ralentissement?
« En tant qu'équipe consultative, nous avons travaillé sur une estimation avec une baisse de 7,5% ou 8% du PIB, ce qui est plus que ce que le ministère des Finances prévoyait plus tôt cette année. Je pense que nous sommes plus proches du chiffre réel. Bien sûr, l'aspect inquiétant est de savoir s'il y aura une deuxième vague de l'épidémie et un autre confinement ou demi-verrouillage; dans ce cas là je pense que la baisse du PIB serait à deux chiffres. "
Le chômage est généralement l'un des derniers indicateurs à atteindre un pic, du moins en Europe. Quand pensez-vous que la République tchèque va vraiment atteindre ce pic ?
« Je pense que ça vient plus lentement qu'ailleurs. Cela a toujours été le cas. Si vous regardez la dernière récession, la grande récession de 2008 / 2009, les données indiquent toujours qu'elle est plus lente qu'aux États-Unis, par exemple. Mais ça vient. Les mesures, comme le kurzarbeit (chômage partiel) et d'autres, atténuent l'impact. Mais je pense que le taux de chômage pourrait atteindre 5, 7, voire 8%, malheureusement. »
Selon vous les allocations-chômage en Tchéquie sont trop faibles et doivent être augmentées...
« Les allocations de chômage ont été fixées pour une période où le taux de chômage était très bas et très peu de personnes avaient besoin de s'en servir - et très peu pendant une longue période. Maintenant, la situation est différente. Pour beaucoup de gens maintenant, c'est un choc, beaucoup de gens perdent leur emploi ou vont perdre leur emploi. Et il est important qu’ils soient rémunérés afin qu’ils puissent chercher un emploi, qu’ils maintiennent vraiment leur niveau de vie, au moins temporairement, et qu’ils puissent trouver un nouvel emploi.« Même les États-Unis, l'État le moins social parmi les différents pays, ont doublé et triplé les allocations de chômage au cours des premiers mois. Donc, dans ce sens, il est absolument logique que les personnes qui se retrouvent au chômage, au moins pendant quelques mois, reçoivent des prestations un peu plus élevées. Il est également important d'un point de vue économique que ces personnes consomment pratiquement tous les revenus qu'elles obtiennent. Cela stimulera ainsi l'économie.
« Un problème est que l’économie souffre d’une demande insuffisante. Les entreprises reportent leurs investissements, les gens reportent leurs dépenses, ce qui aggrave bien sûr la récession. Donc, donner des allocations plus importantes à ces gens, qui dépenseront pratiquement toutes les couronnes qu'ils reçoivent, cela permet de stimuler l'économie. »