Jaroslav Hutka dénonce le « mouchard de Tesin »
A la veille du 17 novembre, une chanson écrite par le chanteur-compositeur Jaroslav Hutka fait parler d’elle. En effet, intitulée « Le mouchard de Tesin », elle fait directement référence à un de ses collègues chansonniers Jaromir Nohavica.
C’est notamment ce que lui reproche Jaroslav Hutka. Lui, comme d’autres personnalités de l’intelligentsia tchèque, avait fini par s’exiler aux Pays-Bas, en 1978, après des années de pression exercées par la StB dans le cadre d’une opération appelée « Assainissement ». Jaroslav Hutka :
« Ce qui m’a le plus mis en colère, en fait, c’est une dénonciation en particulier : en août 1989, quelques mois avant la Révolution, où d’après le rapport de la StB, il a été envoyé en ‘ service’. On lui a demandé de se mettre en contact avec certaines personnes, en l’occurrence Karel Kryl et Pavel Kohout. Il les a rencontrés et a fait un rapport. Et il y a plein d’autres points comme celui-ci qu’il faut qu’il explique. »
Karel Kryl était un grand chansonnier tchèque, connu pour ses textes engagés. Parti en exil, il était devenu présentateur à Radio Europe Libre. Pavel Kohout est un dramaturge, également parti après 1968.
Dans les années 1980, Jaromir Nahovica avait pu aller donner un concert à Vienne, mais en échange, avait été chargé de renseigner la police politique communiste sur les faits et gestes des artistes exilés, notamment ceux de Karel Kryl.
Hutka refuse les excuses classiques souvent présentées, selon lesquelles la dénonciation n’était pas systématiquement utilisée contre les personnes surveillées. Pour lui, le simple fait que le mouchardage ait pu servir est suffisant :
« Cette dénonciation a causé du tort à Kryl. D’abord, Nohavica l’a caricaturé assez méchamment et pour la police, c’était une bonne nouvelle. Ils pouvaient en déduire qu’il n’était pas satisfait, qu’il était faible psychologiquement. C’était une façon de savoir comment le manipuler le cas échéant. Ensuite, il y a la description des problèmes de Kryl à Radio Europe Libre. Il ne l’avait avoué à personne, mais à son copain tchèque, il s’est confié. Et lui a tout dit à la police. Or, dès que quelqu’un avait un problème, pour la police c’était bon signe, le signe qu’il y avait moyen d’en tirer profit. »
Ecrite en juillet dernier, lors d’un séjour en France, la chanson a fait le tour de la Toile et des boîtes mail.