Presse : Jaromír Nohavica, le « barde national » tombé en disgrâce pour ses positions prorusses

En novembre 2018, le chanteur tchèque Jaromír Nohavica a reçu un prix des mains de Vladimir Poutine

Très populaire il y a encore quelques années, le chansionnier Jaromír Nohavica est désormais sous le feu de critiques pour ses positions prorusses très controversées. C’est le premier sujet de cette nouvelle revue de la presse tchèque qui s’intéresse aussi à la consommation croissante du kratom par les jeunes Tchèques et au débat houleux que son utilisation a fait naître, au refus par une partie des Tchèques de l’aide aux réfugiés ukrainiens ou encore au centenaire de la naissance de l’acteur français Gérard Philippe, qui était très apprécié du public tchèque.

L’article le plus lu cette semaine dans le quotidien Hospodářské noviny ne traitait pas, comme il en va d’habitude, d’un sujet d’ordre économique, financier ou politique. Non, il évoquait le cas très médiatisé de Jaromír Nohavica. Parfois surnommé « Le barde d’Ostrava » ou même « Le barde national », le chansionnier tchèque, qui compte parmi les chanteurs les plus populaires du pays, a soulevé un tollé de réactions négatives, et ce également auprès de ses fans, en raison de ses récentes prises de position en faveur de la Russie. Le journal situe son histoire dans un contexte plus large:

«Depuis les années 1980, les chansons de Jaromír Nohavica ravissent un vaste public tchèque qui l’adorait. Le problème aujourd’hui, c’est que le chansonnier, doté d’un indéniable talent poétique, se range dans le camp de ceux qui sympathisent avec le régime autoritaire en Russie. Sa dernière chanson, dans laquelle il traite sur le ton de l’ironie du missile tombé en Pologne et recommande, sur le ton de la propagande russe, de s’adresser au président américain, est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. »

« Que s’est-il passé donc avec notre barde national et faut-il lui reprocher ses positions ? », s’interroge toujours Hospodářské noviny, qui ne s’étonne toutefois guère de cette évolution. Dans un passé récent, Jaromír Nohavica avait ainsi déjà manifesté ses sympathies pour des formations anti-système. Il s’était aussi rendu à Moscou pour y être décoré des mains du président Poutine et s’était laissé prendre en photo avec des populistes prorusses. « Comme si, à un moment, il a cru que son attitude faisait de lui un nouveau dissident et qu’un chansonnier se devait d’être en permanence en opposition », écrit encore l’auteur avant de s’intéresser à un autre point de cette polémique :

« Certains de ses fans, déçus, déclarent ne plus vouloir écouter les chansons de Nohavica. Mais c’est là une façon d’envisager les choses discutable. Sans doute vaut-il mieux discerner l’œuvre remarquable de l’auteur de ses positions morales et politiques. »

Le kratom en Tchéquie

Le kratom est-il une drogue, une substance psychotrope, ou un médicament prometteur ? Cette question, à laquelle de nombreux pays ont déjà répondu en interdisant son utilisation, a fait naître un débat houleux en Tchéquie. Elle préoccupe également le site Seznam Zprávy :

Kratom | Photo: Psychonaught,  Wikimedia Commons,  public domain

« Les effets du kratom, comme on le sait, sont très divers. À faible dose, il agit comme un stimulant euphorique, tandis qu’il peut avoir des effets narcotiques à dose plus élevée. De l’avis de beaucoup d’experts, les effets toxiques, qui sont nuisibles pour la santé et provoquent une dépendance, prédominent. C’est pourquoi beaucoup souhaitent que le kratom soit inscrit sur la liste des psychotropes contrôlés. »

Le kratom est très populaire notamment auprès des lycéens et étudiants tchèques. Selon une étude effectuée il y a un an, la plante serait consommée par près de 20 % des étudiants. Seznam Zprávy souligne encore :

« En Tchéquie, le kratom est en vente libre sous forme de poudre, de gélules, de capsules et de sirops. Tout laisse à penser que dans un proche avenir sa popularité, tout comme le désarroi et les inquitétudes qui l’accompagnent, sera encore plus grande. »

Les Tchèques moins disposés à aider les réfugiés ukrainiens

« Le gouvernement tchèque aide trente fois plus les Tchèques que les Ukrainiens, mais parce qu’il ne communique pas suffisamment avec les gens, ceux-ci ne le savent pas », constate le site Aktualne.cz. Selon un récent sondage, plus de la moitié des Tchèques pensent que le cabinet dirigé par Petr Fiala aide les réfugiés ukrainiens au détriment de la majorité de la population. Il ne s’agit toutefois là que d’une fausse idée, comme le confirment les chiffres et comme le note le site :

Photo illustrative: René Volfík,  iROZHLAS.cz

« Affirmer que le gouvernement se moque de la population locale est un mensonge. Qui le diffusent ? Pour ce qui est de l’opposition, rappelons l’expression ‘nos gens’ qui a été utilisée par l’ex-Premier ministre Andrej Babiš et qui était ouvertement dirigée contre les étrangers. C’est une tactique à laquelle recourt également Tomio Okamura, le chef du parti d’extrême-droite Liberté et démocratie directe. Puis s’y ajoutent tous les partisans de la Russie de Poutine, qui cherchent à attiser les révoltes populaires et menacent d’émeutes dans la rue. Evidemment, cette position s’inscrit également dans le cadre de la guerre hybride. »

Avec l’arrivée de l’hiver et en raison de la stratégie dévastatrice de Poutine, le nombre de réfugiés ukrainiens en Tchéquie va probablement encore augmenter. En août, comme le précise le texte, le nombre de personnes qui ont trouvé refuge en Tchéquie, parmi lesquels beaucoup d’enfants, était d’environ 300 000. Trois mois plus tard, près de 100 000 Ukrainiens ont officiellement trouvé un emploi, sans compter ceux qui travaillent au noir. Dans ce contexte, Seznam Zprávy souligne :

« Même si le succès de sa politique est mitigé, le gouvernement entreprend quand même beaucoup de choses pour les gens sans que ceux-ci n’en tiennent compte. Ils sont des centaines à répéter comme des perroquets les mensonges des activistes prorusses. L’instinct de survie politique appelle donc le gouvernement à se défendre activement et à lancer une campagne d’information digne de ce nom. L’enjeu est trop important pour laisser faire les choses. »

Entre la Tchéquie et l’Allemagne, des liens et des inspirations économiques

Les Tchèques eux-mêmes aiment à dire que la Tchéquie est le dix-septième Land de l’Allemagne. « Cette plaisanterie n’est pas très éloignée de la vérité, du moins sur le plan économique », peut-on lire dans le journal Deník. Son auteur explique pourquoi :

Source: Christian Dorn,  Pixabay,  Pixabay License

« Notre économie est étroitement liée à l’économie allemande, et cette proximité est source de beaucoup d’avantages. Les Tchèques ont participé aux heureuses années que l’Allemagne a traversées avant la pandémie de coronavirus. Hélas, la Tchéquie partage également les malheurs de son voisin, y compris sa dépendance au gaz russe. Tandis que celle de l’Allemagne était d’environ 60 %, la nôtre était proche des 100 %. »

Si, d’ici la fin de la présidence tchèque de l’UE, le 31 décembre, aucune solution n’est trouvée à l’échelle européenne, il faudra s’inspirer de l’Allemagne, estime encore Deník. Autrement dit, apporter une aide très élevée aux entreprises.

Le centenaire de la naissance de Gérard Philippe ne passe pas inaperçu en RT

Le quotidien Lidové noviny a rappelé le centenaire de la naissance de Gérard Philippe. L’acteur français est venu au monde le 4 décembre 1922. L’occasion pour l’auteure qui a retenu cet anniversaire de remarquer :

Gérard Philippe dans Le Cid en 1954 | Photo: Wydawnictwa Artystyczne i Filmowe,  Warsaw,  Poland/Wikimedia Commons,  public domain

« Gérard Philippe est la plus grand idole de l’après-guerre. Même sa mort précoce n’a pas amoindri sa gloire. Si, en France, des écoles, des théâtres, des festivals ou des rues portent son nom, en Tchéquie il reste un des plus grands, populaires et séduisants acteurs français. Il demeurera à jamais jeune et beau, une incarnation de la jeunesse et des élans de son époque. L’époque de la fin des années 1940 et des années 1950 qui, chez nous, était sombre mais qui, dans le monde libre, était empreinte d’un nouveau souffle  dynamique ».

Lidové noviny rappelle aussi que Gérard Philippe s’est présenté en 1955 avec le Théâtre national populaire à Prague, dans les rôles du Cid et de Ruy Blas. Le journal évoque également le nom d’Anne Philippe, l’épouse de l’acteur et son engagement en faveur de la Charte 77, une pétition des dissidents tchécoslovaques.