Jaroslav Kvapil

Jaroslav Kvapil, fondateur de la mise en scène tchèque moderne, poète, critique et auteur dramatique, traducteur et journaliste, a marqué par sa personnalité l'histoire du théâtre tchèque. Son nom n'est pas inconnu même à l'étranger.

Dès sa jeunesse, il était attiré par la littérature et les arts dramatiques. Il voulait pourtant satisfaire le désir de ses parents à exercer un métier soi-disant sérieux. Le jeune homme opte pour les études en médecine, pensant faire la même profession que son père. Il abandonne aussitôt et passe à la faculté des lettres, puis touche aux études de droit. Il ne réussit à terminer aucune des universités. L'esprit d'artiste, libre comme le vol d'un rapace, se sent coincé par le milieu académique. Nature de bohème, J. Kvapil est parfaitement à l'aise dans les petites auberges et cafés où se réunissent les artistes. A cette époque, il publie un premier recueil de poème Les étoiles filantes (Padajici hvezdy). La critique est des plus favorables. Le jeune poète commence à fréquenter les salons littéraires et est accueilli à bras ouvert. Il renonce définitivement aux études et travaille dans différents journaux comme rédacteur. Il est fixé au journal Prague d'or (Zlata Praha), lorsqu'il fait la connaissance de son grand amour, la célèbre comédienne Hana Kubesova. Les deux artistes se sont rencontrés pour la première fois dans les coulisses du Théâtre national pendant l'entracte de la mise en scène du conte de fée Les sept corbeaux (Sedm havranu). J. Kvapil était très impressionné par le charisme de la jeune femme, habillée alors en costume de fée. H. Kubesova avait trente ans, le poète vingt deux. La ravissante comédienne dégageait un charme indéfinissable ; sa beauté juvénile et sa douceur envoûtèrent le poète. Les deux artistes tombent éperdument amoureux l'un de l'autre et se marient. Suivront plusieurs années de bonheur conjugal. H. Kubesova-Kvapilova motive et inspire J. Kvapil à écrire des pièces dont les rôles principaux sont incarnés par elle. Le jeune poète travaille pour le Théâtre national comme metteur en scène, auteur dramatique, critique et traducteur. Il a écrit plusieurs livrets d'opéra comme l'Ondine (Rusalka) d'A. Dvorak.

Suite aux changements, aux mutations du personnel de la direction du Théâtre national au tournant du 19ème siècle, il devient conseiller en oeuvres littéraires et dramatiques. L'enthousiasme fait place à la désillusion. Les anciens membres de la direction font tout pour se mettre en travers des idées et des revendications du jeune auteur. J. Kvapil et sa femme font l'objet de critiques acerbes, blessantes et scandaleuses. Le jeune auteur protège sa femme dans la mesure du possible, parfois de manière peu élégante, mais efficace. Une fois, par exemple, il a rossé un compositeur d'opérette, diffamateur connu, pour agression verbale de sa femme. J. Kvapil a réuni dans le cadre du Théâtre national un ensemble de comédiens remarquables dont Eduard Vojan, Jindrich Mosna, Marie Hübnerova, Leopolda Dostalova et Hana Kubesova-Kvapilova, parfaitement capables d'interpréter les rôles des plus exigeants, ce qui lui a permis de réaliser des mises en scène d'une grande valeur artistique.

Le décès prématuré de sa femme le consternera. La grande comédienne s'éteint à l'âge de quarante sept ans suite à une grave maladie. Le travail arrive à atténuer la douleur de l'auteur dramatique. Il se remarie trois ans après les obsèques de H. Kubesova-Kvapilova avec la comédienne Marie Rydlova, qui lui donne une fille, Eva. En 1911, J. Kvapil est nommé chef de la section dramatique du Théâtre national. Dix ans plus tard, directeur du théâtre de Vinohrady. Atteint d'une grave maladie ophtalmique, il est obligé de quitter le théâtre après sept ans de travail acharné. Pendant la seconde guerre mondiale, déjà pratiquement aveugle, il travaille beaucoup dans la résistance. Un an avant la fin de la guerre, il est arrêté par la Gestapo et incarcéré à la prison de Pankrac. Les nazis lui témoignaient un très grand respect et beaucoup d'admiration. Il se faisait appeler le roi de Bohême, en conséquence de la ressemblance avec Jean de Luxembourg.

Le célèbre metteur en scène est également l'auteur du projet de la Loi Kvapil, à deux articles, sur l'incinération. Initiative, qui vaudra à l'auteur un conflit avec les représentants de la religion. En Autriche-Hongrie, l'incinération n'était pas autorisée à l'époque. L'incinération de la dépouille mortelle de la femme de l'auteur dramatique a encore été effectuée à Saska Kamenice, en Allemagne. La loi Kvapil entrera en vigueur en 1919.

L'artiste émérite Jaroslav Kvapil, est décédé en janvier 1950, âgé de quatre vingt et un an.