Karlovy Vary 2018 : « A New York, je me sens Européen, en Europe, je me sens très Américain »

Sébastien Pilote, photo: ČTK / Slavomír Kubeš

Il n’y a pas de film français en compétition cette année, au 53e Festival du film de Karlovy Vary, mais la francophonie n’est pas absente pour autant : le dernier film du réalisateur québécois Sébastien Pilote, La Disparition des lucioles, concourt en effet pour le Globe de cristal. Avant d’évoquer, entre autres, le renouveau du cinéma québécois ces dernières années, Sébastien Pilote a évoqué au micro de Radio Prague son enthousiasme face au public fréquentant le festival :

Sébastien Pilote,  photo: ČTK / Slavomír Kubeš
« C’est la deuxième fois que je viens à Karlovy Vary avec un film. J’étais venu il y a quatre ans avec le film Le Démantèlement, qui avait été présenté juste avant au festival de Cannes pour la Semaine de la critique. J’avais été étonné par le festival de Karlovy Vary, où le public est très nombreux. Souvent le public des salles de cinéma dans les festivals est vieillissant, et il se renouvelle assez peu, donc c’est vraiment rafraîchissant de voir qu’ici au contraire, il y a beaucoup de jeunes dans les salles, et un beau mélange avec le public plus âgé. Je pense que c’est essentiel. Les jeunes sont amenés à voir du cinéma d’auteur, du cinéma international… Je trouve que c’est un travail d’éducation cinématographique qui est fantastique. Tous les festivals n’ont pas des salles pleines, donc d’arriver et de savoir que, la veille des projections déjà, les salles de 1 300 places sont pleines et que tous les billets sont vendus, c’est fantastique. »

C’était le cas de votre film justement, qui est en compétition. Vous me disiez hors micro qu’il était projeté à guichet fermé…

« Oui, c’est à guichet fermé, même la veille il était impossible d’avoir des billets pour les deux premières séances. La grande salle de l’Hotel Thermal était vraiment bondée. C’est toujours impressionnant de voir autant de gens devant soi quand on présente son film. Les réactions étaient très belles, donc je suis vraiment ravi. C’est un film que j’ai souhaité plus accessible par rapport aux précédents. »

53e Festival du film de Karlovy Vary,  photo: Štěpánka Budková
Avez-vous l’impression de faire partie d’une génération de réalisateurs québécois ?

« On a déjà parlé de cette idée il y a de cela cinq ou six ans, avec cette génération de cinéastes comme Denis Côté, Stéphane Lafleur, qui a fait le montage de mon film, Rafaël Ouellet, Louise Archambault, Chloé Robichaud... Le cinéma québécois était alors très présent dans les festivals internationaux. Mais ce n’est pas un club, on ne se voit pas souvent. C‘était quelque chose de beau pour le cinéma québécois mais c’était plutôt une vague, presque aussitôt un nouveau cinéma national qui prend la relève. C’était bien de voir des cinéastes comme Xavier Dolan, Denis Villeneuve ou Jean-Marc Vallée tourner ailleurs. Le cinéma québécois est très fort, il y a souvent des choses intéressantes qui se font, mais parfois avec des cinéastes moins connus. Le cinéma québécois est très actif. »

Quelles sont les influences du cinéma québécois ? Est-ce plutôt une influence américaine, européenne, ou bien un mélange de deux ?

« C’est toujours un peu cliché de le dire mais, que ce soit au niveau culinaire ou de notre culture en général, on est à la fois influencés par l’Europe et les Etats-Unis. Quand je vais aux Etats-Unis, à New York, je me sens Européen, et quand j’arrive en Europe je me sens très Américain. On n’est jamais totalement chez soi quand on est Québécois, qu’on est francophone comme moi, c’est vraiment un mélange des deux cultures. Personnellement je suis très influencé par le cinéma américain, mais quand je lis les médias américains spécialisés dans le cinéma, je me sens européen parce qu‘en tant que cinéphile et en tant que cinéaste, j’ai grandi avec les Cahiers du Cinéma ou Positif et les critiques et spécialistes de cinéma français. »