Krejčíková, une autre Tchèque en finale à Roland-Garros
Pour la troisième fois lors des cinq dernières éditions, une Tchèque participera à la finale des Internationaux de France de tennis à Roland-Garros, ce samedi contre la Russe Anastasia Pavlyuchenkova. En demi-finale, jeudi, Barbora Krejčíková est en effet venue à bout de la Grecque Maria Sakkari en trois sets (7-5, 4-6, 9-7). Inconnue du grand public il y a peu encore, la révélation du tournoi peut même espérer signer un doublé « simple - double » digne des plus belles heures de gloire de Martina Navrátilová.
Dans le tennis féminin ces dernières années, rien ne cache mieux une joueuse tchèque qu’une autre joueuse tchèque. Après Lucie Šafářová et Markéta Vondroušová, déjà finalistes surprises sur la terre battue parisienne en 2015 et 2019, c’est désormais au tour de Barbora Krejčíková (prononcez « Kreïtchikova ») d’apparaître d’un coup sur le devant de la scène à Roland-Garros, comme un magicien sortirait un lapin blanc de son chapeau.
A 25 ans, la native de Brno, qui jusqu’à ces derniers jours était assurément une des dix joueuses tchèques les moins connues à figurer dans le Top 100 mondial, ne sort toutefois pas tout à fait de nulle part. Même si elle trahit l’instabilité des résultats sur le circuit féminin, sa présence en finale ne s’apparente pas à l’arrivée d’un cheveu sur la soupe.
Certes, avant cette quinzaine parisienne de rêve, jamais encore elle n’était parvenue à dépasser le stade des huitièmes de finale dans un tournoi du Grand Chelem. Mais le 29 mai dernier, la veille de l’ouverture de Roland-Garros, elle avait remporté à Strasbourg le premier titre en simple de sa carrière. C’est donc sur la lancée de sa fructueuse semaine alsacienne, qui lui a permis de se hisser à la 33e place mondiale, que Krejčíková s’est présentée Porte d’Auteuil.
Et la voici donc en finale deux semaines plus tard, au bout d’une demi-finale longue de 3h18’ contre la très physique Maria Sakkari, un match dont on se souviendra davantage pour sa dramaturgie et ses rebondissements dans le troisième set que pour la qualité du jeu. Mais voilà bien là une considération technique d’esthète qui importait peu aux yeux de Krejčíková jeudi soir :
« Je dois dire qu’il y a eu quelques larmes certainement des deux côtés à la sortie du court, même si bien évidemment pas pour les mêmes raisons. Le match a été long, intense, serré, disputé avec beaucoup d’émotions. Cela fait parfois du bien de pleurer un peu et de se laisser aller. Je sais maintenant que je ramènerai quelque chose à la maison, que ce soit l’assiette remise à la finaliste malheureuse ou, comme je l’espère, la coupe pour la vainqueur. Je suis confiante, ce serait beau. »
Ce vendredi après-midi, Barbora Krejčíková pouvait même espérer un peu plus encore puisqu’avec sa compatriote Kateřína Siniaková, elle devait encore disputer la demi-finale du tournoi de double dames, une épreuve que les deux Tchèques ont déjà remportée ensemble en 2018.
Un doublé « simple – double » qui serait rare puisqu'il n’a plus été réalisé à Roland-Garros chez les femmes depuis Mary Pierce en 2000, qui serait identique aussi à ceux réussis par une certaine Martina Navrátilová en 1982 et 1984, et qui ferait entrer l’improbable parcours de Barbora Krejčíková un peu plus encore dans l’histoire.
Une histoire qui aurait d’ailleurs très bien pu arrêter de s’écrire en demi-finale, la Tchèque ayant été contrainte de sauver une balle de match ou encore d’accepter une mauvaise appréciation de l’arbitre de chaise sur une autre balle de match, cette fois en sa faveur. Mais Krejčíková a alors su rester maître de ses nerfs, et davantage que la qualité de son service, de son coup droit ou de son revers, c’est peut-être cette tranquillité d'esprit qui l’a menée jusqu’en finale :
« J’ai de la chance, ce doit être dans les gènes et je tiens ça de mon père que je remercie de toujours garder son calme. Je me souviens aussi d’Ivan Lendl, qui avait cette faculté de rester de marbre, d’être imperturbable, ce qui lui permettait de rester concentré et de bien jouer. C’est évident que c’est un avantage, car je pense que de ne rien laisser transparaître de ses émotions doit gêner les autres joueuses. »
A la différence de Šafářová et de Vondroušová qui ont échoué au pied de la dernière marche en s’inclinant en finale, Barbora Krejčíková espère donc disposer pour la finale des ressources mentales suffisantes pour, une fois encore, ne pouvoir laisser transparaître ses émotions qu’après la dernière balle victorieuse.