La condamnation d'un garde frontière
1986, en Tchécoslovaquie communiste, trois gardes frontière ont franchi la frontière tchéco-allemande pour fusiller un retraité allemand en promenade. Cette semaine, le tribunal a envoyé l'un d'eux en prison. Astrid Hofmanova.
Pavel Cada, 34 ans, qui travaille, aujourd'hui, comme gardien de prison, passera trois ans sous les verrous, le tribunal l'ayant reconnu coupable de tentative de l'assassinat. Avec lui, ses deux anciens collègues étaient assis sur le banc des accusés, mais le tribunal les a disculpés car, à la différence de Cada, ils assuraient avoir tiré en l'air. Pavel Cada lui aussi se défendait : « En tant qu'appelé, il y a quinze ans, je devais obéir aux ordres, donc ce n'est pas moi qui suis responsable... »
Mais revenons dans le passé. Que s'est-il passé en effet à la frontière allemande, ce 18 septembre 1986? Les gardes frontières étaient en alerte à cause de deux Polonais qui voulaient fuir en Allemagne. Lors de la poursuite, Pavel Cada et ses deux compagnons ont franchi la frontière allemande où ils tombaient sur un homme avec un sac à dos. L'ancien soldat de la Bundeswehr, Johann Dick, 59 ans, a décidé ce jour-là de faire une promenade dans les parages, mais il a mal choisi le trajet; il a terminé avec plusieurs balles dans le ventre. Après s'être rendus compte qu'ils se trouvaient environ deux cents mètres derrière la frontière, les trois gardes frontière ont traîné le corps inerte sur le territoire tchèque, où le ressortissant allemand allait succomber à ses blessures.
Après cet incident, la police militaire a ouvert une enquête, mais la police communiste a décidé de la suspendre en vue de conserver le secret sur toute l'affaire. Malgré tout, les autorités communistes n'ont pas réussi à l'étouffer. Le Président d'alors, Gustav Husak, a non seulement été obligé de présenter ses excuses au gouvernement allemand, mais la Tchécoslovaquie a aussi été tenue de payer aux survivants 100 000 DEM d'indemnisations et de remettre en liberté plusieurs prisonniers allemands. Sous l'ancien régime, rien de cette affaire n'estparu dans la presse. Ce n'est qu'au début des années quatre-vingt-dix, que l'Office de documentation et d'enquête sur les crimes du communisme a ouvert une enquête.
Dans les années 1948-1989, 133 personnes en fuite sont mortes à la frontière tchécoslovaque.