La Maladie blanche de Karel Čapek : un texte d’une « effrayante actualité »

La première de La Maladie blanche

Les Editions du Sonneur font partie de ces acteurs culturels éclairés qui font revivre l’œuvre de Karel Capek en français. Déjà à l’origine de plusieurs éditions dont Voyage dans le Nord ou Dášenka, elles viennent de rééditer un des textes phares de l’écrivain tchèque, La Maladie blanche, dont le sujet relatif à une pandémie mondiale sur fond de montée en puissance d’une dictature, résonne comme une effrayante prophétie avec l’actualité. Au micro de Radio Prague Int., Valérie Millet évoque son admiration pour l’écriture de Karel Čapek, plus que jamais salutaire par les temps qui courent :  

Photo: Editions du Sonneur

« La Maladie blanche est le quatrième ouvrage de Karel Čapek que nous publions. Ce n’est pas une nouvelle traduction. C’est une traduction qui avait été publiée par les éditions de la Différence à l’origine, qui ont malheureusement fermé. »

C’est une pièce de théâtre…

« C’est effectivement une pièce de théâtre qui a été jouée en France dans les années 1940. Mais on pourrait dire que c’est un texte dialogué car cela se lit très aisément ce qui n’est pas forcément le cas de toutes les pièces de théâtre. Il y a une lecture quasi romanesque qui peut se faire de ce texte. »

En République tchèque, on a beaucoup parlé de ce texte récemment, évidemment parce que Čapek est l’auteur qu’il est, mais aussi et surtout en raison du thème central de cette pandémie qui n’était pas sans rappeler ce que nous avons vécu depuis deux ans. Et il y a aussi ces parallèles évidents avec les régimes dictatoriaux. C’est donc un texte vraiment très actuel…

Le film 'La Maladie blanche' | Photo: ČT

« D’une effrayante actualité et d’une effrayante intelligence sur le genre humain, comme toujours chez Karel Čapek. C’est un texte où on retrouve des sujets qui hantent Capek : la science sans conscience, l’injustice sociale. Effectivement il y a une résonnance terrifiante parce que cette fameuse maladie blanche vient de Chine, touche les personnes de plus de 40 ans. C’est quasiment ce que nous avons vécu depuis deux ans. Tout cela sur fond de l’imminence d’une guerre ce qui fait que le texte est encore plus d’actualité depuis un mois et que l’Ukraine a été envahie par la Russie. Une fois encore, Čapek fait preuve d’une espèce de perception très juste, très acérée, très profonde du genre humain. »

En plus de cette perception très acérée du genre humain, en tant qu’éditrice et lectrice qu’appréciez-vous dans l’écriture de Karel Čapek ?

Karel Čapek | Photo: Archives de Z. R. Nešpor/Institut de la sociologie de l’Académie des Sciences

« Sa soi-disant simplicité qui en fait est d’une richesse et d’une complexité, d’une ironie tendre, d’une profondeur intense… Dans tous les textes de Čapek que nous avons publiés, on a souvent cette impression de simplicité. En vérité, celle-ci mène à ce qui à mon avis fait l’immense richesse de l’œuvre de Čapek: on entre dans ce biais-là dans des problématiques qui sont en réalité très graves. Il y a aussi cet humour… Car même dans la Maladie blanche qui traite d’un sujet très lourd, on est dans un univers tragico-comique. Il y a toujours cette élégance de l’humour utilisé par Čapek pour pointer de sa plume des problèmes ontologiques chez l’être humain. »

Avez-vous d’autres projets de publication à terme de ses œuvres ?

« Oui, dès le mois de septembre, nous publions un recueil de ses textes : Des chiens et des chats, illustrés par son frère, car c’était un vrai duo de choc. Ce sont des textes qui n’ont jamais été traduits en français et qui le seront par Benoît Meunier. On travaille à rendre possible d’autres projets. On veut continuer ce travail qu’on a initié avec Voyage vers le Nord, traduit également par Benoît Meunier. »

Auteur: Anna Kubišta
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