La ministre du Travail veut redynamiser la démographie tchèque
Presque tous les pays d’Europe centrale et orientale sont confrontés à une crise démographique majeure : le taux de fécondité y est très faible et leurs populations semblent condamnées à diminuer et à vieillir au cours de ce siècle. La République tchèque n’échappe pas à la règle et c’est pour tenter de contrer le phénomène que la ministre du Travail et des Affaires sociales Michaela Marksová soutient un vaste programme destiné à relancer le nombre de naissances dans le pays.
Voilà qui suppose un bouleversement de la structure de la société, d’autant plus que cette population vieillit. Vers 2101, un tiers des Tchèques devrait avoir plus de 65 ans. Comment s’organisera la société entre actifs et retraités ? Comment assurer un service social et de santé satisfaisant pour les personnes âgées ? Quelles infrastructures nouvelles faudra-t-il construire ? Autant de défis de taille auxquels la République tchèque risque bien d’être confrontée.
Aujourd’hui, si la population s’accroît encore, à un rythme extrêmement modéré, c’est essentiellement en raison de l’immigration, car le solde naturel est déjà négatif : il y a plus de décès que de naissances. Aussi, certains soutiennent que c’est par l’immigration que le pays peut pallier au déficit des naissances. Une idée qu’avait pourtant battue en brèche sur notre antenne la démographe Jitka Rychtaříková :
« Tous les démographes s’accordent là-dessus : les migrations ne peuvent pas remplacer la décroissance de la population parce qu’il faudrait avoir une migration très massive. Selon une projection démographique, la population de la République tchèque qui est d’à peu près de 10 millions aujourd’hui, devrait être de 7 millions pour l’année 2100. Cela veut donc dire qu’il faudrait 3 millions de migrants. Qui plus est, les migrants vont vieillir aussi. Donc pour les démographes, l’immigration n’est pas une solution pour arrêter le vieillissement démographique, cela peut seulement le modérer. »Pour Jitka Rychtaříková, c’est sur le taux de natalité en Tchéquie qu’il faut agir. Un message semble-t-il bien compris par la ministre du Travail, la sociale-démocrate Michaela Marksová, qui a préparé une « révolution de la politique familiale ». C’est en tout cas la formule utilisée par le quotidien Mladá fronta Dnes, qui a récemment dévoilé les points clefs du projet.
Parmi ces mesures élaborées par le ministère en coopération avec des « spécialistes », en reprenant des exemples « qui ont marché » ailleurs en Europe, la part belle est faite à l’augmentation des diverses allocations dont bénéficient les parents. Qu’il s’agisse des primes à la naissance, des allocations de maternité ou des allocations familiales. La ministre veut également garantir la gratuité de l’école maternelle. Il s’agit enfin de permettre aux femmes de pouvoir réussir leur réinsertion professionnelle après une grossesse et d’encourager les hommes à prendre des congés de paternité.« Soyez féconds, multipliez, remplissez la Tchéquie », tel pourrait être l’intitulé de ce programme dont il n’est pas sûr qu’il parvienne réellement à inverser la tendance. Pour qu’une population se renouvelle, le taux de fécondité doit être supérieur à 2,05 enfants par femme, or il tourne autour de 1,5 en République tchèque…
Surtout, il est loin de bénéficier d’un large appui politique puisqu’il est critiqué dans les rangs même de la majorité. Vice-présidente du comité parlementaire en charge des questions sociales à la Chambre des députés, Radka Maxová, du mouvement ANO, considère que cela est encore destiné « à un certain groupe de la population, dont les autres devraient s’occuper ». Quant aux chrétiens-démocrates, ils sont réservés sur certains points de ce texte qui pourrait chambouler le modèle de la « famille traditionnelle » à laquelle ils tiennent beaucoup.