« La Porte du non-retour » : une sculpture dédiée aux juifs déportés par les nazis
Un nouveau monument appelé « La Porte du non-retour » a été érigé à Prague pour commémorer l’holocauste des juifs tchèques. Installée devant l’ancienne gare Praha-Bubny, l’œuvre du sculpteur Aleš Veselý représente le premier pas vers la création du « Mémorial du silence », un projet qui veut transformer ce bâtiment désaffecté en mémorial de la Shoah.
« L’idée de base était d’y dresser une voie ferrée vers le ciel. Mais Aleš Veselý est un grand mystique et le motif qui l’intéresse depuis longtemps est l’échelle de Jacob symbolisant la rencontre de l’homme avec Dieu. L’œuvre ressemble donc à une échelle. Pourtant, nous pouvons y trouver d’autres motifs encore. Par exemple, l’œuvre contient trente-six traverses qui renvoient à une autre légende, selon laquelle la lourdeur du monde repose sur trente-six vertueux. Et puis, nous sommes à la gare, alors un rail installé d’une manière inhabituelle porte déjà un sens symbolique en lui-même. L’objet, étant placé sur l’endroit où passaient les transports, forme une sorte de porte et représente ainsi la mémoire de ce lieu. »
Auteur de ce monument gigantesque, Aleš Veselý qui vient, lui-même, d’une famille juive dont une grande partie a été déportée à Terezín, explique que la création de cette sculpture était pour lui une tâche personnelle :« Pour moi, la forme de la sculpture, les rails qui partent vers le ciel comme une sorte d’échelle de Jacob, était claire depuis le premier instant. Cela fait près de quarante à cinquante ans que je pense à réaliser ce projet. Je le sentais comme une obligation à l’égard de mes proches qui y sont passés et ne sont jamais revenus. »
L’inauguration officielle de la statue s’est déroulée entre autres en présence d’une trentaine de rescapés. Pavel Štingl poursuit en indiquant que le choix de la date du 9 mars pour le dévoilement du monument n’est pas dû au hasard :
« Il s’agit d’une date importante liée à l’histoire de l’holocauste des juifs tchèques, qui rappelle l’extermination du « camp familial de Terezín » regroupant à Auschwitz des familles venues du ghetto de Terezín. En termes statistiques, cette extermination est le plus grand massacre de citoyens tchèques lors de la Seconde Guerre mondiale pendant laquelle environ 4 000 femmes, hommes et enfants sont morts au cours d’une nuit. »
La statue constitue la première pierre de grand projet de « Mémorial du silence ». Pavel Štingl présente cette salle d’exposition qui devrait ouvrir ses portes à l’automne 2016, à l’occasion du soixante-quinzième anniversaire du premier convoi vers les camps de concentration :« Le projet envisage de changer la Gare de Bubny en mémorial de la Shoah. Mais notre intention est d’y discuter également de thèmes contemporains et de faire des parallèles. Le plan envisagé divise ce centre en sept parties. La première partie part sur les traces des transports vers les camps. Puis, il y a trois parties permanentes dont la première propose une réponse artistique à la question de savoir pourquoi ces événements se sont produits, la deuxième est dédiée au souvenir des personnes déportées via la gare et la troisième forme un rappel de la culture durant l’entre-deux-guerres. Et finalement, il y a aussi trois parties destinées aux expositions temporaires. »
Même si un autre mémorial à la Synagogue de Pinkas est dédié aux victimes tchèques du génocide juif, ce projet pourrait donner naissance au premier musée et centre de discussion sur l’holocauste à Prague.