La Poste tchèque abandonne le télégramme

Photo: CTK

A partir de ce jeudi, il ne sera plus possible d’envoyer de télégramme en République tchèque. La Poste tchèque a en effet décidé de supprimer à compter du 1er avril ce service traditionnel vieux de 160 ans. Et il ne s’agit pas là d’une farce faite pour le 1er avril, mais bien de la conséquence du constat que, à l’heure du courrier électronique et des téléphones portables, le télégramme est tombé en désuétude.

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Ainsi, tandis que plus de 120 000 dépêches avaient encore été transmises par télégraphe en 2000, leur nombre total a été six fois moindre l’année dernière. Et encore, seuls 756 de ces télégrammes ont été envoyés par des particuliers dans les 3337 bureaux de poste du pays, le reste l’ayant été par des entreprises. Des chiffres sans aucune mesure donc avec la fin du XIXe siècle ou la première moitié du XXe, quand plusieurs millions de télégrammes étaient envoyés chaque année. Une époque révolue, comme l’explique la porte-parole de la Poste tchèque, Marta Selicharová :

« Avec la communication électronique, ce service perd sa raison d’être. Les gens l’utilisent bien entendu beaucoup moins. Il s’agit d’un service que nous proposions encore pour la compagnie Telefónica O2. Or, Telefónica a résilié le contrat, nous avons donc décidé d’un commun accord de supprimer les télégrammes à partir du 1er avril. Cela signifie que les gens pourront envoyer un dernier télégramme ce mercredi 31 mars. »

Pour autant, si la Poste a décidé de le retirer de son offre de services, le télégramme ne disparaîtra pas encore complètement en République tchèque. Telefónica O2, la plus grande société de télécommunications dans le pays, détentrice de la licence pour l’exploitation du télégramme, sera la dernière à préserver ce service, notamment pour les hôpitaux qui s’en servent essentiellement pour annoncer la mort d’un patient aux parents proches. La Poste, elle, a évolué et propose depuis peu autre chose :

« Les télégrammes peuvent être remplacés par le nouveau service que nous avons instauré l’année dernière et que nous avons baptisé ‘lettre on-line’. Ce service est très simple : il suffit de remplir un formulaire sur votre ordinateur que vous envoyez ensuite à la poste. Celle-ci l’imprime, le met sous enveloppe puis l’expédie. Ce service coûte en moyenne 80 centimes d’euro et la lettre est remise à son destinataire le lendemain de l’envoi. »

Les télégraphes de Hughes dans la centrale télégraphique de Prague avant 1914,  photo: CTK
Tandis que des pays comme le Danemark et l’Irlande ont abandonné le télégramme au début des années 1980, puis la France peu après le passage au nouveau millénaire, la République tchèque, elle, a pris cette décision quelques décennies ou années plus tard. Il faut dire qu’il y a peu encore, et notamment avant la révolution de 1989, il s’agissait d’un service auquel un grand nombre de Tchèques recouraient, comme le rappelle le directeur du Musée de la poste, Jan Galuška :

« Il est intéressant de remarquer que le télégramme a connu son essor le plus important dans les années 1980. C’est même une curiosité car c’est une période qui correspond déjà à la fin ou presque de l’existence du télégramme. A l’époque, environ 9 millions de télégrammes avaient été envoyés dans toute la Tchécoslovaquie, c’est une quantité incroyable. Mais il faut se remettre dans le contexte et se souvenir dans quel état se trouvaient alors les communications dans le pays. Se souvenir comme il était difficile d’obtenir un téléphone, comme il était même souvent compliqué d’appeler quelque part. C’est ce qui explique que le télégramme était alors un service irremplaçable. »

Irremplaçable, le télégramme le reste néanmoins pour le président de la République et le Premier ministre, qui envoient encore régulièrement de la sorte leurs messages de condoléances ou de félicitations aux chefs d’Etat et de gouvernement d’autres pays, même dans ceux où le service a été abandonné. La transmission par voie officielle se fait alors par les ambassades.