La République tchèque et les fonds structurels: "Dix fois plus d'argent qu'avant"

Photo: Commission européenne

La Commission européenne, le gouvernement tchèque et les 14 régions (kraj) préparent actuellement la nouvelle génération de fonds structurels. La période de programmation 2007-2013 s'ouvre largement aux nouveaux États membres, qui toucheront à eux seuls plus de 50% des fonds européens. 8% sont alloués à la République tchèque, soit 26,6 milliards d'euros. C'est plus que la Hongrie, le Portugal ou la Grèce.

Georgios Yannoussis est le « Monsieur fonds structurels » pour la République tchèque à Bruxelles. D'origine grecque, ce francophone formé à Montpellier et à Polytechnique est chef d'unité à la DG Politique Régionale. Invité à s'exprimer le 30 mars par la Mission économique de Prague, il tente de donner un ordre de grandeur de ce que représentent les fonds communautaires pour la République tchèque.

"Tout d'abord, nous sommes devant des sommes très importantes : dix fois plus d'argent qu'entre 2004 et 2006. Je vais dire la même chose d'une autre façon : par année, la République tchèque devra absorber quatre fois plus d'argent que ce qu'elle devait absorber pendant la période 2004-2006, ce qui déjà était beaucoup plus important que ce qu'elle investissait avant 2004. L'utilisation des fonds dans ce pays constitue aussi un avantage pour les pays contributeurs nets. Des entreprises de l'Europe des Quinze vont venir ici, vont utiliser ces fonds, vont en tirer profit elles aussi. C'est quelque chose qui est également important pour l'Europe, et que nous répétons souvent à l'attention des opinions publiques des pays contributeurs nets."

Afin d'éviter toute « mauvaise surprise » budgétaire, la République tchèque, à la différence d'autres États membres, fait le choix de la prudence dans la redistribution du chèque européen. Une vigilance qui aura pour conséquence d'inviter les entreprises à investir avec leurs fonds propres, puis à présenter des demandes de remboursement.

"Bruxelles, lorsqu'elle approuve les programmes, verse un acompte aux États membres. Cet acompte, chaque État l'utilise comme bon lui semble. Certains le répercutent au bénéficiaire final, en tout cas public, dès l'approbation. D'autres sont plus craintifs, ils préfèrent que le bénéficiaire final finance une grande partie, voire l'entièreté du projet, vérifier tous les papiers, s'assurer que la dépense est éligible, et ne donner l'argent qu'à ce moment-là. Ce qui se justifie d'un point de vue de gestion budgétaire, parce que le ministère des Finances -en l'occurrence de la République tchèque, qui fait partie des États qui ont plutôt une attitude plus attentive, plus méticuleuse sur cette question - redoute que, si jamais cette dépense est illégale, elle ne soit déclarée inéligible. La Commission n'acceptera alors pas de rembourser la République tchèque, or la municipalité aura déjà payé son entrepreneur. Il est plus courant que l'on oblige les entreprises privées à mettre la main dans la poche avant de percevoir les subsides."

Photo: Commission européenne
Slalomant avec clarté entre les différentes nuances du jargon bruxellois, Georgios Yannoussis est revenu sur l'un des dossiers sensibles du moment : la question Veolia Voda. Le géant de l'eau, qui emploie près de 6000 personnes en République tchèque, est confronté à des réticences de Bruxelles concernant le cofinancement de l'exploitation de ses stations d'épuration en République tchèque.

"Effectivement, c'est un sujet particulier, ancien et difficile. Le problème est que la Commission européenne, dans le cadre de l'examen qu'elle doit faire des projets qu'elle finance, a constaté que certains contrats portant sur l'exploitation d'anciennes infrastructures reposaient sur des règles contractuelles qui n'étaient pas « en ligne » -disons-le comme ça- avec les pratiques internationales courantes. Depuis 2004, après de multiples études effectuées par la Commission, nous avons eu la confirmation de tous nos services que certaines clauses contractuelles ne sont pas de nature à garantir l'intérêt du budget communautaire dans ce projet. Je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas de « concession de construction et exploitation », mais de « concession d'exploitation ». Une importante partie de notre temps, jusqu'à maintenant, nous l'avons d'ailleurs un petit peu gaspillé pour se comprendre mutuellement. Quand il y a un investissement privé pour construire une infrastructure et l'exploiter par la suite, nous comprenons très bien que la durée d'exploitation doit être longue pour permettre à ce capital privé d'être récupéré et rémunéré. En l'absence d'investissement privé, et donc dans le contexte de concession d'exploitation, la situation est différente et des durées aussi longues ne sont pas justifiées eu égard au droit communautaire."

Les négociations entre Veolia et la Commission sont en cours. Le risque demeure que leur issue ait des répercussions sur les factures d'eau des usagers. Concernant l'agenda 2007-2013, si le gouvernement et les régions tchèques sont sensiblement en retard sur le calendrier fixé par la Commission, la grande majorité des programmes devraient être validés, et les appels d'offres publiés cet automne.

Auteur: Diane Dupré La Tour
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