La République tchèque, le cheval de Troie des OGM en Europe ?
Le ministère de l’Environnement tchèque a préparé un amendement de la loi sur l’utilisation des organismes génétiquement modifiés (OGM). Selon le rapport ministériel, il s’agit de mettre en conformité les règles tchèques avec la législation européenne, car ces premières seraient plus restrictives par rapport à la norme communautaire. Cependant, l’Union Pro-Bio des agriculteurs tchèques proteste contre ces changements. Au micro de Radio Prague, Kateřina Nesrstová de Pro-Bio explique en quoi le nouveau projet est dangereux.
« Le projet d’amendement de cette loi prévoit surtout une facilitation du travail des personnes autorisées à manipuler des OGM, s’il s’agit de centres de recherche, de laboratoires, d’hôpitaux etc. Cet amendement assouplit l’encadrement du travail avec les OGM. »
Concrètement, il s’agit surtout de trois changements. Alors qu’il existe différents niveaux de danger liés à l’utilisation des OGM, la loi en question ne concerne que le premier niveau, celui qui représente le moins de risque. Jusqu’à présent, la manipulation d’un nouvel OGM est systématiquement notifiée auprès des autorités compétentes. Le nouveau texte supprime cette obligation. Une unique autorisation de manipuler des OGM suffira à travailler sur de nouvelles variétés génétiquement modifiées. L’amendement veut également mettre fin à l’obligation de renouveler un plan d’urgence tous les cinq ans pour les lieux de travail fermés où sont présents des OGM. Enfin, le ministère envisage de raccourcir à cinq ans au lieu de dix la période durant laquelle doivent être conservées les archives relatant des expériences avec des OGM. Derrière la baisse des coûts administratifs, Kateřina Nesrstová voit surtout poindre certains risques :
« De notre point de vue, la modification législative comporte également certains risques de diminution de la sécurité lors des différentes étapes de manipulation des OGM. Il est surtout choquant que le ministère de l’Environnement, au lieu de restreindre l’utilisation des OGM, en facilite la manipulation. Il faut souligner que nous ne savons pas ce qui peut se passer si un organisme modifié s’échappe d’un espace fermé et se propage dans la nature. Les conséquences environnementales des OGM ne sont pas encore tout à fait connues et il faut, de ce fait, insister sur le principe de précaution. Si pas même les agriculteurs écologiques ne s’opposent à cet affaiblissement des normes, alors qui le fera ? »Pour Kateřina Nesrstová, certaines des précautions inscrites dans la loi et aujourd’hui menacées ont du sens car le danger pour l’agriculture et l’environnement en cas d’incident peut être disproportionné par rapport aux gains attendus de l’abaissement des coûts administratifs. Selon la responsable de Pro-Bio, la République tchèque agit sur la question des OGM tel un cheval de Troie au sein de l’UE. Dans les pays voisins, la tendance serait plutôt à l’interdiction de ces organismes, comme en France, avec une décision en août 2013 sur le maïs génétiquement modifié. Ce type de maïs, conçu par la multinationale américaine Monsanto, ainsi que des pommes de terre génétiquement modifiées, sont pourtant cultivés en République tchèque.
Si les aliments contiennent moins de 1 % d’OGM, leur présence n’est pas indiquée. En conséquence, les consommateurs peuvent difficilement éviter de retrouver des OGM dans leur assiette. De plus, il est impossible de savoir si le lait ou la viande sont issus ou non d’un animal nourri au soja génétiquement modifié. En dépit des réticences de l’opinion publique européenne, ce sont surtout le manque d’information et d’intérêt pour la question qui prédominent actuellement en République tchèque selon Kateřina Nesrstová.