La semaine de l’éco
Retour sur l’actualité économique de la semaine écoulée en République tchèque…
Cinq ans après, l’expérience slovaque de l’euro reste peu connue en Tchéquie
Cela fait cinq ans que la Slovaquie a adopté l’euro et son expérience de la monnaie commune est peu reflétée en République tchèque. En amont d’un reportage plus complet que Radio Prague vous propose ce vendredi, voici un aperçu sur cette question.A l’approche des élections européennes, plusieurs partis politiques tchèques ont fait du refus de l’euro leur cheval de bataille. Parmi eux se range également le Parti civique démocrate (ODS), ancien parti gouvernemental à l’heure actuelle, du haut de ses seize députés, relégué à la cinquième place à la Chambre basse. Il y a quatre ans de cela, le membre de l’ODS, l’actuel eurodéputé Hynek Fajmon écrivait sur son blog associé au site du quotidien Mladá Fronta Dnes : « A l’exception de quelques journalistes égarés, plus personne ne souhaite adopter l’euro en République tchèque. » Plus loin, il explique : « Les Tchèques font beaucoup plus confiance à la couronne que les Polonais au złoty, les Hongrois au forint ou les Lettons au lats. » A noter qu’en janvier 2014, la Lettonie a adopté la monnaie commune pour ainsi devenir le 18e membre de la zone euro.
En novembre 2012, à l’occasion d’un débat dans le cadre de la campagne présidentielle, le candidat social-démocrate, l’actuel ministre sans portefeuille Jiří Dienstbier déclarait : « La République tchèque devrait adhérer à l’euro, mais à l’heure actuelle, la zone euro est dans un état déplorable et l’économie tchèque n’est pas prête. » Il prônait pour une attitude « attendre et voir » l’évolution dans la zone euro. A l’heure des changements majeurs dans l’organisation de cet espace monétaire, ce type d’argument se base sur l’insécurité quant à la direction de la future intégration européenne. Cependant, pour Vladimír Bartovic du laboratoire d’idées pragois Europeum, cette attitude est problématique dans la mesure où elle exclut la République tchèque des négociations. Si un processus de réforme est en cours, le pays reste à l’écart de ces changements sans avoir la possibilité d’en influencer les résultats.
Il est frappant qu’un débat sur l’opportunité ou non de l’adoption de l’euro est pratiquement absent en République tchèque. Pourtant la Slovaquie pays qui est considéré comme le plus proche allié de la République tchèque, et le pays avec lequel la République tchèque a partagé le même Etat pendant une grande partie du vingtième siècle, a adopté l’euro il y a cinq ans. Récemment, l’hebdomadaire Respekt a consacré une double page à la « vie sans couronne » en Slovaquie. Le journaliste Martin M. Šimečka conclut que les effets de la monnaie commune sur l’économie du pays sont difficiles, voire impossibles à mesurer. Néanmoins, près de 56% des Slovaques sont satisfaits avec leur monnaie européenne.
En janvier 2014, le directeur du think tank Europeum, David Král, affirmait à ce sujet au micro de Radio Prague : « Je ne sais pas pourquoi l’expérience slovaque n’est pas plus discutée en République tchèque. Je pense que nous sommes très proches de la Slovaquie, mais dans les affaires européennes, cela semble être autre chose. Quand vous parlez avec les citoyens slovaques, ils sont très satisfaits de l’euro et il y en va de même avec les entrepreneurs. Je n’en ai personnellement rencontré aucun qui serait mécontent de l’euro. Par ailleurs, les sondages confirment cela. Je pense qu’il s’agissait de la part des hommes politiques tchèques, surtout de l’ancien parti gouvernemental, leParti civique démocrate, d’un calcul, d’une stratégie visant à éviter de parler de la Slovaquie. Ils étaient eux-mêmes réticents à l’adoption de l’euro et donc présenter ses problèmes leur convenait mieux que de parler des bons effets. Je pense que le débat politique aurait été plus équilibré si l’expérience slovaque avait été mieux analysée en République tchèque. »
De nouvelles erreurs mises à jour dans l’utilisation des fonds européens en République tchèque
L’Office suprême de contrôle (NKÚ) a réalisé un audit sur les projets financés par les subventions de l’Union européenne du programme opérationnel « Entreprises et innovations » révélant des erreurs de l’ordre de 105 millions de couronnes, soit près de quatre millions d’euros. Ce chiffre vient de nouveau confirmer les sévères constats de la commission du contrôle budgétaire du Parlement européen qui, début avril, a critiqué la République tchèque pour sa gestion des fonds européens et appelé la Chambre des députés et le Sénat à créer une commission parlementaire chargée d’enquêter sur les différentes fraudes et affaires de corruption relatives à l'utilisation de cet argent.
Le total des projets surveillés par l’Office suprême de contrôle représente une somme de plus d’un milliard de couronnes, c’est-à-dire plus de 36 millions d’euros. Les torts se partagent entre les entreprises qui utilisent cet argent et les autorités publiques, sous l’égide du ministère de l’Industrie et de l’agence gouvernementale CzechInvest, qui les répartissent. Le système d’attribution de ces subventions européennes au niveau de l’évaluation des projets candidats est notamment mis en cause. D’autres irrégularités seraient liées à des défauts quant au contrôle de la façon dont cet argent est effectivement utilisé.
Le ministère de l’Industrie a fait savoir qu’il accueillait cette évaluation de façon positive tout en gardant des réserves sur la critique du système d’évaluation des projets sollicitant l’aide des fonds européens. Selon František Kotrba, le porte-parole du ministère, les projets sont en effet examinés par un comité d’experts dont l’indépendance ne saurait être remise en question.
Approuvé par la Commission européenne en 2007, le programme opérationnel « Entreprises et innovations », financé en partie par le FEDER (Fonds européen de développement régional), vise au développement des petites et moyennes entreprises en République tchèque. Dans ce cadre, une somme de 3,6 milliards d’euros a été mise à disposition des régions tchèques pour la période 2007-2013, ce qui correspond à 12% du total des fonds communautaires investis en République tchèque au titre de la politique de cohésion.
Les Tchèques n’ont toutefois pas profité de l’opportunité offerte puisque à la fin de l’année dernière, seule la moitié de cet argent (environ 1,8 milliards d’euros) avait été jusqu’alors mobilisé avec le programme « Entreprises et innovations ». Ainsi, alors que Bruxelles n’a pas encore tranché question, la République tchèque pourrait tout simplement perdre la possibilité d’utiliser ces subventions.
TVA : le ministère des Finances prévoit trois nouveaux taux pour 2016
La République tchèque pourrait posséder trois taux de TVA à compter de 2016. Selon le projet de programme de convergence pour l’Union européenne préparé par le ministère des Finances, des taux de 10, 14 et 20% pourraient être appliqués sur les différents biens et services taxés. Actuellement, les deux taux en vigueur s’élèvent à 15 et 21%.
Les médicaments, les produits de santé considérés comme étant de première nécessité, les livres et autres publications feraient l’objet d’un taux réduit à 10%, tandis que les produits alimentaires, l’eau, le chauffage et les transports seraient taxés à hauteur de 14%. Tous les autres biens et services rentreraient dans « la catégorie 20% ». Selon les calculs du ministère des Finances, l’application de ce nouveau système d’imposition devrait représenter un manque à gagner d’environ 16 milliards de couronnes (590 millions d’euros) par an.
Selon le Premier ministre, Bohuslav Sobotka, le taux de TVA appliqué sur les livres et les publications pourrait même être réduit avant 2016. « Une réduction à 10% me semble envisageable dès le 1er janvier 2015 », a ainsi déclaré le chef du gouvernement ce mercredi, à la sortie du conseil des ministres. Toutefois, contrairement à ce qui avait été initialement envisagé, les couches et les petits pots (portions de nourriture préparées pour les bébés) ne figurent pas dans la liste des produits taxés au taux réduit le plus faible.
Des mesures contre l’offre gratuite d’alcool
Là où une simple autorisation permettait d’offrir de l’alcool gratuitement, les distributeurs d’alcool doivent, à partir de ce vendredi, obtenir une dérogation pour un coût allant de 500 à 1000 couronnes (entre 18 et 36 euros). Ceux qui ne respecteront pas cette nouvelle règle, s’exposeront à une amende pouvant aller jusqu’à un million de couronnes (plus de 36 000 euros). Cette mesure s’inscrit dans le cadre d’un amendement à la loi sur l’artisanat préparé par le gouvernement en réaction à l’affaire du méthanol. A l’automne 2012, une importante affaire sanitaire dite de l’alcool frelaté avait causé la mort en République tchèque de plusieurs dizaines de personnes. Du méthanol avait été ajouté dans des milliers de bouteilles de spiritueux.
Jusqu’alors les commerçants et tenanciers de bar disposaient de six mois pour demander une dérogation sans payer le moindre frais leur autorisant à distribuer de l’alcool gratuitement. Ces concessions étaient systématiquement accordées. Incompréhensible pour Zdeněk Juračka de l’Union tchèque du commerce et du tourisme qui critiquait le laxisme des autorités publiques en la matière facilitant selon lui grandement la distribution de bouteilles d’alcool de contrebande. Selon lui ces autorisations devraient être accordées sous réserve de tenir une comptabilité adaptée et de payer la TVA sur les boissons distribuées gratuitement.
Selon le ministère de l’Industrie et du Commerce, il y aurait 185 000 débits de boisson ou établissements habilités à vendre de l’alcool. Pourtant, ce sont jusqu’à 1,9 millions de personnes morales qui pouvaient réaliser cette demande afin de fournir de l’alcool gratuitement. Les associations entraient dans cette catégorie à l’occasion par exemple de l’organisation d'une fête de village, d’un carnaval ou de tout événement culturel. Jitka Danielová, de l’administration fiscale, estime que le marché noir représente environ 10% des ventes d’alcool, ce qui représenterait une perte de 700 millions de couronnes chaque année pour l’Etat (plus de 25 millions d’euros). L’obligation de payer des frais pour distribuer gratuitement des liqueurs présentant un degré d’alcool supérieur à 15 degrés doit contribuer, même à la marge, à réduire ce manque à gagner en luttant contre le marché noir.
Prague a envoyé le document indispensable pour le versement des milliards d’euros des subventions européennes
La République tchèque a envoyé à Bruxelles la version finale de l’Accord de partenariat. Adopté début avril, ce document stratégique est indispensable pour pouvoir percevoir les subventions en provenance des fonds européens pour les sept prochaines années. Très critiquée par les institutions européennes lors de la précédente période entre 2007 et 2013, la République tchèque pourrait recevoir jusqu’à 22 milliards d’euros pour la période 2014-2020.
Avant cela, le gouvernement de Bohuslav Sobotka se doit cependant de définir les principaux domaines dans lesquels elle entend investir à l'aide des subventions européennes. « Nous avons préparé une stratégie de qualité […]. Il appartient maintenant à la Commission européenne de juger si nous avons rempli toutes les conditions figurant dans l’accord », a expliqué le ministre-adjoint du Développement régional.
La Commission a déjà fait savoir qu’elle avait apprécié les préparatifs tchèques pour la nouvelle période qui s’ouvre. Elle dispose désormais de trois mois pour étudier le dossier en provenance de Prague. Si aucune objection n’est formulée, son approbation pourrait être effective aux environs du mois de septembre prochain.
Sans surprise, les infrastructures, la recherche et le développement, l’environnement ou le rendement énergétique sont les principaux domaines dans lesquels la République tchèque entend investir afin de renforcer la compétitivité de ses entreprises et plus généralement améliorer la qualité de vie de ses habitants. Le programme opérationnel plurirégional, ainsi que les programmes des transports et du soutien aux entreprises et à l’innovation pour le développement de la compétitivité sont ceux qui devraient se partager la plus grande part du gâteau, avec notamment 22,5% des 22 milliards d’euros pour les régions d’ici à 2020.
Pour la période 2007-2013, la République tchèque aurait pu percevoir environ 26 milliards d’euros de subventions européennes. Toutefois, l’Union européenne ne finance les différents projets qu’à hauteur de 85% de leur montant total, le reste devant provenir des caisses de l’Etat.
Reste que la République tchèque est le plus mauvais élève européen en la matière. Ainsi, 370 millions d’euros n’ont pas été utilisés en 2013 et le chiffre pourrait grimper jusqu’à 890 millions pour cette année. Un problème dont le nouveau ministère du Développement régional, coordinateur de l’ensemble des programmes de subventions, affirme être conscient. On verra donc d’ici à la fin de cette année si les mesures entreprises pour améliorer la situation portent leurs fruits.