La Semaine de l'éco
Retour sur l'actualité économique de la semaine écoulée.
Fraude à la TVA : un fléau tchèque contre lequel le gouvernement veut agir
La fraude à la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) est un mal très répandu en République tchèque puisqu’elle coûterait à l’Etat près de 114 milliards de couronnes (4,16 milliards d’euros environ) chaque année. Un article de l’hebdomadaire Respekt analyse le phénomène à la lumière des déclarations du gouvernement de Bohuslav Sobotka et en particulier du ministre des Finances Andrej Babiš, qui entendent lutter contre ces abus et récupérer l’argent qui échappe au fisc tchèque. L’enjeu est important puisque c’est précisér/penize/ekonomika2ment cet argent qui doit permettre le financement des mesures prévues dans l’accord de coalition dudit cabinet, telles que la hausse de certains minimas sociaux et l’investissement dans la santé et l’éducation.Une étude menée en 2013 par la Commission européenne plaçait ainsi la République tchèque dans le peloton des pays les plus victimes de la fraude à la TVA. En calculant la différence entre les recettes annuelles attendues de cette taxe à la consommation et les recettes réellement perçues, la République tchèque accusait une différence de 28%, correspondant aux 114 milliards de couronnes déjà citées, lesquelles représentent une somme équivalente à 2,7% du PIB tchèque selon Andrej Babiš. En Europe, cette différence s’établit en moyenne à 18% et le constat est d’autant plus sévère pour l’Etat tchèque que ce phénomène de fraude fiscale a considérablement augmenté depuis 2004 et l’adhésion du pays à l’Union européenne. A l’époque le manque à gagner était de 12%, ce qui correspondait à 1% du PIB du pays.
Les mécanismes de fraude à la TVA sont parfois complexes et profitent de la législation européenne puisque les frontières fiscales ont disparu en 1993 avec le traité de Maastricht et les livraisons entre deux pays de l’UE sont désormais exonérées de cette taxe. Pour lutter contre les systèmes de fraude à la TVA, le magazine Respekt suggère de s’inspirer de l’expérience slovaque. Bratislava, longtemps très touché par ces abus, et notamment depuis l’adhésion du pays à l’UE, a en effet décidé il y a deux ans de mettre en place une nouvelle unité de police chargée de lutter contre la criminalité financière. Cette unité comprend, outre des policiers, des douaniers et des spécialistes des questions financières. La Slovaquie a également organisé une loterie originale puisque basée sur les tickets de caisse. Chaque citoyen a été invité à renvoyer au ministère des Finances ses tickets de caisse pour espérer remporter l’un des lots mis en jeu, une somme de 10 000 euros ou encore une voiture. L’opération a été un succès puisque le ministère a reçu trente millions de tickets de caisse ce qui a incité les commerçants à respecter la législation sur la TVA.
Mais la lutte contre cette criminalité reste difficile car les entreprises fraudeuses sont bien organisées et peuvent anticiper les changements de législation. En République tchèque, Respekt note que chaque nouveau gouvernement promet de redoubler d’effort pour récupérer l’argent évaporé mais ces déclarations d’intentions sont rarement suivies d’effet. Le gouvernement de Bohuslav Sobotka envisage lui la création d’une unité de police financière sur le modèle slovaque, une unité qui pourrait être forte de soixante personnes. Il souhaite également renforcer en général les pouvoirs de la police dans ce domaine et faciliter les échanges avec les institutions en charge du recouvrement de l’impôt.
L’implantation de Hyundai en République tchèque entourée de controverses
Le plus grand investissement direct étranger de création (IDE en abrégé), c’est-à-dire d’une entreprise étrangère qui fait construire ses infrastructures, en République tchèque reste entouré de controverses. Depuis dix ans qu’elle est implantée en République tchèque, la firme coréenne de construction automobile Hyundai a déjà fait face à deux procès en justice et s’est également vu infliger plusieurs amendes. Au cœur de ces différends se trouve notamment le non-respect du droit de construction et de certains engagements en termes de la protection de l’environnement.
Avant d’évoquer l’affaire qui se trouve actuellement devant le tribunal de district de Frýdek-Místek, retournons à la genèse de ce projet. La construction de l’usine à Nošovice (à l’extrême est du pays), qui s’étend sur 260 hectares, a débuté en mars 2007. Pendant ce processus, trois amendes ont été infligées à « Hyundai Motor Manufacturing Czech » (HMMC, Hyundai en abrégé) à cause de violations du droit de construction. En effet, certains bâtiments ont été érigés sans avoir obtenu de permis de construire.
Du fait de son implantation à peine un kilomètre de la zone naturelle protégée de Beskydy, le projet de construction de l’usine automobile soulevait des controverses dès sa conception. Outre ces considérations environnementales, l’acquisition des terrains était également problématique du fait que l’Etat tchèque n’était pas propriétaire des terrains proposés à l’investisseur coréen. La vente des terrains agricoles ainsi que de vingt-deux maisons s’est fait en dépit du refus initial de certains propriétaires qui ont même reçu des menaces de mort anonymes.
Malgré ces péripéties, la construction de ce complexe a été terminée en un temps record et la première usine de Hyundai en Europe a pu lancer sa chaîne de production le 10 novembre 2008. En passant à un système d’organisation du travail en trois-huit (un système de rotation des équipes de travail tous les huit heures et qui aurait un impact négatif sur la santé), l’usine a atteint en 2011 le maximum de sa capacité de production en fabriquant 303 000 voitures annuellement, soit 1 300 voitures par jour, ce qui revient presque à fabriquer une voiture chaque minute. Selon le bilan annuel de Hyundai, l’entreprise employait 3 400 personnes en 2013. La même année, en octobre, peu avant le cinquième anniversaire de l’usine, président Miloš Zeman a d’ailleurs visité cette usine.
Jusqu’à aujourd’hui, deux plaintes judiciaires ont été déposées contre Hyundai à Nošovice. La première concernait l’usage de séparateurs d’huile dont la qualité était inférieure à celle prévue dans la Déclaration d’entente, un document signé avant la construction de l’établissement par plusieurs organisations non gouvernementales, des associations locales, l’entreprise coréenne ainsi que les représentants de la région et de la municipalité. En constatant le manquement à cette déclaration en termes de protection de l’environnement, l’organisation Frank Bold, qui fournit un service judiciaire en matière environnementale a porté plainte auprès d’un tribunal municipal. Cette plainte a terminé à la Cour constitutionnelle qui l’a rejetée. Les juges se sont ralliés à l’argumentation des avocats de Hyundai qui estiment que la Déclaration d’entente n’a pas de caractère juridiquement contraignant.
Un autre procès relatif à la diminution de l’impact environnemental de l’usine est en cours. La cour suprême administrative a décidé que la juridiction locale de Frýdek-Místek est compétente pour trancher la plainte car l’entreprise Hyundai a pris des engagements clairs d’aménagement du paysage qu’elle n’aurait pas respectés. La session au tribunal régional est prévue pour le 1er avril. Les incidents qui entourent la construction de l’usine ont également fait l’objet d’un film documentaire du metteur en scène tchèque Vít Klusák. Le documentaire réalisé en 2010 s’intitule « Tout pour le bien du monde et de Nošovice ».
Škoda Auto prolonge son partenariat avec le Tour de France jusqu’en 2018
Le constructeur automobile tchèque Škoda Auto, filiale du groupe allemand Volkswagen, va prolonger son contrat de parrainage du Tour de France cycliste de cinq ans, jusqu’en 2018, a annoncé la société mardi. Trois cent véhicules seront mis à disposition des organisateurs.
« Le contrat de partenariat avec l’organisateur du Tour de France, Amaury Sport Organisation (ASO), sera prolongé pour une période de cinq ans, entre 2014 et 2018 », a confirmé le porte-parole de Škoda Auto, Tomáš Kubík. Celui-ci a précisé que la signature du contrat, dont le montant n’a pas été indiqué, aura lieu le 5 mars, en marge du salon automobile de Genève. Avec le hockey sur glace (Škoda est depuis de nombreuses années le partenaire du championnat du monde et en 2013, la société est devenue partenaire officiel de la fédération française) et les sports mécaniques, le cyclisme représente le pilier de la stratégie de sponsoring de Škoda Auto.
Tomáš Kubík a rappelé que le Tour de France est la troisième compétition la plus suivie au monde après les Jeux olympiques et la Coupe du Monde de football. La course est régulièrement suivie par environ 12 millions de spectateurs sur les bords des routes et quelque 1,7 milliard de téléspectateurs.
Sur la base du contrat signé en 2004 initialement pour quatre ans, le constructeur tchèque fournit notamment les véhicules officiels de la Grande Boucle, dont une Skoda Superb rouge spécialement équipée pour le directeur de la course, Christian Prudhomme. La marque parraine également le maillot blanc du meilleur jeune (-25 ans) de la Grande Boucle.
La 101e édition du Tour 2014 partira le 5 juillet de Leeds (Grande-Bretagne).
Exportations tchèques aux Émirats arabes unis
C’est la construction mécanique tchèque qui a eu le plus de succès sur le marché des Émirats arabes unis l’année dernière. En raison de l’importance des volumes de contrats financiers, il s’avère plus simple pour les fabricants tchèques d’avoir recours à la sous-traitance. La verrerie et les bijoux font également partie des produits recherchés sur le marché des Emirats arabes unis.
D’autres branches qui font le succès des entreprises tchèques sont les domaines de l’électronique et de l’électromécanique. La demande augmente également pour la fonderie et les produits métallurgiques, ainsi que pour l’optique.
En 2013, ce sont des dispositifs de traitement automatique des données qui ont dominé les exportations vers le pays. La verrerie a représenté près de 20% du total des exportations, le secteur étant dominé par la société verrière Preciosa, dont l’activité commerciale est centrée sur la zone franche de Jebel Ali à Dubaï. L’entreprise fournit sur le marché local principalement des lustres en cristal, et elle a également obtenu un contrat de fourniture de deux hôtels prestigieux Emirates Palace et Yas Marina.
La plus grande partie de la production de l’entreprise Preciosa se compose de réexportation d’ornements en verre pour l’industrie textile en Inde et au Pakistan. La société tchèque qui la concurrence dans le domaine est l’entreprise Lasvit FZE, qui a considérablement renforcé sa position sur le marché des Émirats arabes unis depuis ces dernières années.
La part croissante des exportations concerne également des produits techniquement complexes, tels que des systèmes complexes de traitement de données numériques, des panneaux de contrôle, des tableaux de commande pour l’électricité ainsi que des pompes. Dans le secteur alimentaire, c’est le fromage Czechoslovak cheese - Akawi, qui est le plus connu. Parmi les autres exportateurs tchèques les plus importants figurent la société ABB, Lacnea et Interlacto. Les Emirats arabes unis représentent traditionnellement, après les Etats-Unis et la Chine, le troisième plus grand marché d’exportation pour la République tchèque parmi les marchés hors l’Union européenne.
C’est un marché toujours très prometteur pour la République tchèque dans la mesure où les Emirats arabes unis ont longtemps maintenu une cote de crédit Aa2 en affichant une perspective stable. L’agence de notation Moody constate la reprise du marché de l’immobilier ainsi qu’un secteur privé plus diversifié.
Des pertes record en 2013 pour le groupe de médias du ministre des Finances
Le groupe de médias Mafra, qui édite plusieurs quotidiens parmi les plus lus du pays, les journaux d’orientation libérale Mladá fronta Dnes et Lidové noviny, dont les rédactions partagent le même bâtiment à Prague, ou encore le gratuit Metro, et qui détient également le site Internet iDnes.cz, a enregistré selon le magazine Forbes des pertes record en 2013. Elles se sont élevées entre 700 et 750 millions de couronnes (soit entre 25 et 27 millions d’euros environ). Le site Mediář.cz, qui s’intéresse aux médias, cite lui le chiffre de 100 à 150 millions de couronnes de pertes (de 3,7 à 5,5 millions d’euros) issu de l’indicateur EBITDA, qui correspond à l’excédent brut d’exploitation (c’est-à-dire au résultat d’exploitation avant amortissement) et qui refléterait mieux la situation de l’entreprise.
Mafra a ainsi vécu une année 2013 particulièrement agité puisqu’il a été en juin racheté par Andrej Babiš, le propriétaire milliardaire du groupe agroalimentaire Agrofert. A la tête d’un mouvement politique récemment créé, l’Action des citoyens mécontents (ANO), l’homme d’affaires d’origine slovaque a réalisé un résultat spectaculaire aux élections législatives en octobre, après avoir investi près de quatre millions de couronnes (150 000 euros) en publicité dans les médias qui lui appartiennent. Le parti a pris part à la composition d’une coalition gouvernementale aux côtés des sociaux-démocrates et des chrétiens-démocrates et Andrej Babiš est devenu le vice-premier ministre de ce cabinet en même temps que le ministre des Finances.
Ces offensives dans les mondes des médias et de la politique ne devaient selon ses mots pas entraîner de bouleversements dans les rédactions dont il est désormais le propriétaire. Pourtant à l’automne, les rédacteurs en chef des quotidiens Mladá fronta Dnes et Lidové noviny ont tous les deux mis les voiles. L’un d’entre eux, Robert Čásenský, a justifié explicitement son choix par l’identité du nouveau propriétaire du journal, et les conflits d’intérêts évidents qui naîtront inévitablement de cette situation d’imbrication des champs politique, économique et médiatique. Considéré par le magazine Forbes comme l’homme disposant du plus grand pouvoir d’influence en République tchèque en 2014, Andrej Babiš envisageait à l’époque même de ces départs l’entrée en bourse du groupe Mafra et investissait dans le monde radiophonique en achetant la radio privée la plus écoutée du pays, Radio Impuls.
Bénéficiaire à hauteur de 88,6 millions de couronnes (3,24 millions d’euros selon le cours actuel de la couronne) en 2011, Mafra a vu ses comptes entrer dans le rouge l’année suivante avec 168 millions de couronnes de pertes (6,15 millions d’euros).