La Tchéquie à la veille d’un marathon électoral

Photo : Filip Jandourek, ČRo

Voici quelques-uns des sujets traités dans la presse cette semaine : la situation en Tchéquie à la veille d’un marathon électoral, les hauts et les bas du système d’enseignement secondaire, la discorde à propos du fonds pour l’intégration des réfugiés, la ville de Brno, une destination touristique plébiscitée dans des enquêtes internationales ou encore mes manifestations d’extrémistes au cours de l’année 2015 dans les rues de Prague. Ce sont les thèmes abordés dans cette revue de presse hebdomadaire.

Photo : Filip Jandourek,  ČRo
La République tchèque a devant elle le plus long marathon électoral de son histoire, une période qui va s’étendre sur les dix prochaines années, sauf dans le cas d’élections législatives ou présidentielles anticipées. La première année « non électorale » n’est à prévoir qu’en l’an 2027. Ce constat offre à Jindřich Šídlo du quotidien économique Hospodářské noviny l’opportunité de brosser une analyse de la situation actuelle du pays. Rappelant d’abord la tenue en octobre prochain des élections régionales et celle, en 2017 et 2018, des élections législatives et présidentielles, il remarque :

Jindřich Šídlo,  photo : Filip Jandourek,  ČRo
« La Tchéquie entre dans les années « superélectorales », dans une situation qu’elle n’a pas encore connue. La croissance économique, un gouvernement stable qui, à la différence de ses prédécesseurs, n’a pas été à ce jour confronté à une importante crise de coalition, une droite décimée et un président de la République qui se consacre avant tout à une campagne permanente pour sa réélection. Tels sont les traits caractéristiques de la question. »

Jindřich Šídlo considère que l’on peut s’attendre à ce que les élections régionales de l’automne prochain qui, traditionnellement, servent de test de popularité au gouvernement à la moitié de son mandat électoral, apportent cette fois-ci un résultat peu habituel. Une victoire de l’opposition n’étant pas à prévoir, le principal duel se déroulera probablement entre les deux principales formations de la coalition gouvernementale, le parti social-démocrate (CSSD) et le mouvement ANO. Dans ce contexte, l’auteur poursuit :

Miloš Zeman et Andrej Babiš,  photo : Filip Jandourek,  ČRo
« Les prochaines élections régionales vont mettre fin à l’armistice entre ces deux partis dominants, dont la cohabitation au sein d’un gouvernement n’a pas de précédent dans la politique tchèque. De ce fait on peut supposer que l’année prochaine sera marquée par une campagne permanente avant les élections législatives et présidentielles. »

L’enjeu principal pour les leaders de ces deux formations, respectivement Bohuslav Sobotka et Andrej Babiš, consistera à choisir, chacun de son côté, un candidat présidentiel capable de défier l’actuel président Miloš Zeman, qui devrait être candidat à sa propre succession. S’ils ne veulent pas en choisir un, écrit Jindřich Šídlo, ce sera aux autres partis ou aux « sans-parti » de chercher un candidat et de le présenter au plus tard d’ici la fin de l’année.

Les écoles secondaires – du temps perdu ?

Photo : Commission européenne
Pour quelle raison fréquenter l’école? Telle est l’interrogation soulevée dans un texte publié dans la dernière édition de l’hebdomadaire Respekt. Son auteur, Marek Švehla, se penche sur la situation qui existe dans le domaine de l’enseignement secondaire. Constatant que l’Etat a tendance à intervenir de plus en plus fortement dans le contenu de la formation, ce dont témoignerait le Programme cadre de l’enseignement, un document comptant une centaine de pages, il écrit :

« Les écoles secondaires se comportent toujours comme jadis comme si elles constituaient la principale source de connaissances. Mais tel n’est plus le cas. Internet, les voyages, des films de qualité, des expositions, des ouvrages de vulgarisation, des débats en famille – sont autant d’éléments qui sont à même de fournir aux étudiants du cycle secondaire des informations sur le monde mieux que ne le ferait un pédagogue qui doit adapter le rythme de l’enseignement à l’ensemble de la classe. Ainsi, l’école risque de devenir le synonyme de l’ennui et du temps perdu. »

Photo : Filip Jandourek,  ČRo
En Tchéquie, on trouve plus de 300 lycées entre lesquels il existe de grandes différences dues à la libéralisation du système d’enseignement établie au début des années 1990. Selon les experts cités dans le magazine, ceux-ci devraient constituer un espace permettant aux étudiants d’acquérir les aptitudes qui correspondent aux temps modernes. Il s’agit, par exemple, de comprendre les phénomènes liés aux médias, comme la propagande, la désinformation ou la publicité mensongère ou encore d’acquérir des connaissances d’ordre financier ou juridique. Savoir formuler ses idées, argumenter, manifester de l’empathie, autant de capacités que l’enseignement tchèque n’arrive pas à développer suffisamment chez les jeunes. Ceci dit, même dans le système conservateur de l’enseignement tchèque, tout cela dépend beaucoup de la créativité, de l’audace et de la fantaisie des enseignants. En conclusion, Marek Švehla écrit :

Marek Švehla,  photo: Archives de Marek Švehla
« Dans la vie pratique, une transformation radicale de l’enseignement est très difficile, car les écoles doivent affronter non seulement la pression des politiques mais aussi, paradoxalement, celle des parents qui veulent que l’école apprenne à leur progéniture notamment des faits et des connaissances. »

Discorde autour du fonds pour l’intégration des réfugiés

Dans un entretien accordé pour un des derniers numéros du quotidien Lidové noviny, l’économiste Vladimír Dlouhý a commenté les réactions provoquées par la création d’un fonds pour l’intégration des réfugiés, initiée par la Chambre de commerce, dont il est le président, et l’Association pour l’intégration et la migration. Il dit entre autres :

Photo : ČTK
« Ce sont des réactions très négatives qui découlent d’un malentendu. Mais il est vrai que je veux me distinguer de ceux qui refusent catégoriquement toute discussion sur l’aide aux réfugiés. Je suis convaincu que cette question nous touche qu’on le veuille ou non, car tôt ou tard, il y aura des migrants dans le pays, contrairement à maintenant. Il faut s’y préparer, ce qui ne veut pas dire que je voudrais les inviter comme le prétendent ceux qui me dénoncent lourdement. Etre préparé signifie accorder des formations et de des cours de requalification. En même temps, il s’agit de répondre aux besoins d’entrepreneurs en manque de la main d’œuvre. Selon un sondage, il y en a environ 40% prêts à employer des immigrés. »

Vladimír Dlouhý,  photo : Filip Jandourek,  ČRo
Vladimír Dlouhý a exprimé enfin son inquiétude face à la vague de haine à l’encontre des migrants qui s’est levée dans le pays soulignant la nécessité de s’opposer aux forces fascisantes que l’on a pu voir sur le devant de la scène lors des célébrations de la fête nationale du 17 novembre.

Brno, une ville à visiter

Le supplément Relax du quotidien Lidové noviny rapporte l’information selon laquelle Brno, la deuxième plus grande ville de la République tchèque et capitale de la Moravie du Sud, a été classée par le quotidien américain The New York Times parmi les 52 destinations du monde qui méritent d’être visitées au cours de l’an 2016. Brno doit sa 27e position dans ce palmarès non seulement à son architecture minimaliste reconnue, avec sa remarquable villa Tugendhat, mais aussi à son intérêt d’ordre gastronomique. Le journal remarque aussi :

Brno | Photo: Benoît Rouzaud,  Radio Prague Int.
« C’est le deuxième succès remporté au cours de la première semaine de cette nouvelle année par Brno. La ville s’est en effet bien classée également dans une enquête lancée deux fois par an par le site Numbeo.com en occupant la 46e position parmi les villes dotées de la meilleure qualité de vie. Brno a ainsi devancé non seulement Prague, mais aussi des métropoles mondiales comme Tokyo, Londres ou Los Angeles. »

En 2015, les extrémistes ont été souvent présents dans les rues de Prague

Photo: Venca24,  Wikimedia Commons,  CC BY 4.0 DEED
Comme jamais auparavant, Prague n’a vu autant d’extrémistes si souvent réunis qu’au cours de l’année 2015. Les rues de la capitale ont vu défiler, outre les manifestants habituels, des néonazis, des antisémites, des islamophobes. C’est ce que remarque un article paru dans une récente édition du quotidien Mladá fronta Dnes et dans laquelle Kateřina Frouzová apporte quelques précisions :

« Les grandes manifestations qui se sont déroulées en 2015 à différents endroits de Prague, que cela soit dans la rue Albertov, sur la place Venceslas ou devant l’Office du gouvernement, ont été plus fréquentes qu’au cours des années précédentes. Comme le révèle le dernier Rapport sur l’extrémisme en Tchéquie, elles ont été aussi plus souvent que jamais accompagnées d’émeutes et d’actes criminels, à mettre sur le compte de l’extrême gauche ou de l’extrême droite. Pourtant, aucune poursuite policière n’a été dans ce contexte entamée, la police se limitant jusque-là à suivre ces activités et leurs protagonistes. Le rapport constate également que l’islamophobie a permis une certaine fusion des différentes formations d’extrême droite, auparavant en concurrence. »

Comme le remarque l’auteur de l’article, cette tendance va probablement se poursuivre cette année. Ainsi, trois manifestations sont déjà prévues pour le 6 février, dont deux avec des accents islamophobes et antisémites, la troisième étant organisée pour exprimer un soutien aux migrants.