L'appel du reporter Jaromir Stetina pour la libération d'une jeune slovaque enlevée dans le Caucase
Les enlèvements de journalistes ou de travailleurs humanitaires sont devenus d'une dramatique banalité à travers le monde. Pourtant, certains sont plus médiatisés que d'autres : dans le cas de Miriam Jevikova, jeune Slovaque enlevée dans le Caucase, le reporter tchèque Jaromir Stetina a décidé de réveiller des hommes politiques muets et une société impassible.
Une jeune femme oubliée au beau milieu d'un conflit oublié, une guerre dont on prononce trop rarement le nom : Miriam Jevikova, une étudiante slovaque de 28 ans, résidente en République tchèque et membre d'une organisation humanitaire tchèque, a disparu début juin, en Ingouchie, dans le Nord du Caucase. La jeune étudiante, qui parle le russe couramment, se trouvait dans la région dans le cadre d'un séjour d'échange entre travailleurs humanitaires de l'Organisation pour l'aide aux réfugiés. Tout particulièrement sensible aux conflits persistants dans la poudrière caucasienne, elle voulait rendre visite à des amis en Ingouchie. Partie de Vladikavkaz, elle devait rejoindre un ami qui l'attendait dans la ville de Nazran, mais jamais elle n'est arrivée au rendez-vous. Les dernières nouvelles de Miriam ? Un sms avec le message suivant : « Ça fait deux heures qu'on me traîne à travers champs ». Et un appel anonyme en juillet réclamant un million de dollars, réitéré à deux reprises dans le mois. Depuis, silence radio.
Devant l'immobilisme et l'inaction des autorités slovaques et tchèques, qui justifient leur silence par leur action secrète et une nécessité de protéger Miriam en ne laissant rien filter, Jaromir Stetina, grand correspondant de guerre, écrivain, et dont l'étudiante suivait les cours à l'Université Charles, a décidé, il y a un mois, de lancer une pétition adressée en premier lieu au président tchèque. A ce jour, le nombre de signataires avoisine les 6000 noms, autant de personnes qui demandent à Vaclav Klaus d'user de son poids politique pour faire pression sur l'administration russe.
Fin octobre, le ministre des Affaires Etrangères slovaque, Eduard Kukan, s'était rendu à Moscou et avait expliqué à son retour que les services russes s'occupaient de l'enlèvement et qu'ils en connaissaient les auteurs, avant de finir par accuser les journalistes et la presse de ralentir l'ensemble du processus. Il est bien l'une des rares personnes à s'exprimer de manière aussi optimiste : le journal slovaque Pravda a rapporté les doutes de Tatiana Lokchinova, de l'organisation Helsinki pour les droits de l'homme, à Moscou, qui tendrait à craindre que Miriam ne soit déjà plus en vie.
Il y a quelques semaines, Jaromir Stetina a accordé une interview à l'hebdomadaire Reflex : outre la manière dont certains médias ont traité le conflit, Stetina s'insurge contre l'amnésie et la surdité des hommes politiques dans le cas d'enlèvements tels que celui de Miriam : « C'est complètement immoral que nos médias et nos politiques ne s'en soucient pas. Regardez ce qu'a fait le président français lors de l'enlèvement des deux journalistes. Il a dit : ces journalistes, c'est la France. Est-ce que vous avez entendu quelque chose de semblable chez nous? C'est une honte ! On a l'impression que notre président ne sait même pas qu'il est arrivé quelque chose à cette pauvre enfant. »Certes, à ce jour, il n'y a guère plus de nouvelles des journalistes français que de Miriam ; cependant, quatre mois après la disparition de cette dernière, peut-on dire que le président tchèque, qui dit avoir de « très bonnes relations » avec le président Poutine, ou les autorités slovaques aient réellement fait montre d'empressement dès le début pour secourir la jeune femme ? En tout état de cause, c'est en attendant sur une action citoyenne qu'il faudra placer ses espoirs.
Plus d'information sur : www.miriam.jevikova.net