Le dessinateur David B. : « Les révoltes hussites sont un peu comme des crises d'épilepsie du monde »

David B.

Les temps changent pour la bande dessinée en République tchèque : depuis quelques années, des auteurs de BD tchèques commencent à se faire un nom, et des auteurs issus de grands pays de la BD comme la France sont publiés en Tchèquie, notamment par la maison d'édition franco-tchèque, Mot. C'est elle qui fait paraître ces jours-ci le dernier tome de L'ascension du Haut Mal, une histoire autobiographique du dessinateur David B. Il est à Prague dans le cadre du Komiksfest qui se tient jusqu'au 3 novembre :

« J'ai toujours dessiné. J'ai toujours été un grand dessinateur, enfin, je m'entends, ça veut dire que je dessinais beaucoup. Un grand raconteur d'histoires. Quand j'étais petit, j'inventais toujours des trucs extraordinaires. Et, adorant dessiner et adorant les histoires, la bande dessinée était vraiment le mode d'expression pour moi. »

A la maison d'édition Mot est sortie votre BD L'ascension du Haut Mal. Pour ceux qui ne savent pas ce que c'est, pouvez-vous expliquer ce qu'est le « haut mal » ?

« En Français, le haut mal, c'est l'ancien nom médiéval de l'épilepsie. On l'appelait comme ça parce que c'était considéré comme une maladie sacrée, ça venait du ciel, ça venait de dieu. Mon frère a été touché à l'âge de 7 ans, très gravement. Et ça a complètement bouleversé la vie de notre famille, c'est ce que je raconte dans L'ascension du Haut Mal. »

Ce n'est pas la première fois que vous venez en République tchèque. Et vous avez fait une BD, dont vous allez nous rappeler le titre, qui parle des Hussites. Vous avez donc un rapport particulier avec la République tchèque...

« Tout à fait. J'ai toujours aimé Prague et la Tchéquie de loin. Etant passionné d'histoire, de littérature, et de littérature fantastique, j'avais découvert un livre d'un auteur américain qui s'appelle Les fanatiques de l'Apocalypse, où il racontait l'histoire des hérésies. Et notamment, il y avait celle qui m'avait frappée : l'histoire des Hussites, des Taborites, des Adamites, de Jan Zizka etc. Et c'est vrai que c'est quelque chose sur laquelle je me suis toujours renseigné, j'ai lu tous les livres que je pouvais trouver là-dessus en français. J'ai donc fait une histoire qui s'appelle Le jardin armé, et sa suite, Le tambour amoureux, qui vont sans doute paraître chez Mot. C'est une sorte de fantaisie autour des Taborites. Je m'intéresse à ces périodes-là car ce sont des sortes de convulsion du monde. Dans ces moments de révoltes hérétiques, ce qui m'intéresse, c'est cette remise en cause de l'ordre du monde par des gens qui cherchent autre chose, un ordre différent. J'aime bien ce côté utopique. Le côté souvent très humain car souvent ces utopies s'effondrent, ne donnent pas de résultat. Il y a évidemment un rapport avec mon travail autobiographique, avec la maladie de mon frère. Pour moi, c'est un peu comme des crises d'épilepsie du monde. »