Le nouveau maire de Prague est morave

Tomáš Hudeček, photo: CTK

La capitale tchèque est restée sans maire pendant pratiquement un mois. Comme prévu, c’est Tomáš Hudeček, du parti conservateur TOP 09, qui a été élu, jeudi, après un vote à bulletin secret du conseil municipal. Tomáš Hudeček a recueilli 36 voix des 63 votants, et ce malgré le boycott du vote par une vingtaine de représentants du parti civique démocrate (ODS). Toutefois, Tomáš Hudeček, n’a pas seulement été élu grâce au soutien de ses collègues de TOP 09, mais aussi grâce à celui des sociaux-démocrates.

Tomáš Hudeček,  photo: CTK
C’est la première fois depuis vingt-deux ans que le maire de Prague n’est pas issu de l’ODS. Bien qu’originaire d’Olomouc, métropole historique de la Moravie, Tomáš Hudeček a donc été élu à la tête de la capitale après avoir été précédemment adjoint à l’ancien maire, Bohuslav Svoboda, démis de ses fonctions fin mai. Malgré son jeune âge (34 ans) et son expérience longue de seulement trois ans dans la sphère politique, il s’agit aussi du premier maire de Prague élu tout en traînant une accusation passible d’une peine. Le nom de Tomáš Hudeček apparaît en effet dans l’affaire ayant trait au favoritisme intentionnel de la société Haguess, dans le cadre du système électronique de la carte de transport Opencard. Lors d’un entretien télévisé, Tomáš Hudeček s’est expliqué :

« Ce n’est pas une carte de visite flatteuse pour l’ensemble du conseil municipal qui a été accusé il y huit mois environ. Il s’agit d’une accusation collective portant sur le fait que nous aurions intentionnellement favorisé la société Haguess. Je suis persuadé qu’il s’agit d’une accusation qui n’est pas fondée sur des faits concrets. Néanmoins, s’il s’avèrait de quelle que manière que ce soit que ces accusations étaient justifiées, il s’agirait d’une accusation sans précédent au sein des organes autonomes. Je l’ai dit publiquement ce jeudi, en cas de mise en examen, il sera tout à fait inadmissible et impensable que qui que ce soit continue au sein de la fonction publique. »

Le conseil municipal sera composé uniquement de représentants de TOP 09, tandis que la majorité des comités, y compris le comité de contrôle, seront composés de membres de la social-démocratie (ČSSD), TOP 09 n’étant pas parvenu à conclure d’accord de coalition avec l’ODS. La tâche du nouveau maire élu s’annonce donc difficile, dans la mesure où ce modèle de fonctionnement, dans lequel le parti minoritaire TOP 09 est, de fait, le seul à porter la responsabilité politique, est un modèle inexploré et relativement nouveau. L’ancien maire Bohuslav Svoboda émet des doutes quant à la possibilité pour le nouveau maire d’imposer quoi que ce soit au sein du conseil municipal. Bohuslav Svoboda :

Bohuslav Svoboda,  photo: Kristýna Maková
« Le ČSSD est un acteur politique très expérimenté, qui sait faire valoir ses intérêts. Et même s’il détient moins de voix, il se trouve aujourd’hui dans un rôle fondamental, dans la mesure où sans ses voix, TOP 09 ne pourra pratiquement rien réaliser. »

Cependant, Tomáš Hudeček affirme que, au contraire, il est possible d’avancer avec les sociaux-démocrates, et qu’il ne s’agit nullement d’un accord d’opposition :

« Tous les points du programme que l’on veut encore faire valoir avant la fin de notre mandat sont réunis dans le document intitulé « 500 jours pour Prague ». Ce document contient des points communs pour tous les partis présents au sein du conseil municipal, c'est-à-dire des points concernant l’achèvement de la construction du tunnel Blanka, par exemple. Ensuite, il y a des points soi-disant limitatifs pour les deux partis, c'est-à-dire qu’à la fois le ČSSD et TOP 09 y ont inscrit des points limitant leur action et nécessitant le soutien de l’autre parti. Tous ces points sont inscrits dans un document de quatre pages, et par ce biais, la coopération est clairement établie. C’est pourquoi on ne peut pas parler de coalition, mais plutôt d’une entente pour que la ville de Prague ne soit pas mise de côté pendant toute une année et demie. Et ce malgré le résultat des élections de 2010, et malgré le fait que les partis qui ont acquis chacun un tiers de sièges au conseil municipal, ne peuvent se mettre d’accord que de manière très difficile. »

À la question de savoir si ce nouveau mode de fonctionnement au conseil municipal pourrait avoir des conséquences sur la situation nationale, Tomáš Hudeček répond :

« Je ne peux en aucun cas assurer que la relation au niveau national entre deux hommes ou deux femmes ou entre un homme et une femme, issus du parti social-démocrate, du parti TOP 09 ou du parti civique démocrate, reproduira la relation entre deux autres hommes ou deux autres femmes au niveau régional. Il n’est pas possible de l’affirmer. Tout dépend de chaque individu. »

Pour certains, s’il s’agit d’un homme politique encore inexpérimenté, pour d’autres, Tomáš Hudeček a tout simplement beaucoup travaillé ces trois dernières années, ce qui a faisait de lui un candidat naturel au poste de maire de Prague. La seule chose acquise pour l’instant, c’est sa volonté d’instaurer plus de pragmatisme dans la vie politique, ce qu’il a commencé par un geste symbolique en mettant la chaîne du maire de Prague au musée ; elle aurait été trop pesante.