Les Pragois verront-ils un jour le bout du tunnel Blanka ?
La société de bâtiment et travaux publics Metrostav a annoncé, mercredi, la suspension, dans un peu plus de deux semaines, des travaux de construction du tunnel Blanka, immense chantier entamé à Prague en 2007. La municipalité aurait une dette envers Metrostav d’un montant total de 2,1 milliards de couronnes, soit près de 77 millions d’euros. Toutefois, selon le maire de Prague, Tomáš Hudeček, le contrat entre la ville et Metrostav serait nul depuis le début et le projet donc entièrement illégal. Un imbroglio politique et juridique sans fin.
La dernière des nombreuses enquêtes ouvertes dans ce dossier vise à vérifier les soupçons de violation des règles de concurrence et du droit des marchés publics par le conseil municipal dirigé par l’ancien maire de Prague Pavel Bém, en fonctions de 2002 à 2010. Bien que les travaux aient commencé en 2007, le maire actuel Tomáš Hudeček a annoncé, mercredi, qu’une analyse indépendante réalisée dans le cadre de cette enquête montrait que le projet était illégal. En effet, celui-ci n’aurait jamais été formellement approuvé par le conseil municipal :
« Selon nos analyses, le contrat est nul depuis le début. La municipalité a dépensé jusqu’à présent des dizaines de milliards de couronnes et ne peut pas continuer à financer un projet illégal. Etant donné l’état juridique de cette affaire, il est exclu que la ville puisse assumer la responsabilité du projet et poursuivre les travaux. »Curieusement, Tomáš Hudeček a fait sa déclaration en réaction immédiate à l’annonce des responsables de Metrostav, selon laquelle la municipalité ne lui aurait pas réglé diverses factures pour un montant total de 2,1 milliards de couronnes (près de 77 millions d’euros), et que par conséquent, le constructeur suspendrait les travaux le 7 décembre prochain. Le porte-parole de la société, František Polák, ne cachait pas son désarroi face à la réaction de la municipalité :
« De notre côté, il n’existe pas de solution. Nous sommes une entreprise qui travaille pour faire du profit. Nous devons nous-mêmes rémunérer nos employés, nos fournisseurs. Pour nous payer, la ville doit d’abord approuver les modifications, mais ce n’est pas le cas pour le moment. »
En effet, l’investisseur, à savoir la ville de Prague, tarde à avaliser les dernières modifications du plan de construction et met en avant l’enquête judiciaire en cours pour se justifier. Il s’agit cependant de finitions, comme l’emplacement des panneaux de circulation ou certains détails des trottoirs piétons.Toutefois, si les travaux s’arrêtent, la ville devra verser environ 400 millions de couronnes (14,5 millions d’euros) pour maintenir le chantier en l’état et environ 120 millions de couronnes mensuels (4,4 millions d’euros) pour son entretien.
Le tunnel Blanka compte parmi les chantiers les plus importants et les plus pharamineux dans l’histoire de l’aménagement urbain pragois. Retenu parmi trois offres différentes en 1996, il n’a été ratifié qu’en 2006, après maintes obstructions de la part d’associations civiles et écologiques. De nombreux scandales ont accompagné les travaux de construction, notamment trois effondrements de terrain consécutifs, en 2008 puis en 2010, mais surtout un financement obscur et un renchérissement de 8 milliards de couronnes (300 millions d’euros), dont près de la moitié n’a jamais été justifiée.