Le père Jan Josef Kohl, victime de la répression anticléricale
Déjà 60 ans se sont écoulés depuis la sinistre Opération K organisée en avril 1950 par la StB (police secrète de l’Etat) et les Milices populaire (Lidové Milice) sous la direction des hauts fonctionnaires du PC tchécoslovaque. L’objectif était la liquidation des ordres catholiques masculins. Au cours de l’opération, près de 2 400 moines ont été arrêtés, le patrimoine immobilier et mobilier des institutions catholiques confisqué. L’opération a fait suite à des procès injustes des dignitaires de différents ordres. A l’occasion de cet anniversaire, célébré les 13 et 14 avril derniers, notre émission d’aujourd’hui sera consacrée au père Jan Josef Kohl OSB (Ordo Sancti Benedicti), l’une des victimes de l’Opération K., basé actuellement au couvent de Břevnov de sainte Marguerite.
Après le baccalauréat il passe ses vacances chez ses parents et les aide aux travaux champêtres et de ferme. Le 14 septembre 1949, jour de la Fête de l’Erection de la Sainte Croix, il présente à l’abbé du Couvent de Břevnov, Jan Anastáz Opasek, sa demande d’admission à l’Ordre des bénédictins. Il choisit l’ordre de St. Benoit pour la simple raison que la cure de son village natal était gérée par les Bénédictins. Les dignitaires ecclésiastiques craignent les répressions dont pourraient être victimes les monastères et par précaution ils logent le jeune Jan Josef dans une maison de jardinier pour qu’il puisse si besoin échapper aux arrestations. Le 19 septembre 1949, Jan Josef est témoin de l’arrestation de l’abbé J.A. Opasek. Jan Josef Kohl témoigne de l’arrestation de l’abbé. On l’écoute.
« Ils étaient 14 policiers à l’arrêter. Ils l’ont emmené à la prison de Pankrác et il a également subi des interrogatoires à Ruzyně. L’abbé Opasek n’a pas été torturé physiquement mais psychologiquement, ce qui peut parfois être pire. Par exemple on lui lançait la nourriture comme à un chien et il était obligé de manger avec les mains. Comme il le disait lui-même, seules la foi et les prières de sa mère le maintenaient en vie. Le 2 décembre 1950, victime d’un procès inique, il a été condamné à perpétuité. Le procureur lui a dit que s’il n’avait pas été prêtre il aurait été pendu. » Jan Josef Kohl est ensuite transféré à nouveau pour des raisons de sécurité au couvent d’Emauzy à Prague où il se prépare à l’admission à l’Ordre de St. Benoit. En novembre 1949 il devient membre de l’ordre sous le nom de Jean Baptiste. Mais il ne jouira pas très longtemps de cette faveur. Dans le cadre de l’Opération K il est arrêté fin avril 1950 et transféré au couvent de Hejnice où se trouvent des moines d’autres ordres mais surtout des Bénédictins. Il travaille comme aide-ouvrier couvreur. Certains moines fabriquaient des bijoux fantaisie, d’autres des jouets en bois ou plaçaient des opercules de liège dans les capuchons pour fermer les bouteilles de bière. Les conditions de vie sont relativement supportables, et surtout les moines ne sont pas torturés. Fin août 1950 on propose aux moines de suivre des études au séminaire général géré par les communistes. La majorité refuse et début septembre le père Jan est transféré aux Brigades techniques du travail (PTP). Il travaille très dur sur des chantiers, par exemple à la construction d’un aéroport militaire, puis dans des mines de charbon. Il est libéré après trois ans et demi de travaux obligatoires, le 31 décembre 1953. Il essaie ensuite de trouver du travail mais du fait de sa formation de prêtre, il se heurte systématiquement à des refus. Il trouve finalement du travail au sein de l’armée en tant qu’ouvrier à la construction des routes. Et c’est encore grâce à l’armée qu’il obtient un poste de comptable dans une maison de repos à Špindlerův Mlýn dans les Monts des Géants. Il est à noter que l’armée avait par rapport au régime totalitaire une position spécifique et une attittude modérée. Mais les vérificateurs des capacités politiques et professionnelles le retrouvent même en montagne et le père Jan est renvoyé. Il retourne dans son village natal où il trouve du travail comme usineur de métaux tout en exerçant la profession de sacristain et maître de chapelle au sein de l’église locale. Le père Jan Josef Kohl a joué un grand rôle dans l’organisation de la réparation des toits des églises et des chapelles de la région. Il étudie aussi le chant chez Jarmila Hasan ab del Vahab, ce qui lui permet de nouer des liens avec d’autres chanteurs et solistes. Il profite de cette occasion pour les inviter dans son village natal Police nad Metují et pour les faire chanter à la tribune d’orgue. Et c’est avec ses propres moyens qu’il achète un harmonium dont il fait don à l’église. Ses activités sont multiples. Il participe entre autres aux recherches archéologiques du presbytère de l’église conventuelle à Police nad Metují et s’occupe de la décoration des autels à l’occasion des fêtes de l’Eglise. Début octobre 1968 le père Jan Josef Kohl entreprend des études à la faculté de théologie de l’Université Charles à Litoměřice. Le 23 juin 1973 il est consacré prêtre par l’archevêque et cardinal František Tomášek. Il est alors âgé de 45 ans. Mais il n’a pas l’autorisation des autorités communistes, nécessaire pour exercer sa noble mission. Il débute donc sa mission de prêtre à Hradec Králové comme sacristain et au bout de deux ans il est autorisé à exercer la mission de chapelain. Lorsqu’ en 1990 une partie des bâtiments du couvent de Břevnov est restituée, l’abbé Anastáz Opasek OBS le fait revenir au couvent où il réside encore aujourd’hui.L’événement qui a le plus marqué le père Jan Josef Kohl au cours de ces dernières décennies a été sa rencontre avec sa Sainteté le pape Jean Paul II le 26 avril 1997, à l’occasion du millénaire de saint Adalbert.