Le Prix Franz Kafka 2006 pour Haruki Murakami, une idole mondiale des lettres nippones

Haruki Murakami, photo: CTK

Ecrire, pour lui, signifie se souvenir des événements qui n'ont jamais eu lieu. Maître du mystère du quotidien, l'écrivain japonais le plus sollicité dans le monde, Haruki Murakami s'est vu décerner le 30 octobre à Prague le Prix Franz Kafka - l'unique récompense littéraire internationale attribuée en République tchèque. Haruki Murakami, son sixième lauréat, fut précédé par Peter Nadas, Elfriede Jelinek ou Harold Pinter.

Haruki Murakami,  photo: CTK
« Je vous le dis sincèrement, cette conférence de presse est la première de ma vie. Je suis écrivain, ma mission n'est pas de me présenter publiquement. Quand je choisis des disques de jazz dans les magasins à Tokyo, je n'ai pas envie que les gens me demandent : Eh, n'êtes-vous pas monsieur Murakami ? » a confié le candidat au prix Nobel de littérature à l'important auditoire tchèque et étranger, quelques heures avant la cérémonie de remise du Prix Franz Kafka à l'Hôtel de Ville de la Vieille-Ville de Prague. Pourtant, interrogé sur son oeuvre, Haruki Murakami n'éprouve aucune gêne à s'expliquer sur celle-ci.

En 2001, son futur éditeur tchèque le découvre grâce à une critique élogieuse dans le journal The Guardian. Depuis, trois romans de Murakami ont paru dans le pays, aux éditions Odeon : « La Ballade de l'impossible », « Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil » et son dernier livre « Kafka sur le rivage ». Classé écrivain japonais le plus abordable pour les occidentaux (et à la fois populaire et controversé dans son pays), Murakami est un conteur exceptionnel. Avec lui, on découvre le Japon, si lointain, au jour le jour. Une seule phrase lui suffit pour dépeindre l'atmosphère, le paysage, le temps, une musique, le bonheur. Pour dépeindre également les personnages, aussi vivants qu'on a l'impression de parler, manger, sentir, aimer à leur place.

L'empire du Soleil Levant à la manière de Haruki Murakami, celui des années 60 ou d'aujourd'hui, n'est pas une terre promise.

Prix Franz Kafka
Toru Watanabe, Izumi, Shimamoto ou l'adolescent Kafka Tamura refusent, tout comme leur auteur, de suivre la voie obligatoire imposée par la société. Exilés au milieu des leurs (Murakami lui-même a ouvert une boîte de jazz après avoir terminé les études universitaires, puis a vécu aux Etats-Unis), ils trouvent quand même une âme soeur avec qui ils vivent un amour passionnant et dont l'existence est souvent porteuse d'un mystère. Le mystère, non pas celui de la science-fiction, mais celui qui est à la limite du réel est propre à la création de Haruki Murakami. Ainsi que le charme et la pesanteur de la vie et de la mort, naturelle ou volontaire. Il explique :

« Je suis né à Kobe, dans une famille typique de la classe moyenne japonaise. Dans ma jeunesse, je n'ai vécu rien de tragique ou dramatique... Alors je ne pouvais écrire de rien. Je me suis mis à réfléchir sur ça et j'ai décidé de creuser un trou, d'aller jusqu'au fond. Tout ce que j'ai vu en bas était étrange, sombre, très particulier. Depuis, j'essaye de décrire ce que j'y ai vu », dit Haruki Murakami, écrivain traduit dans une quarantaine de langues, traducteur, marathonien, collectionneur de disques vinyles et amateur de chats. Il a été retenu par le jury international du Prix Franz Kafka, initié par l'organisation tchèque éponyme. Ce mardi, il a assisté dans la plus grande librairie pragoise, au palais Luxor, à une séance de dédicaces de son livre « Kafka sur le rivage » (Kafka na pobrezi), sorti en tchèque il y a une dizaine de jours.