Kraliky, c'est une petite ville pittoresque perdue dans les montagnes de Bohême de l'Est, faisant frontière avec la Moravie et la Pologne. Elle est située tout près du massif de Kralicky Sneznik, le troisième plus haut après les chaînes des monts des Géants et de Jeseniky. La ville de Kraliky a été fondée à la fin du XIIIe siècle. Ce n'est pas uniquement un lieu vraiment joli et calme, idéal pour passer les vacances, mais aussi un endroit qui depuis toujours jouit d'une position très stratégique. Voilà pourquoi des personnalités clefs de l'histoire mondiale comme le président tchécoslovaque Edvard Benes, François-Joseph II ou Adolf Hitler se sont rendues à Kraliky. D'ailleurs dans les années vingt, on a commencé à construire dans la zone frontalière d'importantes fortifications en béton armé pour protéger le pays contre l'envahisseur nazi. Sinon, dans les environs de Kraliky, les conditions sont excellentes pour faire du ski de piste et de fond. Et nous allons justement vous raconter, chers auditeurs, une histoire apparemment vraie, pas une fiction, dans laquelle un skieur de fond joue un rôle important.
Kraliky, photo: Martina Schneibergová
Cela s'est passé durant le dernier hiver avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Un jeune homme partit depuis la ville de Kraliky faire une randonnée à skis. On peut logiquement se poser la question pourquoi il n'était pas en guerre à combattre l'ennemi fasciste au lieu de se promener à skis. Tout simplement parce qu'il fut grièvement blessé au front. Une balle qui lui traversa la cuisse lui brisa le fémur. La blessure entraîna une infection, donc un long séjour à l'hôpital, des physiothérapies et une période de convalescence. C'est là, justement, que notre homme partit en début d'après-midi à skis dans le cadre de sa remise en forme.
Kralicky Sneznik
Le temps était assez ensoleillé malgré quelques nuages pas bien méchants. Le massif de Kralicky Sneznik n'est pas les Alpes, mais là-bas aussi le temps peut changer assez rapidement. Effectivement, vers cinq heures du soir, le ciel devint soudain noir, menaçant. Une tempête de neige se déchaîna avec fureur. L'homme ne voyait plus rien et ne pouvait presque plus avancer à cause de violentes rafales de vent. Bientôt il perdit son chemin. Ainsi, il tourna en rond pendant quelque temps. Il avait très froid et ressentait une fatigue mortelle. Dans sa tête une seule idée : s'asseoir, dormir. Il s'assit pour se reposer. Le meilleur moyen de trouver la mort blanche, il le savait bien. Mais l'épuisement était plus fort que lui. Ses yeux étaient presque fermés lorsqu'il aperçut une silhouette d'homme qui s'approchait lentement.
Kraliky, photo: Petr Filippov, CC BY-SA 3.0 Unported
Arrivé de plus près, il reconnut son frère cadet qu'il savait encore être au front. Etonné, il lui posa la question sur sa présence en plein milieu de la montagne. Son frère ne répondit pas et lui dit juste de le suivre. L'homme se leva et prit le pas de son frère. Soudain, il ne se sentit plus fatigué et il n'avait plus froid. Son frère cadet le ramena jusqu'à la maison. L'aîné déchaussa ses skis et leva la tête se réjouissant de pouvoir enfin parler à son frère, mais celui-ci n'était déjà plus là. Se demandant où il avait bien pu passer, l'aîné rentra dans la maison. Sa mère était assise dans la cuisine et pleurait. Elle était contente de revoir son fils pour lequel elle s'inquiétait, mais aussitôt elle lui apprit que dans l'après-midi elle avait reçu un message annonçant que son fils cadet était tombé au front il y a un mois. Stupéfait, l'aîné comprit qu'il avait rencontré le fantôme de son frère, qui depuis quelques semaines dans l'au-delà était revenu sur terre pour le sauver.