Le secret du paravent de l’archiduc François Ferdinand d’Este

Le château de Konopiště, photo: CzechTourisme

« Le secret du paravent de l’héritier du trône d’Autriche-Hongrie, François Ferdinand d’Este : » sous ce titre un peu mystérieux se cache une collection inédite de cartes postales des années 1896 – 1904 que François Ferdinand d’Este avait collé sur un paravent dans sa chambre au château de Konopiště. Les textes, au recto, lèvent seulement aujourd’hui le voile sur la vie privée de l’archiduc devenu le 28 juin 1914, à Sarajevo, victime de l’attentat qui a servi de prétexte au déclenchement de la Première Guerre mondiale. Nous vous proposons de revisiter cette intéressante exposition proposée par les Archives de la ville de Benešov, pas loin de Konopiště.

Le château de Konopiště,  photo: CzechTourisme
Le secret des cartes postales dont on ne connaissait jusqu'ici que le verso réservé aux belles images réside dans le fait que, une fois décollées du paravent, elles dévoilent le texte de la correspondance échangée entre François-Ferdinand d'Este et ses proches, amis et collaborateurs et qui ne devait certainement jamais être publié, dit Eva Prochazkova, directrice des Archives régionales de Benešov :

« Si nous savons de François-Ferdinand d'Este qu'il était l'héritier du trône, le politicien chargé de nombreuses tâches à la cour impériale, et le gros propriétaire foncier, cette collection de cartes postales nous montre, en plus, sa face cachée: elle est une preuve de ce que ces gens, outre l'image officielle, vivaient leur vie de tous les jours, avec ses petits secrets... En même temps, les cartes postales illustrent l'ambiance de calme et d'insouciance qui a régné entre 1890 et 1914, période surnommée Belle époque, une expression née après la guerre en tant que reflet d'une certaine nostalgie et de la réalité enjolivée par le traumatisme de la grande guerre et ses conséquences. »

François-Ferdinand d'Este
Le paravent de François-Ferdinand d'Este, actuellement exposé à Benešov, provient du château de Konopiště. François-Ferdinand d'Este, neveu aîné de l'empereur autrichien, François Joseph 1er, l'a acheté en 1887. Fondé à la deuxième moitié du XIIIe siècle, le château était conçu sur le modèle de l'architecture évoluée des châteaux français. A l'époque, il était l'unique construction de ce type en Bohême. Lorsque François-Ferdinand d'Este y arrive, il a 24 ans. Elevé dès l'enfance comme membre de la cour impériale, et prédestiné à une carrière de militaire, il est nommé inspecteur général du pouvoir défensif de l'Empire austro-hongrois. Après le suicide, en 1889, du fils unique de l'empereur, le prince héritier Rodolphe, François-Ferdinand est considéré comme successeur officiel. Il se prépare avec beaucoup de soins à ce rôle. Son voyage autour du monde le conduit aux Etats-Unis d'Amérique. Il est impressionné par la constitution fédéraliste dans laquelle il trouve un certain modèle de règlement des rapports de nationalité au sein de la monarchie multinationale. De retour à Vienne, il est frappé de tuberculose mais il sera guéri et officiellement confirmé dans sa succession. Ses plans de remaniement du château de Konopiště en résidence somptueuse du futur empereur autrichien sont modifiés après qu'il fait la connaissance de la comtesse Sophie Chotek, sa future épouse. Conscient que le principe dynastique des Habsbourg ne permettra jamais que la comtesse d'origine plus modeste jouisse à la cour impériale des mêmes droits qui sont réservés à l'épouse de l'empereur, et très sensible à l'idée des contrariétés éventuelles manifestées à son égard, l'archiduc finit par faire de Konopiště un siège représentatif, mais à l'écart des intrigues de la noblesse à la cour viennoise. Son mariage est célébré au château de Zákupy, en Bohême du nord, en 1900.

Le château de Konopiště où François-Ferdinand d'Este et la comtesse Sophie s'installent est passé par des transformations profondes, dit Eva Prochazková :

Le château de Konopiště
« Homme dans une certaine mesure méfiant à l'égard de son entourage et souhaitant préserver l'intimité de sa vie privée, François-Ferdinand a racheté tous les bâtiments agricoles dans le voisinage et les a fait déplacer vers Benešov. Des dizaines de maisons d'habitation et une école ont du céder la place à un enclos et un parc nouvellement édifiés autour du château d'une superficie de 225 hectares. Les remaniements extérieurs de la partie sud du château lui ont conféré un caractère de résidence noble de style Renaissance nord-italienne. A l'intérieur, le château était remanié pour le plus grand confort de ses habitants : chauffage central, éclairage électrique, conduites d'eau, ascenseur. Le château a accueilli les objets collectionnés par l'archiduc : en premier une collection d'armes qui est l'une des plus précieuses au monde, et un grand ensemble de travaux d'armuriers.
Le château de Konopiště,  photo: CzechTourism
Il y a aussi entreposé une collection de ses trophées de chasse. En juin 1914, Konopiště a reçu la visite de l'empereur allemand Guillaume II., accompagné du commandant suprême de la marine allemande l'amiral Alfred Tirpitz. Le règne très proche de François-Ferdinand était au menu de leurs conversations et non pas le déclenchement de la guerre comme certaines sources avaient la tendance de l'interpréter. Quelques jours après, le successeur est parti pour la Bosnie à titre de ses fonctions d'inspecteur général. Le 28 juin 1914, à Sarajevo, capitale de Bosnie, lui et sa femme sont devenus, tous deux, victimes d'un attentat perpétré par des terroristes serbes.

Konopiště reste un endroit où le successeur sur le trône et son épouse ont vécu quatorze ans remplis de bonheur familial. L'un des secrets révélé par le paravent ne peut rien y changer, dit Eva Prochazková :

« On apprend de l'existence d'une dame mystérieuse Zosia Zamoyska, que François-Ferdinand fréquentait et qui était la dame d'honneur de l'archiduchesse Marie-Joseph, épouse du frère du successeur sur le trône, Otto de Habsbourg. La correspondance échangée entre l'archiduc et cette dame prouve qu'un lien profond s'est créé entre eux, lien qu'on ignorait jusqu'au moment où le restaurateur Borivoj Indra, auteur de l'exposition, a retrouvé cette collection de cartes postales. Le secret de cette dame, le successeur l'avait vraiment très bien caché... »

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