« Le simple fait de ne pas être Miloš Zeman n’a pas suffi »

Miloš Zeman, photo : ČTK

Directeur de Sciences-Po Dijon, Lukáš Macek analyse l’échec du scientifique Jiří Drahoš au second tour de l’élection présidentielle.

Miloš Zeman,  photo : ČTK
« Sa campagne du second tour n’a probablement pas été assez convaincante aux yeux des électeurs pour qui, visiblement, il n’a pas su être le second choix alors que leurs favoris avaient été éliminés au premier tour. Lors des débats de l’entre-deux-tours, Jiří Drahoš n’a sans doute pas su faire la différence nécessaire face à un Miloš Zeman beaucoup plus expérimenté et beaucoup plus à l’aise dans ce genre d’exercice. Le simple fait de ne pas être Miloš Zeman n’a pas suffi. Jiří Drahoš n’a pas su créer de dynamique et une adhésion suffisamment forte autour de sa personne. Il faut rappeler qu’une large proportion de la population tchèque ne le connaissait même pas au moment du lancement de sa campagne. Un certain nombre d’électeurs ont préféré voter pour un candidat avec lequel ils ne sont pas forcément d’accord, mais qu’ils connaissent, à qui ils reconnaissent une expérience politique riche et un savoir-faire politique incontestable, plutôt que de parier sur quelqu’un qui est complètement novice en politique, même si, par ailleurs, c’est une personnalité respectable dans son domaine qui est la science. »

Lukáš Macek,  photo : YouTube / TV5MONDE
Le résultat du second tour, comme on s’y attendait, a été serré : Miloš Zeman a devancé Jiří Drahoš de quatre points. Ce résultat est-il révélateur de l’état d’esprit dans lequel se trouve la société tchèque ?

« Il y a plusieurs choses intéressantes si l’on regarde les chiffres. Miloš Zeman a assez peu progressé par rapport à son score de 2013. Cela lui a suffi pour gagner, mais c’est un écart plus étroit. Les reports de voix entre le premier et le second tour n’ont pas fonctionné pour Jiří Drahoš comme il l’aurait souhaité, alors que les candidats éliminés ont très clairement appelé à voter pour lui et que la majorité d’entre eux se sont même impliqués personnellement dans sa campagne du second tour. C’est quelque chose qui mérite d’être analysé. Une chose m’interpelle : même pour un second tour d’une élection présidentielle qui a été très largement traité dans les médias et qui a suscité de fortes émotions dans le pays, seuls deux-tiers des électeurs se sont déplacés aux urnes. Même pour une élection aussi ‘chaude’, avec une personnification très forte et des choix politiques assez nets, il reste un tiers des électeurs qui boudent les urnes. Cela en dit long sur la désaffection pour la politique d’une grande partie de la population tchèque. »