Le traitement anti-alcoolique a perdu son pionnier, Jaroslav Skala

Jaroslav Skala, photo: CTK

Jaroslav Skala, psychiatre et « alcoologue », est décédé à Prague à l’âge de 91 ans.

Jaroslav Skala,  photo: CTK
Jaroslav Skala qui dirigeait pendant près de 35 ans l’établissement de traitement anti-alcoolique, U Apolinare, est le fondateur de la première station de désintoxication dans le monde, en 1951, un service d’urgence destiné aux personnes retrouvées ivres dans la rue. Ecoutons l’un de ses disciples, le psychiatre Karel Nespor.

« Les horizons du docteur Skala ont été très larges. Il suivait toutes les nouveautés qui t apparaissaient dans son domaine, dans le monde. Voilà pourquoi le traitement qu’il imposait avait un niveau mondial. Il aimait pourtant y ajouter ses propres idées, car c’était un homme créatif, un esprit inventif. Hélas, rares sont ceux qui réalisent qu’il était l’un des pères de la psychothérapie, en République tchèque ».

C’est une conférence internationale sur l’alcoolisme qui s’est tenue au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à Bruxelles et à laquelle Jaroslav Skala, psychiatre de formation, a participé qui l’a marqué au point qu’il a décidé de consacrer sa vie professionnelle à l’étude et à la mise dans la vie pratique des méthodes de traitement anti-alcoolique. Une tâche difficile dans la société socialiste où l’on n’osait même pas évoquer publiquement le thème de l’alcoolisme. Il y est pourtant resté fidèle pendant toute sa vie, cherchant à aider les buveurs désireux de cesser de boire et de retrouver la joie de vivre, au travers des méthodes et d’une discipline particulièrement rudes et exigeantes : un système de points, beaucoup de travail et de sport. Des milliers de patients en profiteront. Pour manifester sa solidarité avec eux, Jaroslav Skala a arrêté lui aussi de boire. Pendant plus de cinquante ans, il n’a pas touché une boisson alcoolisée. « On ne peut pas prêcher de l’eau et boire du vin », prétendait-il. La réalisatrice Helena Trestikova qui a tourné il y a quelques années un film documentaire sur lui, apprécie que jusqu’au dernier moment il soit demeuré discipliné et sévère à l’égard de lui-même.

« Au moment du tournage, il avait déjà des problèmes, d’ouïe et de vue, mais il cherchait à les surmonter. Il suivait les dernières tendances, s’intéressait à tout. J’admire son comportement. Il était brave même quand il n’était plus en pleine forme ».

La place dans l’histoire de la psychothérapie et du traitement des dépendances de Jaroslav Skala est incontournable, beaucoup d’éléments de ses méthodes étant encore aujourd’hui mis à profit ou développées.

A présent, le traitement anti-alcoolique en République tchèque est assuré par des établissements psychiatriques et des secteurs spécialisés des hôpitaux. L’alcoolisme se présente d’ailleurs comme la deuxième cause de l’hospitalisation des malades dans ces établissements. A en croire les récentes évaluations d’experts, la République tchèque compterait à présent près de 300 000 alcooliques, les Tchèques se rangeant ainsi parmi les plus grands buveurs à l’échelle européenne.