Législatives : les sociaux-démocrates lancent le débat sur l’impôt progressif
Tout juste reconduit à la tête du parti ANO, le vice-président du gouvernement Andrej Babiš s’est opposé à la proposition du Parti social-démocrate (ČSSD) du premier ministre Bohuslav Sobotka d’introduire en Tchéquie un impôt progressif sur les revenus pour les personnes physiques et les entreprises. Alors que débute la campagne en vue des élections législatives de l’automne 2017, les partis politiques remettent ainsi sur la table le débat sur la taxation des « plus riches », un sujet sensible.
Le premier ministre s’est ainsi dit favorable à l’instauration d’un impôt progressif pour les personnes physiques et pour les entreprises. Il justifie :
« C’est un instrument de solidarité. Nous voulons que le système des impôts favorise et permette une solidarité entre les plus riches et les plus pauvres, entre les gros et les petits. Je voudrais rappeler que vingt-et-un pays de l’Union Européenne ont un système d’impôt progressif ».
Actuellement, les revenus des particuliers sont imposés au taux unique de 15%, ceux des entreprises à 19%. La social-démocratie veut changer cela. Pour les personnes physiques, il s’agirait de créer quatre paliers d’imposition en fonction du niveau de leurs revenus. Les contribuables de la tranche la plus élevée, au-delà de 50 000 couronnes de revenus mensuels (1850 euros environ), seraient imposés à 32%. Dans un pays où le salaire brut moyen est de près de 27 000 couronnes (1000 euros), cela permettrait selon les sociaux-démocrates de baisser les impôts pour une grande majorité de Tchèques.
L’idée fait toutefois bondir le ministre des Finances Andrej Babiš, réélu ce samedi à la tête du mouvement ANO, formation donnée favorite des prochaines législatives dans tous les sondages. Il s’est exprimé durant le congrès du parti sur cette idée d’imposition progressive, rappelant que les plus riches payent déjà une contribution dite de solidarité :
« Dans les faits, nous avons déjà un système progressif. Que veulent les sociaux-démocrates ? Ils souhaitent augmenter les impôts sur les revenus supérieurs à 50 000 couronnes par mois pour les fixer à 32%. Si l’on parle en termes de revenu super-brut, cela correspond à une taxation de 43%. De cette façon, ils veulent en quelque sorte ‘paralyser’ les personnes concernées. Je ne pense pas qu’une personne qui gagne 50 000 couronnes puisse être considérée comme quelqu’un de ‘super riche’, surtout quand elle a trois enfants et qu’elle a des dépenses en conséquence. »Sans entrer dans les détails de son projet, le milliardaire Andrej Babiš a pour sa part suggéré des baisses d’impôts pour les revenus inférieurs à 113 000 couronnes mensuels, plus de 4 100 euros. Rien ne changerait en revanche pour les contribuables ayant des revenus supérieurs, ceux-là mêmes qui sont astreints à payer la contribution de solidarité. Le ministre des Finances s’est dit également opposé à toute taxe sectorielle, ciblant ainsi la taxe bancaire, l’autre proposition forte portée par les sociaux-démocrates.
Dans l’opposition de droite, l’idée d’une imposition progressive a également suscité une levée de boucliers. Le président du Parti démocratique civique (ODS) Petr Fiala l’a par exemple qualifiée de « complication supplémentaire » dans le système fiscal tchèque. L’ancien ministre souhaite conserver le système d’imposition sur les revenus en place tout en baissant les cotisations sociales qui « pèsent » selon lui sur la compétitivité des entreprises.
« Lutte des classes », ou encore « taxation des classes moyennes »: ainsi titrent les sites Info.cz et Novinky.cz. De manière générale, la presse tchèque est donc relativement critique à l’égard de cette proposition. Même son de cloche chez Lidovky.cz, un média détenu par Andrej Babiš, qui cite le journaliste Petr Kamberský: « Le ČSSD ne défend pas les travailleurs. Il cible Kellner, Babiš et Bakala. »