Les défis de Malloth

Terezín

Après un très long et compliqué processus, c'est ce lundi qu'a commencé, à Munich, le procès de l'ancien SS, Anton Malloth, 89 ans, accusé d'un triple assassinat et de tentative d'assassinat. Il aurait perpétré ces crimes, alors qu'il était, dans les années quarante, gardien au camp de concentration de Terezin, en région pragoise. Les détails avec Omar Mounir.

Terezin
Un tribunal tchécoslovaque avait déjà condamné Malloth à mort par contumace en 1948. Mais la condamnation allait être annulée, afin que le condamné soit jugé par un tribunal allemand. Le procureur de Dortmund ouvrira, alors, une instruction sur le cas Malloth. Mais il l'abandonnera, en avril 1999, pour défaut de preuve. Une enquête sera rouverte, à nouveau, en février de l'an dernier, sur demande de la partie tchèque, en raison de l'apparition d'un nouveau témoin.

Malloth aurait, lors d'une opération de récolte, en 1943, donné à un prisonnier un coup de matraque sur la tête, avant de lui tirer dessus, alors que ce dernier était déjà par terre. Malloth lui reprochait d'avoir dissimulé un chou-fleur dans ses vêtements. Tentative d'assassinat.

Un témoin, viennois, affirme qu'en janvier 1945, dans la petite forteresse de Terezin, Malloth a mis à nu deux prisonniers qu'il a aspergés d'eau jusqu'à la mort. Le troisième cas d'assassinat remontrait à 1944, quand Malloth, pris de colère, aurait frappé, à la tête, un prisonnier que les infirmiers n'ont pu, peu de temps après, que transporter à la morgue. Malloth nie tout en bloc.

Aujourd'hui, devant le tribunal siégeant dans la prison de Munich, c'est un vieillard grabataire qui se présente, accompagné d'un médecin légiste, atteint de cécité, d'un cancer à l'oesophage, et dans l'incapacité de pouvoir soutenir plus de deux heures d'audience, mais conscient, selon l'expertise médicale. Il est au bout d'une existence, sans doute criminelle, mais spectaculaire.

Cet homme est né en 1912 à Innsbruck en Autriche. D'abord, il fut un citoyen italien jusqu'en 1939. L'Allemagne nazie est à son apogée. Malloth devient Allemand. La guerre finie et l'Allemagne par terre, il quitte cette nationalité. 1952, le voilà de nouveau Italien. Mais pas pour longtemps, les autorités italiennes allant découvrir qu'il leur a dissimulé ses antécédents dans les SS. 1988, l'Italie l'expulse vers l'Allemagne. Là, il va vivre dans une maison de retraités de la banlieue munichoise, aux frais de la fille de Himmler, Gudrum Burwitz, par l'intermédiaire de l'association Aide silencieuse.

Voilà Malloth. Une vie à faire saliver les producteurs de cinéma. Individu retors, pour avoir défié les bouleversements de l'histoire, on a l'impression que sa faillite physique, telle qu'il l'offre aujourd'hui aux tribunaux, est un fait accompli au même titre que ses crimes.

Auteur: Omar Mounir
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