Les députés contre la dissolution de leur Chambre

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Après un débat mouvementé long de près de cinq heures, mercredi, les députés se sont prononcés, pour la première fois de l’histoire, sur la dissolution ou non de la Chambre basse. Et comme cela était attendu, ils ont voté contre. Après la démission de la coalition de l’ancien Premier ministre Petr Nečas, le nouveau gouvernement d’experts de Jiří Rusnok ne semble pas bénéficier du soutien « politico-démocratique » indispensable pour son bon fonctionnement.

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C’est suite à une initiative de la social-démocratie, principal parti de l’opposition, que la Chambre des députés a été convoquée en session extraordinaire mercredi par sa présidente, Miroslava Němcová, afin de décider de la dissolution de la Chambre basse du Parlement. Pour cela, les voix d’au moins cent-vingt députés étaient nécessaires. Or, sur les 188 députés présents, seuls 96 d’entre eux ont voté pour la dissolution, 94 se prononçant contre. La Chambre des députés a donc survécu avec un écart de 24 voix à sa dissolution. Dans le cas contraire, des élections législatives anticipées auraient été organisées dans les deux mois suivant le vote. Souhaitée par la social-démocratie, nettement en tête dans les sondages depuis plusieurs mois, cette perspective s’est donc éloignée un peu plus. Toutefois, le débat de ce mercredi a été houleux, notamment en raison des bruyants tapements de pieds qui ont accompagné l’accueil des ministres du nouveau gouvernement. Plusieurs membres de différentes fractions politiques ont justifié leur choix de vote au pupitre de la Chambre des députés. Président du parti social-démocrate qui a requis le projet, Bohuslav Sobotka a expliqué les raisons du soutien de la dissolution de manière suivante :

Bohuslav Sobotka,  photo: CTK
« Si nous ne sommes pas capables d’imposer la dissolution de la Chambre des députés ici et maintenant, et ainsi déclencher des élections anticipées pour le mois de septembre de cette année, nous pouvons nous attendre à un nouvelle période d’instabilité et d’incertitude. Et cette période pourrait voir alterner jusqu’à trois gouvernements successifs. »

Présidente des Affaires publiques, autre parti de l’opposition, Kateřina Klasnová s’est également prononcée en faveur de la dissolution, tout en étant bien consciente que son parti risque de ne pas recueillir suffisamment de voix pour accéder au Parlement lors des prochaines élections :

« Dissolvons la Chambre des députés et terminons ce calvaire politique. Car il s’agit là d’une opportunité idéale pour écourter le mandat du gouvernement de Jiří Rusnok que personne ici ne veut. »

De leur côté, les représentants du parti communiste estimaient qu’une dissolution aiderait le futur gouvernement à retrouver sa légitimité, laquelle a été perdue, toujours selon les communistes, avant même la démission de Petr Nečas. Au contraire, les trois partis de l’ancienne coalition gouvernementale sont restés unis en refusant la dissolution de la Chambre, mais en émettant des critiques d’un autre ordre. Du haut de son pupitre, l’ancien ministre des Finances Miroslav Kalousek s’est montré le plus virulent en qualifiant les membres du gouvernement de « cobayes » issus d’une « expérimentation malheureuse du président » :

Miroslav Kalousek,  photo: CTK
« Il s’agit d’une collision entre les institutions. Il s’agit d’une collision entre la Chambre des députés et ses compétences et un président de la République avide de pouvoir, qui est persuadé que les pratiques constitutionnelles sont des idioties, qu’il n’est pas tenu de les respecter, et qui veut s’approprier une grande partie des compétences de la Chambre des députés, et même du gouvernement. »

Pour Karolina Peake, présidente du parti LIDEM, il appartient aux députés de chercher une issue politique à cette situation. De même, le président du club parlementaire du parti civique démocrate (ODS), Marek Benda, a affirmé que dissoudre la Chambre des députés n’était pas la solution :

Marek Benda,  photo: CTK
« Du point de vue des principes constitutionnels et du futur même des partis politiques et démocratiques de ce pays, je considère qu’il s’agit là d’une prise de position déraisonnable qui peut se retourner contre nous. »

Quoi qu’il en soit, l’ancienne coalition de droite clame qu’elle dispose toujours de 101 voix lui permettant de former un nouveau gouvernement, en soutenant au poste de Première ministre Miroslava Němcová. Dans le camp adverse, le parti social démocrate manifeste désormais une certaine indécision quant à un éventuel soutien du gouvernement intérimaire de Jiří Rusnok, même si ses représentants veulent déposer une nouvelle demande de dissolution en septembre. Si les conséquences du vote de mercredi sur la situation politique du pays sont de ce fait incertaines, elles paralysent néanmoins le dénouement de la crise. Si le gouvernement de Jiří Rusnok doit se présenter devant la Chambre des députés le 8 août au plus tard afin de demander sa confiance, sa tâche s’avère difficile. Désormais il appartient à chacun des partis politiques d’éclaircir son attitude à l’égard de ce gouvernement d’experts impopulaire.