Les députés durcissent les conditions de séjour des étrangers en Tchéquie
La République tchèque durcit sa position vis-à-vis des étrangers non communautaires. Vendredi, la Chambre des députés a adopté des dispositions qui encadrent davantage l’obtention d’un permis de séjour. Le texte poursuit l’objectif de « limiter l’immigration économique » mais fait l’objet de vives critiques, à la fois de la part du patronat mais également des organisations de défense des droits de l’homme.
Le projet a toutefois largement évolué au fur et à mesure du travail parlementaire, notamment sous l’impulsion du député social-démocrate Václav Klučka et du ministre de l’Intérieur Milan Chovanec. Pour ce dernier, artisan en République tchèque d’une politique de fermeté à l’égard des réfugiés, c’est justement dans le contexte de la crise migratoire qu’il faut comprendre ce texte qui constituerait « une réponse » à cette problématique. Un autre parlementaire social-démocrate, Lukáš Pleticha, abonde dans ce sens :
« Cet amendement est avant tout orienté vers des questions de sécurité. Cette législation a pris naissance au moment où nous avons pris conscience de la crise migratoire en 2015. Nous avons donc pu y ajouter des mesures en lien avec cela. Il s’agit de certaines procédures, il s’agit d’ajouter des raisons de refuser dans certains cas d’accorder un visa à un étranger. »
C’est le modèle de la loi concernant l’asile qui a été suivi. Désormais, les autorités tchèques pourront suspendre une procédure de demande de visa si le requérant est absent lors de certains rendez-vous et ne présente pas d’excuse jugée recevable. De la même façon, si l’administration estime qu’il a menti ou s’il présente de fausses pièces d’identité, il pourra plus facilement être recalé.
Pour Martin Rozumek, le directeur de l'Organisation d'aide aux réfugiés, toutes ces dispositions concourent uniquement à un objectif, celui de dissuader encore davantage les étrangers de venir s’installer en République tchèque, où ils sont actuellement environ un demi-million. Il a étudié l’ensemble de ces textes et constate qu’on n’y trouve pas une seule fois le mot « sécurité », celui pourtant censé justifier le nouveau cadre législatif :« Nous critiquons le fait que ce texte va considérablement alourdir le poids administratif supporté par les étrangers mais aussi par les entreprises qui emploient des étrangers. Nous critiquons également le fait que pour les cinq premières années, les travailleurs étrangers n’auront plus la possibilité de modifier leur visa lié à une activité entrepreneuriale. Or, selon nous, c’est sur cet aspect que toute la communauté vietnamienne a construit ses activités en République tchèque. Tout cela sera davantage limité et nous pensons que cela fera du tort non seulement aux étrangers mais également à l’activité ainsi qu’aux couples mixtes. La question de la sécurité est simplement un prétexte. »
Chez les politiques, les critiques ont également fusé du côté des communistes et de certains membres du mouvement ANO, qui regrettent les entraves nouvelles mises aux procédures de regroupement familial. Les organisations de défense des droits de l’homme ont cependant un motif de satisfaction puisque les députés ont retiré une mesure qu’elles jugeaient anticonstitutionnelle. Les personnes qui se verraient refuser l’obtention d’un visa pourront en effet continuer à se pourvoir en justice, une possibilité que le député Václav Klučka souhaitait supprimer.
Dans le même temps, la Chambre basse du Parlement a également voulu lutter contre « l’immigration économique ». Cela passe par des dispositions visant les agences d’intérim, qui devront obtenir une licence de la part du Bureau du travail pour exercer. Une liste des entreprises peu fiables, celles qui ne paient pas leurs dettes, les cotisations patronales ou celles qui ont déjà eu recours à des travailleurs illégaux, sera aussi créée. Autant de mesures qui ne plaisent pas franchement au patronat en cette période de pénurie de main d’œuvre, où les firmes sont contraintes d’aller chercher leurs employés à l’étranger.