Les députés tchèques approuvent l’imposition des restitutions aux Eglises

Les députés tchèques ont adopté un amendement à la loi sur les restitutions des biens aux Eglises déposé par le Parti communiste de Bohême et Moravie, photo: ČTK/Vít Šimánek

Mercredi, les députés tchèques ont adopté un amendement à la loi sur les restitutions des biens aux Eglises déposé par le Parti communiste de Bohême et Moravie. Cet amendement prévoit l’imposition des compensations financières que les Eglises touchent de l’Etat tchèque en échange des biens confisqués sous le régime communiste qui ne peuvent pas leur être restitués. Il y a toutefois peu de chances que l’amendement passe au Sénat.

Les députés tchèques ont adopté un amendement à la loi sur les restitutions des biens aux Eglises déposé par le Parti communiste de Bohême et Moravie,  photo: ČTK/Vít Šimánek
La question des restitutions des biens aux Eglises est un des serpents de mer de l’actualité tchèque. Alors que la loi sur ces restitutions a été adoptée en 2012, elle n’a pas cessé de susciter de vifs débats, ses opposants critiquant les gains importants réalisés par les Eglises, alors même que le nombre de fidèles est relativement faible dans ce pays considéré comme un des plus athées au monde. Les croyants sont en effet une minorité, 3,6 millions de personnes s’identifiant comme non-croyants, tandis que 5 millions de Tchèques ont laissé la case religion vide lors du recensement national en 2011.

Le Parti communiste de Bohême et Moravie défend depuis longtemps l’idée d’une taxation de ces compensations financières et avait même conditionné le soutien de son parti à la coalition minoritaire formée par le mouvement ANO et les sociaux-démocrates à cette question. Le mouvement ANO le lui a donc bien rendu et a soutenu la motion, mardi, 106 des 172 députés présents votant en sa faveur. Jaroslav Faltýnek, président du groupe parlementaire du mouvement d’Andrej Babiš :

« Nous avons toujours dit que cette loi a été adoptée de manière étrange. Selon nous, elle surévalue ce qui doit être restitué. En aucun cas, nous ne mettons en doute le fait qu’il faille restituer les biens confisqués aux Eglises. Mais la question, c’est à quelle hauteur. Il s’agit de l’argent de tous les citoyens de la République tchèque. Depuis cinq ans, nous répétons qu’il faut au moins en partie atténuer la somme calculée qui est surévaluée. Voilà pourquoi le mouvement ANO a soutenu cet amendement afin qu’une partie de cet argent soit rendu aux citoyens tchèques. »

Au total, 17 confessions du pays, dont notamment l’Eglise catholique romaine, doivent recevoir des biens d’une valeur d’environ 75 milliards de couronnes (2,9 milliards d’euros) et 59 milliards de couronnes (2,3 milliards d’euros) de compensations financières, pour ceux qui ne peuvent être restitués en nature. Ces paiements, ajustés aux taux d’inflation, sont échelonnés sur une période de trente ans.

Selon le parti communiste, l’application d’un tel amendement permettrait à l’Etat de récupérer 380 millions de couronnes (15 millions d’euros) sur les quelque 2 milliards (80 millions d’euros) versés chaque année aux Eglises.

Photo: gampe,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0
L’opposition s’est insurgée contre l’adoption de cet amendement, estimant que « le populisme l’avait emporté sur le bon sens ». Petr Fiala est le président du parti de droite ODS :

« C’est un amendement mauvais et injuste. Cela montre surtout le nouveau pouvoir acquis par les communistes dans ce pays. C’est le pot-de-vin qu’Andrej Babiš fait aux communistes pour leur soutien à son gouvernement. C’est une grossière erreur selon moi et elle est de la responsabilité de ceux qui ont permis aux communistes de faire passer cet amendement. J’espère qu’il ne sera pas adopté. »

Désormais la balle est en effet dans le camp du Sénat. La coalition gouvernementale n’y étant pas majoritaire, la chambre haute du Parlement devrait retoquer l’amendement. Au final, il est probable que cet amendement, par ailleurs soutenu par le président tchèque, Miloš Zeman, soit examiné par la Cour constitutionnelle, après son rejet attendu par le Sénat et sa probable nouvelle approbation par les députés.