Les élections municipales : des victoires et des pertes ambigües
Quelle est la principale conclusion à retenir des résultats des élections municipales qui se sont déroulées le week-end dernier en République tchèque ? Cette nouvelle revue de presse vous propose quelques éléments de réponse. Les attentes des étudiants tchèques par rapport à leur futur emploi est un autre sujet traité. Il sera aussi question de quelques changements prévus dans le métro de Prague. Une réponse enfin à la question de savoir pourquoi le grand compositeur baroque Jan Dismas Zelenka n’est pas reconnu comme il le mériterait et un bref rappel des 80 ans d’Ivan Havel, frère cadet de l’ancien président Václav Havel.
« Même si c’est le mouvement ANO d’Andrej Babiš qui est généralement considéré comme le vainqueur de ces élections, celui-ci n’a obtenu que près de 1 670 mandats, soit bien moins que les quelque 35 000 des formations locales. Ces dernières, qui sont composées de candidats qui n’acceptent pas la façon dont les ‘grands’ partis gèrent les affaires dans le pays, ont remporté la victoire à différents niveaux, que ce soit dans les petites communes jusque dans les villes de taille moyenne. Prague témoigne de cette tendance de la manière la plus spectaculaire. Il se peut que l’on assiste à la naissance d’une force authentique qui cherchera aussi, progressivement, à percer dans la haute politique. »
« La démocratie ne doit pas son attrait à la possibilité de composer un gouvernement idéal ou des administrations locales, mais au fait qu’elle mène à des alternances au pouvoir. De ce point de vue-là, le bilan des dernières élections municipales est satisfaisant. » C’est ce qu’observe l’auteur d’une note publiée dans le quotidien Lidové noviny. Le site echo24.cz constate pour sa part qu’en dépit de son succès dans les capitales des régions, où il est arrivé en tête, le mouvement ANO a essuyé plusieurs défaites. Il a réussi dans « des régions hautement urbanisées dans le nord du pays qui portent des traces de l’industrie lourde développée sous le socialisme ». D’après le politologue Tomáš Lebeda, le mouvement ANO peut se féliciter des résultats de ces élections, même si les vrais vainqueurs se trouvent ailleurs. C’est ce qu’il a expliqué sur le site de l’hebdomadaire Respekt :
« De tous les partis représentés au Parlement, le mouvement ANO, qui possède un électorat orienté principalement à gauche, est celui qui a obtenu le plus grand nombre de voix et, aussi, le plus grand nombre d’élus. Son résultat est donc un succès... Cela dit, ces élections municipales sont aussi une victoire de la droite, compte tenu de la montée en puissance du parti STAN et du Parti civique démocrate (ODS). A noter aussi le renforcement des Pirates. Le plus grand perdant, c’est la gauche, et en premier lieu le Parti social-démocrate (ČSSD). »
Le politologue Stanislav Balík pense lui aussi que le mouvement ANO sort vainqueur des élections. Pour lui, la principale conclusion à retenir de ces municipales est pourtant la rennaissance de l’ODS, qui se présente désormais comme le principal opposant d’ANO... Selon un commentaire publié sur le site novinky.cz, c’est « le processus de disparition des partis politiques de gauche et le risque de leur future disparition totale » qui constitue l’autre conclusion importante à retenir. A ce propos, le journal de gauche Deník Referendum écrit :
« Les résultats des élections municipales ont tendu un miroir impitoyable aux deux partis tchèques de gauche, le Parti social-démocrate (ČSSD) et le Parti communiste de Bohême et Moravie (KSČM). L’un comme l’autre traversent une crise profonde. Compte tenu de la mauvaise situation du Parti des Verts, on peut imaginer que le temps soit venu de créer un nouveau parti qui sera à même de représenter la gauche démocratique à l’image européenne. »
Les emplois qui intéressent les étudiants tchèques
Un cadre de travail amical, créatif et dynamique, et de bonnes conditions salariales. Telles sont les principales attentes des étudiants tchèques quant à leur futur emploi. C’est du moins ce que révèle la dernière des enquêtes annuelles de la société Universum, à laquelle ont participé quelque 10 000 étudiants de vingt-cinq écoles supérieures du pays. Le quotidien économique Hospodářské noviny apporte quelques précisions :« Leurs études terminées, les étudiants aimeraient prioritairement travailler dans une grande société internationale. Un emploi dans la filiale tchèque de Google, qui est l’une des plus petites à l’échelle mondiale avec seulement une quarantaine d’employés, est le plus prisé par les étudiants en technologies informatiques et en économie. S’agissant des disciplines techniques, la priorité est donnée au groupe Škoda Auto, tandis que l’Académie des sciences attire les adeptes des sciences naturelles. Les étudiants en sciences humaines tournent leur intérêt, prioritairement, vers la Télévision tchèque. »
S’agissant de leurs prétentions salariales, les étudiants tchèques souhaitent un premier salaire d’au moins 30 000 couronnes (près de 1 200 euros), celles des femmes étant un peu plus modestes. Autre point à retenir : par rapport aux étudiants étrangers, les tchèques envisagent davantage de monter leur propre entreprise. Toutefois, selon les données de l’Office des statistiques, le nombre de jeunes entrepreneurs en République tchèque est en baisse ces dernières années.
Un changement des noms des stations du métro pragois ?
Quelque vingt stations du métro pragois pourraient être rebaptisées. Le site aktualne.cz explique pourquoi :« Cette idée s’inscrit dans le cadre de la nouvelle conception des transports en commun de Prague qui s’étend jusqu’en 2029 à laquelle les élus municipaux ont récemment donné leur aval. Sachant qu’il s’agit-là d’un chapitre controversé et sensible, ils veulent qu’elle soit précédée d’un large débat tant parmi les experts qu’au sein de l’opinion publique. Si ce changement est avalisé, il entrera en vigueur lors de la mise en fonction de la nouvelle ligne de métro D, dont le premier tronçon devrait être achevé d’ici à 2025. »
Qu’’est-ce qui ne va pas avec les noms existants ? Les auteurs du document constatent que certains ne répondent pas vraiment à la topographie et au caractère des lieux concernés. Le site aktualne.cz rappelle que les noms de certaines stations ont déjà changé en 1990, au lendemain de la chute du régime communiste. Les stations qui s’appelaient Lenin, Gottwald ou Moskevská ont ainsi été rebaptisées.
Jan Dismas Zelenka : un compositeur qui n’est pas apprécié à sa juste valeur
Tandis que Mozart est lié à Salzbourg et Bach à Leipzig, le nom du grand compositeur baroque tchèque Jan Dismas Zelenka devrait être attaché à Prague. C’est ce que prétend, dans un entretien pour le supplément Orientace du quotidien Lidové noviny, l’organiste et chef de l’Ensemble inégal, Adam Viktora, qui explique pourquoi le compositeur n’est pas encore aujourd’hui apprécié à sa juste valeur :« D’abord, Zelenka a été découvert assez tardivement, voilà pourquoi on a raté l’occasion de le faire connaître au grand public. Le problème repose aussi sur le fait que ses compositions sont écrites en latin, contrairement par exemple aux musiques de Bach sur des textes en allemand, ce qui facilite leur accueil en Allemagne. Et puis, quand on dit musique baroque, les gens entendent d’habitude Bach, Händel et Vivaldi. Rompre ce handicap lié à Zelenka est très difficile et demande d’importantes activités promotionnelles. Heureusement, il existe des organisateurs de festivals internationaux qui ne craignent pas de mettre Zelenka à l’affiche. Partout où elle a été présentée et interprétée, sa musique a suscité l’enthousiasme. En outre, on trouve beaucoup d’admirateurs de sa musique dans des pays comme l’Australie, l’Islande et le Canada. »
Une musique qui, tout comme chez Bach, est dotée d’une maîtrise de composition et d’invention incomparable. Telles sont les grandes qualités qu’Adam Viktora, triple lauréat du prix Diapason d’Or, attribue à l’œuvre de Jan Dismas Zelenka, compositeur entouré de mystères et dont on ne connaît même pas le physique, faute de portrait conservé.
Ivan M. Havel a fêté ses 80 ans
« Celui qui est né comme le frère cadet de Václav Havel doit s’habituer à ce que beaucoup de gens le considèrent davantage comme un frère intéressant que pour ce qu’il est vraiment. » C’est ce que signale un texte mis en ligne sur le site echo24.cz qui rappelle qu’Ivan M. Havel, scientifique reconnu et rédacteur de la revue Vesmír (L’Univers), a soufflé, le 11 octobre dernier, ses 80 bougies. Et d’ajouter :« Un regard initié sur la personnalité, l’œuvre et le caractère d’Ivan Havel montre que cette donne n’a pas eu d’impact sur lui et ne l’a pas détourné de son chemin. Un chemin indépendant et inédit qui avait de quoi impressionner son frère aîné. Puisque le cadet des deux frères fête ses 80 ans, on peut supposer qu’il ne quitte plus son chemin et espérer qu’il le suive encore longtemps. »