Les Prix de la critique, une compétition qui se veut être des Golden Globes à la tchèque
Jeudi soir, la première édition des Prix de la critique, équivalent des Golden Globes américain, s’est déroulée à Prague. C’est le film Pouta, de Radim Špaček qui a été désigné Meilleur film de l’année 2010. Radio Prague a demandé à Michal Procházka, critique de cinéma, mais qui ne faisait pas partie du jury, ce qu’il pensait de cette nouvelle compétition mais aussi de ce prix du meilleur film.
« Je pense qu’il n’y avait pas de meilleur film que Pouta. C’est clair ! Le choix était facile. La question qui se pose est différente : c’est plutôt celle du nombre d’entrées que le film a fait. Pouta n’a attiré que 20 000 spectateurs en République tchèque, ça veut donc dire qu’il y a une sorte de doute sur la capacité de la République tchèque à promouvoir, à imposer des films tchèques de qualité dans la distribution, où des oeuvres comme celle-ci restent marginalisées. »
Cela veut dire qu’il y a une sorte de distorsion entre ce que va voir le public spontanément et ce que les critiques choisissent...
« Tout-à-fait. Etant donné le paysage du cinéma tchèque, cela veut dire qu’il y a toujours deux, trois films qui chaque année, remportent un succès énorme. Cela veut dire parfois même 1 million de spectateurs ! Mais par contre il y a aussi beaucoup de films marginalisés, avec très peu de spectateurs. Ce qui nous manque, c’est une sorte de ‘mainstream’ de qualité, de films qui pourraient attirer quelque 200 000 spectateurs. La production de la République tchèque est en effet assez divisée. »On va revenir aux Prix de la critique tchèque, c’est un nouveau venu dans le domaine des compétitions. On peut dire qu’il fait un peu concurrence aux Lions tchèques, l’autre grand événement annuel qui récompense les meilleurs films de l’année précédente. Le Prix de la critique est un peu différent puisqu’il se veut une sorte de Golden Globes à la tchèque. Vous-même n’y avez pas participé en tant que critique. Que pensez-vous de ce nouveau prix ?
« Il faut dire qu’il n’y a en réalité pas un seul événement qui fasse le bilan du cinéma tchèque. On a le festival Finale Plzeň qui essaye de promouvoir les films contemporains auprès des journalistes étrangers. Il y a un prix prestigieux, les Lions tchèques, et enfin ce nouveau prix, celui de critiques. C’est assez étrange car cela prend des allures de prix à l’américaine. Mais en même temps, les gens qui ont participé au vote ne sont pas toujours des gens qui peuvent se targuer d’avoir un prestige important dans ce métier. Ce sont des journalistes de presse écrite essentiellement, des quotidiens, qui ne se distinguent pas forcément par une grande qualité d’écriture sur le cinéma. Dans ce prix-là, il y avait quand même des gens intéressants qui ont été mis à l’écart. Le prix a été créé par des gens issus des médias généralistes, donc ça me pose un peu problème, de savoir si je dois prendre ce prix au sérieux. »C’est intéressant que vous vous posiez la question du sérieux. Car ceux qui ont créé ce prix se sont entourés de grandes personnalités : l’ex-président Václav Havel a remis le prix du Meilleur scénario, Eva Zaoralová, directrice du Festival de Karlovy Vary, celui du Meilleur film. Serait-ce une façon de donner une forme de caution, de gage de qualité au prix ?« C’est bien possible. Mais je dois redire que je ne faisais pas du comité qui a créé ce prix, donc peut-être que ce n’est pas à moi de poser la question de la vision du prix. Je souhaite le meilleur à ce prix. Et c’est bien si des personnages comme Václav Havel ou d’autres ont participé. »