L’histoire d’un mariage réussi des années trente
Notre histoire se passe dans les 1930 au Sud-Ouest de la Bohême dans la Šumava, la chaîne de montagne qui sert de frontière entre la Bohême et la Bavière. Plus précisément, il s’agit du hameau Kozí (le hameau de la chèvre) qui se trouve à une dizaine de kilomètres de Klatovy, ville renommée jadis pour son régiment de dragons. Dans le hameau se trouve une ferme ancienne entourée d’immenses terrains qui appartiennent en majeure partie à madame Lada Fredy que j’ai invitée à l’antenne pour témoigner de l’histoire qui s’est passée il y a bien longtemps en ces lieux.
Avant d’en venir à l’histoire on va parler un peu du terrain sur lequel se trouve la ferme que je viens de mentionner. Sur le terrain il y a des jardins, des champs, des forêts, des vergers. Jadis les terrains appartenaient à la commune et il s’y trouvait une église, une école et un cimetière. Madame Fredy est-ce que actuellement il y a encore des ruines qui témoigneraient de l’existence de ces bâtiments?
« Je ne pense pas qu’il y ait des ruines qui témoigneraient du passé car tout à disparu et c’est une histoire assez ancienne, voire très ancienne. Le seul témoignage est la fosse d’une église qui s’appelait ‘Kostelík‘ et qui s’élevait sur la pente qui se trouve derrière la ferme. Il y a également des restes de deux cimetière, un pour enfants et un autre pour les adultes qui est un peu plus loin et dont l’existence est rappelée par les pierres tombales. Mn oncle a retrouvé des ossements lorsqu’il était jeune,et qu’il plantait des pommes de terre sur le terrain. D’après ce que m’a dit ma mère, c’était vraiment des ossements d’enfants et pas des os d’animaux. De ce fait et grâce au registre civil de la commune on en a déduit l’existence de ce cimetière. »
D’après tout ce que vous dites, c’est un endroit mythique. Vous m’avez parlé d’un signe en forme de croix en fer rongé par la rouille incrusté dans une pierre qui daterait de l’époque celte. Est-ce que c’est vrai ?
« Oui, en effet cette pierre se trouve derrière la maison, dans un endroit qui me plaît beaucoup car mon grand-père y a planté des sapins. Il y a une petite forêt qui divise le cimetière de la ferme. Cette pierre se trouve à la lisière entre la ferme et la forêt et il y a sur cette pierre une croix, donc on peut supposer qu’il s’agit d’une tombe celte. »
Cette ferme appartenait à votre grand-mère qui à l’époque de notre histoire avait vingt-et-un an. La ferme était endettée et il menaçait qu’elle soit mise à l’encan. Votre grand-mère n’était donc pas considérée comme un bon parti. Et c’est à ce moment précis qu’on lui a trouvé un riche mari, comme c’était la coutume. Comment cela s’est-il passé ?
« Ma grand-mère était la fille d’une femme intelligente et rusée et lorsque la ferme fut mise aux enchères parce que la sœur de ma grand-mère s’était mariée avec un homme dépensier, sa mère décida de ne pas révéler tous les biens qu’ils possédaient. A l’époque, ma grand-mère était considérée comme un parti peu intéressant. Mais elle était très exigeante. Il y avait des hommes qui s’intéressaient à elle, mais elle ne voulait pas se marier estimant qu’à vingt-et-un an elle avait encore le temps. Plus tard elle s’est rendue compte, qu’il faudrait peut-être aller chercher ailleurs parce que dans la région il n’y avait pas vraiment de maris potentiels intéressants. Ma grand-mère a donc décidé de lui faire rencontrer un jeune homme, enfin entre guillemets, car il avait trente-quatre ans et était veuf. Ma grand-mère ne voulait pas en entendre parler disant qu’il était vieux et petit. Mais finalement elle se plia au désir de sa mère et donna son accord pour le rencontrer. Le mari potentiel a donc été invité à la ferme. A la grande surprise de ma grand-mère elle voit arriver un carrosse noir attelé par deux chevaux noirs dont elle voit descendre un petit homme mince avec des cheveux noirs et des yeux noirs brillant. Il lui plaisait beaucoup et elle était même prête à le suivre à Prague où il travaillait comme architecte et gagnait beaucoup d’argent.
Mais pour pouvoir vivre avec ma grand-mère, son mari a décidé de quitter son métier et d’acheter une auberge qu’ils ont exploitée ensemble. C’était un bon architecte, mais un mauvais commerçant, il prêtait de l’argent et laissait les copains boire gratuitement. De peur que la ferme soit mise à l’encan, ma grand-mère a décidé de vendre l’auberge et de revenir à la ferme où j’habite, et qu’ils ont rachetée. Les habitants étaient étonnés qu’elle soit revenue, en plus avec un homme riche. Ils étaient vexés d’avoir cru qu’elle était pauvre. Il est vrai qu’ils sont devenus très riche car mon grand-père était un bon agriculteur et il ramené une technique d’exploitation moderne et performante, il s’occupait des gens pauvres, au cours de la Seconde Guerre mondiale il a aidé des partisans et les réfugiés. C’était un homme au grand cœur et je crois que ma grand-mère a bien fait d’avoir épousé ce petit bonhomme de Prague. »
Après cette bien jolie histoire terminons comme d’habitude une recette qui ne manquera jamais à notre émission. Cette fois-ci se seront des pommes de terre à l’ancienne que cuisinaient les pauvres dans le temps.
Pommes de terre à l’ancienne
Pommes de terre à volonté selon le nombre de personnes, fromage blanc ou beurre, sel, oignon ou ciboulette (elle est moins forte)
• Répartir les pommes de terre entières avec leur peau sur une plaque.
• Les recouvrir soit d’un grand plat rectangulaire ou éventuellement d’une feuille d’aluminium et les placer dans le four (de préférence électrique).
• Retourner les pommes de terre pendant la cuisson en remuant le plat rectangulaire. Si les pommes de terre sont recouvertes d’une feuille d’aluminium, soulever la feuille et remuer les pommes de terre à l’aide de deux spatules en bois.
• Pendant la cuisson des pommes de terre que vous surveillez vous-même, préparer le fromage blanc.
• Mettre le fromage blanc dans un récipient.
• Hacher finement l’oignon ou la ciboulette et ajouter du sel.
• Bien remuer et c’est prêt.
Le fromage blanc se mange évidemment avec les pommes de terre.
Servir avec du petit lait et sur des plats rustiques.