L'incinération des Allemands en Tchéquie
Quelques dizaines d'heures nous séparent de l'élargissement de l'Union européenne. Mais il existe beaucoup de domaines, dans lesquels les frontières semblent ne plus exister, depuis quelques années. La presse tchèque informe de ce que les Allemands choisissent, parfois, la Tchéquie pour y faire incinérer leurs parents et leurs proches. La raison ? La procédure y est nettement meilleur marché... Un thème donc un peu macabre, pour ce miroir de la presse tchèque...
« Le crématoire de Hrusovany, commune située près de la ville de Chomutov, en Bohême du nord, a trouvé un bon moyen pour gagner de l'argent et pour mettre à profit la capacité de ses fournaux », écrit une récente édition du quotidien Lidove noviny qui continue : « Il importe des cadavres de l'étranger, plus concrètement d'Allemagne voisine. Il a entamé la collaboration avec une filiale des pompes funèbres de Berlin, laquelle garantit le transfert de quelque 50 cadavres par mois ».
« C'est avantageux pour les deux parties », estime l'auteur de l'article. Si, d'un côté, le crématoire bénéficie de meilleurs revenus, les Allemands, quant à eux, arrivent à faire des économies. L'acte funèbre en Tchéquie, y compris les tarifs douaniers et les frais de transport leur coûte nettement moins cher que ce qu'ils auraient à payer dans leur pays.
Les prix qu'il faut payer aux pompes funèbres en Tchéquie se situent, en effet, entre 10 et 15 milles couronnes. Selon les informations disponibles, en Allemagne, ces services affichent pratiquement les même chiffres, avec pourtant une petite différence - ils se paient en euros, un euro équivalant à l'heure actuelle à un peu plus de trente couronnes.
Selon le journal, les Allemands se félicitent de ce que les délais d'incinération sont en Tchéquie plus courts que dans leur pays. A Berlin, il faut attendre une semaine environ. En plus, la commune de Hrusovany n'est pas située loin de Berlin - il ne faut pas compter plus de quatre heures en voiture.
En appréciant cet « échange » qui existe depuis quelques années déjà, Jiri Klufa, économe de la société gérant le crématoire tchèque, est pragmatique. « Pour nous, il s'agit d'un commerce normal, même s'il concerne les cadavres », dit-il et de préciser : « Il va de soi que pour leur importation, il faut posséder des autorisations accordées par des services hygiéniques, des douaniers et qu'il faut respecter les règlements correspondants. Dans cette logique, les pompes funèbres allemandes ne peuvent exporter vers la Tchéquie que des cadavres « vérifiés ». Avec l'élargissement de l'Union Européenne, ce commerce pourra se développer encore davantage, sans passeports spéciaux et pour moins cher, pour les clients.
Le crématoire de Hrusovany n'est pas le seul, en République tchèque, à collaborer avec les pompes funèbres étrangères. Celles d'Ostrava, au nord de la Moravie, collaborent avec les pompes funèbres de Pologne. Anuellement, une centaine de cadavres polonais s'y voit ainsi incinérée. Lidove noviny cite à ce propos Julius Mlchoch, président de l'Association des pompes funèbres en Tchéquie qui dit :
« A la différence des Allemands, pour lesquels les motifs économiques jouent le rôle primordial, les Polonais se réfugient en Tchéquie, parce que les incinérations sont assez difficilement accessibles, dans leur pays. Même si elles y sont autorisées officiellement, depuis le début des années quatre-vingt-dix, seules quelques 5 000 personnes sont annuellement incinérées, en Pologne. Une situation qui existait, dans un passé pas très éloigné, aussi, en Slovaquie, pays très catholique, lui aussi. »
Egalement, le quotidien Hospodarske noviny a récemment publié un article consacré à ce phénomène. Il l'a accompagné de photos, sur lesquelles on peut voir des Allemands âgés, venus en Tchéquie, pour visiter le cimetière de Hrusovany, près de Chomutov, éventuellement, pour faire une excursion dans le crématoire. Certains avec une caméra. C'est de retour chez eux, en toute tranquilité, qu'ils auront le temps de prendre une décision et de voir si le lieu leur convient et s'ils vont choisir la Tchéquie comme lieu de leur dernier repos.