Ludvik Vaculik : « L'homme qui chante »
L'écrivain Ludvik Vaculik, qui a récemment soufflé ses 80 bougies, aime chanter et il chante fort bien. Son dernier livre qui vient de paraître et qui est intitulé « Polepsene pesnicky » (Les chansons corrigées), traduit merveilleusement cet amour pour la chanson, pour la chanson folklorique notamment, mais pas seulement. Vaculik a dit à l'occasion de son lancement :
« Le but du livre est de montrer qu'en chantant on voit le monde se transformer. Moi-même, je ne me prends pas pour un chanteur, je ne chante pas dans une chorale, je ne gagne pas ma vie avec le chant. Mais j'ai chanté durant toute ma vie. Lorsqu'on chante, on s'enrichit d'une nouvelle capacité, d'une nouvelle possibilité, d'une troisième main, d'un nouveau sens...voire d'une nouvelle zone érotogène ».
Réflexions, récits autobiographiques, souvenirs, photographies, notes, textes de chansons, un CD. Voilà tout ce qui est réuni dans les « Chansons corrigées », un livre hors du commun et hors genre. A côté des chansons folkloriques « classiques », on y trouve de nouvelles chansons, liées à telle ou telle situation, politique le plus souvent, ainsi que celles qui existent déjà et auxquelles l'écrivain a ajouté de nouveaux couplets et qu'il a ainsi « corrigées ».
Dans l'ouvrage, nous pouvons lire : « Le chant est une manifestation corporelle de l'état d'âme et vice versa... Pour moi, c'est un phénomène somatique, comme la température du corps, la sueur, les larmes... Chez nous et dans mes alentours, on chantait, on sifflait, on bredonnait : grands, petits, tout le monde, à tout moment ». Ludvik Vaculik a rappelé certains moments forts de cette longue histoire d'amour, avec humour bien sûr, lors de la présentation de son livre, à Prague :
« Le chant était pour nous, aussi, un moyen qui nous liait au monde extérieur, un moyen d'instruction donc. En 1936, les Italiens ont attaqué Habesh. A l'école, tous les jours, on suivait sur la carte l'avancée des Italiens. Quand on jouait, en menant les chèvres au pâturage, personne ne voulait incarner un Italien. Lorsque les Italiens ont subi les premières pertes, j'ai composé pour l'occasion une chanson » :
Glosateur fin et critique du monde et des événements, l'écrivain Ludvik Vaculik a à son compte dix-sept ouvrages qui sont parus à partir du début des années soixante, dont on mentionnera « La Hache » ou « Clef des songes ». On rappellera que dans les années 70 et 80, il était sur la liste des auteurs interdits par le régime et qu'il dirigeait, en samizdat, les Editions Petlice (Sous les verroux)... Ecrivain, Ludvik Vaculik se veut aussi être « un homme qui chante ». Il l'est effectivement.