Moins de chauffage, plus de contestations

Après l’annonce d’une possible limitation du niveau de chauffage pour cet hiver, certaines voix s’élèvent pour critiquer cette mesure. Retour sur les raisons de ces critiques et les limites de ladite réglementation.

Les températures baissent en cette fin d’été, mais ce n’est pas pour cela qu’il faut déjà penser à rallumer son chauffage, d’autant plus qu’en Tchéquie, un nouveau décret pourrait entrer en vigueur et limiter le niveau de chauffage. C’est ce qui a été annoncé à la mi-août par le ministère de l’Industrie et du Commerce. Ce décret vise à réduire de quelques degrés le chauffage dans les habitations, mais aussi les écoles, hôpitaux, maisons de retraites, hôtels, etc. Il ne viendrait à être mis en place qu’en cas d’état d’urgence et de pénurie de gaz imminente. Pour autant, la possibilité d’une telle régulation fait donner de la voix ces dernières semaines à plusieurs opposants. Parmi eux, Jiří Horecký, président de l’association des fournisseurs de services sociaux, qui a présenté son refus d’un tel décret. Il nous explique pourquoi ce n’est pas applicable pour de nombreux établissements qui fournissent des services sociaux et qui accueillent certains types de publics :

Jiří Horecký | Photo: EAHSA - European Association of Housing and Services for the Ageing

« L’argumentation qui a accompagné notre refus peut être résumée de la sorte : dans les établissements de soins résidentiels, pas seulement en République tchèque mais plus généralement en Europe, on trouve des gens d’un certain âge, de 85-86 ans en moyenne. Ces personnes ont plus de difficultés à conserver leur chaleur corporelle. »

Mais les personnes âgées ne sont pas les seules concernées : l’association réclame aussi que le cas des centres pour sans-abri, pour demandeurs d’asile ou pour mères célibataires en difficulté puisse être étudié. Jiří Horecký explique qu’il est en faveur d’une réglementation qui puisse s’adapter aux difficultés et spécificités de chacun et affirme avoir déjà fait face à ce type de difficultés en période de pandémie, où certaines législations ne pouvaient pas s’adapter à des cas spécifiques, notamment pour le port du masque.

Le décret prévoit des températures différentes en fonction des lieux et des pièces. Par exemple, les gens devraient chauffer leurs salons à 18 °C au lieu des 20 °C actuels, et leurs salles de bains à 19 °C au lieu de 24 °C. Or, pour ce qui est des salles de bains, Jiří Horecký est très opposé à une telle réduction de température étant donné que des soins d’hygiène y sont réalisés et que les locataires pourraient alors très facilement attraper froid. Par ailleurs, il affirme que tous les bâtiments ne sont pas adaptés pour mettre en application ce décret :

Photo illustrative: Filip Jandourek,  ČRo

« La plupart du temps, les caractéristiques techniques des bâtiments ne permettent pas de mettre cela en place. Il n’est pas possible de réguler la température d’une pièce à l’autre et d’avoir des températures différentes dans toutes les pièces, surtout dans les vieux bâtiments. C’est aussi une des raisons qui nous a amenés à rejeter cela. »

Ce refus s’est traduit par une prise de contact avec le ministère du Travail et des Affaires sociales ainsi que des associations représentant les régions tchèques. Le président de l’association reconnaît jouir du soutien de plusieurs de ces institutions. Par ailleurs, il n’est pas le seul à pointer du doigt les limites que suppose ce règlement. L’Association des hôtels et restaurants y est aussi opposée, considérant que ces établissements ne peuvent se permettre de priver leurs hôtes d’un certain confort, sous risque de perdre toute clientèle. L’Association des directeurs d’écoles élémentaires, pour sa part, témoignait de l’impossibilité technique d’une telle mesure dans les écoles, à cause de systèmes de chauffage souvent mal régulés.

Même si le ministère ne compte pas mettre de contrôles en place, les associations veulent continuer à faire valoir leurs arguments. Jiří Horecký se dit plutôt confiant et optimiste :

Photo illustrative: Curtis Adams,  Pexels

« Je suis optimiste sur le fait qu’on arrive à un compromis. Je ne pense pas que le ministère va insister pour garder intact ce qu’il a proposé et sera fermé aux changements, car tout simplement, certaines choses n’ont pas de sens. Réduire la température dans des salles de bain communes de certains établissements ne permettrait pas d’économiser tant que cela puisque cela représente seulement trois ou quatre pièces. En plus, nous ne sommes pas les seuls à s’opposer à ce règlement. Je pense donc que c’est une bonne chose d’ouvrir un espace de discussion, mais j’espère surtout que ça ne sera pas nécessaire d’en arriver là car cela signifierait que nous serions en manque de gaz et de ressources. »

Photo illustrative: ri,  Pixabay,  Pixabay License

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les intérieurs devraient être chauffés à 18 degrés. La Tchéquie resterait donc dans les recommandations mondiales si ce règlement venait à être mis en place, mais s’éloignerait un peu de ses habitudes culturelles, en particulier celle de ne porter qu’un caleçon et un tee-shirt à la maison, même en hiver.