Née à Prague, première femme prix Nobel de la Paix, Bertha Von Suttner est peu connue des Tchèques
Jusqu’à la fin du mois de juillet, le Forum culturel autrichien à Prague propose une exposition sur la vie et l’œuvre de Bertha Von Suttner. Amie proche d’Alfred Nobel, Bertha Von Suttner a été la première femme lauréate du prix Nobel de la Paix en 1905. Née à Prague, cette citoyenne austro-hongroise est devenue écrivaine et militante pour la paix. Elle a fondé l’Association pacifiste autrichienne et a participé à plusieurs Congrès de la Paix. Décédée une semaine avant l’attentat de Sarajevo et le déclenchement de la Première guerre mondiale, Bertha Von Suttner a consacré sa vie à la recherche de l’entente entre les peuples. L’attaché culturel de l’ambassade autrichienne à Prague, Waltraud Strommer, évoque au micro de Radio Prague ce personnage quelque peu oublié des Tchèques.
Waltraud Strommer : « Oui, la connexion est très intéressante. Il s’agit en effet d’une grande coïncidence car Bertha Von Suttner a été baptisée dans l’église Notre-Dame-des-Neiges qui fait partie du monastère franciscain dans lequel est situé le Forum culturel autrichien depuis vingt ans. En même temps, nous, les Autrichiens, considérons Bertha Von Suttner comme Autrichienne même si elle est née à Prague. A l’époque, l’actuelle République tchèque faisait partie de l’Empire austro-hongrois. »
Bertha Von Suttner est surtout connue pour avoir été la première femme ayant reçu le prix Nobel de la Paix. Qu’est-ce qui vous attire le plus sur son destin et son œuvre ?
« Bertha Von Suttner devait être une femme extraordinaire. Malgré tant d’adversité dans sa vie, elle a réussi à devenir une femme très célèbre dont nous nous souvenons encore aujourd’hui. Son père, le comte Michael Kinský, est décédé peu de temps avant sa naissance. Sa mère, qui était plus jeune, n’était pas d’origine aristocratique. Au départ, Bertha Von Suttner essayait de s’identifier avec la classe aristocratique de la Bohême, mais nous savons qu’elle a souffert toute sa vie du fait qu’elle a été exclue des cercles les plus élevés en raison de l’origine non-aristocratique de sa mère.Sa mère a reçu un héritage, mais elle l’a dépensé en jouant dans les casinos. Pour assurer leur existence matérielle, Bertha Von Suttner aspirait, sans succès, à une carrière de chanteuse d’opéra. Sa mère voulait qu’elle se marie avec des hommes privilégiés, mais cela ne marchait pas non plus. Alors, elle a cherché du travail. Elle avait bénéficié d’une bonne éducation, elle parlait plusieurs langues, elle jouait du piano. Elle est devenue gouvernante, notamment pour la famille Von Suttner à Vienne. »
« Cela a déterminé sa vie car c’est dans cette famille qu’elle a rencontré son futur mari. Malheureusement, la famille était contre cette liaison. Bertha a dû renoncer à son emploi et a accepté un poste comme secrétaire à Paris, notamment chez Alfred Nobel. Elle a fini par se marier avec Arthur Von Suttner qui s’est fait déshériter par sa famille. Le jeune couple s’est réfugié chez un ami en Géorgie où ils ont commencé à gagner leur vie en écrivant des articles et des rapports de guerre pour les journaux. Et le reste, c’est l’Histoire.Pour moi, c’est cette combinaison d’événements et peut-être de coïncidences et la force du caractère de Bertha Von Suttner, sa persévérance et son engagement, qui font cette femme tellement extraordinaire. Je ne voudrais pas comparer le personnage de Bertha Von Suttner avec quelqu’un mais plutôt la voir comme une pionnière. »
Que peuvent découvrir les visiteurs au Forum culturel autrichien jusqu’à la fin du mois de juillet ?« Notre exposition montre une sélection transversale de la vie de Bertha Von Suttner en paroles et en images, comme l’indique le titre de l’exposition. Tous les textes sont des citations d’elle ou de certains de ses contemporains. En lisant ces textes, nous gagnons une impression du personnage de Bertha Von Suttner et de son temps. L’exposition n’est pas préparée de façon scientifique mais plutôt d’une manière facile à comprendre pour tous les visiteurs. Elle vise à donner un aperçu des étapes les plus importantes de sa vie, par exemple, sa jeunesse, ses débuts comme journaliste et écrivaine, ou encore sa mort peu avant l’attentat de Sarajevo en 1914 et le déclenchement de la Première guerre mondiale. »