Le Parti communiste versus le prêtre Vojtech Protivinsky
Il y a 12 ans, s'effondrait le régime communiste en Tchécoslovaquie. L'affaire du prêtre, Vojtech Protivinsky, largement commentée, ces jours-ci, par la presse, fait resurgir la question suivante: Avons-nous réussi à nous départir tout à fait du régime totalitaire? Vaclav Richter.
L'année dernière, le prêtre Vojtech Protivinsky a appelé les habitants de la région de Breclav, en Moravie, à ne pas voter pour le Parti communiste de Bohême et de Moravie. Il a rédigé des tracts, dans ce sens, et les a diffusés dans des villes et villages de sa région. Aujourd'hui, il risque deux ans de prison pour avoir dénigré un groupe d'habitants à cause de leur conviction politique. Il se réfère à la Constitution et à la Charte des droits et des libertés, mais la Charte sert d'argument, aussi, à l'enquêteur de la police, qui justifie la procédure ouverte contre le prêtre en citant un passage de ce document où l'on lit que "les gens sont libres et égaux dans leur dignité sans égard à leurs convictions politiques". Néanmoins, le prêtre ne se laisse pas décourager et persiste dans sa critique. A son avis, la République tchèque ne s'est pas encore départie de son passé communiste. Et il va plus loin en se demandant si les communistes ont le droit d'avoir, en Tchéquie, un parti politique qui est, en réalité, héritier du Parti communiste de Tchécoslovaquie, de triste mémoire à cause de son caractère totalitaire. Les habitants du village de Rakvice, où le prêtre vit actuellement, ne sont pas seuls à lui manifester leur solidarité. L'évêque Dominik Duda, vice-président de la Conférence épiscopale tchèque, demande qu'on le juge en commun avec Vojtech Protivinsky, parce qu'il partage ses opinions. De même l'évêque Vaclav Maly, ancien dissident, considère comme scandaleux qu'on puisse traduire en justice un homme qui n'est pas d'accord avec la conception d'un parti politique. De nombreuses personnalités manifestent leur soutien au prêtre, dans la presse. Plusieurs hommes politiques et artistes célèbres viennent de lancer une pétition dont les signataires s'identifient aux propos de Vojtech Protivinsky et demandent que la procédure soit ouverte, également, contre eux. On se demandait quelle serait la réaction du président Vaclav Havel, qui avait passé de longues années dans les prisons communistes. Vaclav Havel a profité de ses pouvoirs présidentiels et a suspendu les poursuites judiciaires contre Vojtech Protivinsky. Le prêtre hésite cependant à accepter la grâce présidentielle. S'il refuse, les organes judiciaires seront obligés de poursuivre la procédure.