Les chanteuses tchèques
La vie de chaque jour, qu'est-ce que c'est ? Le métro, boulot, dodo ? Un peu, certes, mais il y a aussi les divertissements divers, le ciné, le théâtre, la lecture, le tourisme, le sport et... l'incontournable télé ! La petite boîte... qui est devenue grande, avec son écran magique qui nous transporte dans tous les coins du monde, de plus en plus rapidement, qui devient de plus en plus actuel. La petite boîite à écran qui supplante, peu à peu, une autre petite boîte, à cadran celle-là ! Mais pourquoi en parler dans la Tchéquie au quotidien ? Tout simplement parce que la télé est, de nos jours, l'un des ateliers de la fabrique des stars de la musique, de la chanson. Ce sont ces stars, les chanteuses tchèques qui sont au programme de cette chronique.
Le magazine du week-end du quotidien national, Mlada fronta Dnes, a consacré une grande partie du contenu de son dernier numéro aux chanteuses tchèques. Intéressant, mais la première double page présente une anomalie. Elle porte le titre : Les chanteuses, chacune est différente, mais sous beaucoup de points de vue, elles sont pareilles. La page offre, aussi, un portrait de montage de la chanteuse idéale : cheveux, oreilles, nez de l'une, yeux de l'autre, menton et bouche de la troisième, cou et poitrine d'une quatrième. Je me suis posé la question : et la voix dans tout cela ? L'auteur de l'article répond en constatant que pour être les meilleures, les chanteuses devraient, naturellement, savoir chanter. Il constate, pourtant, que le « look » est tout aussi important. La scène féminine de la chanson tchèque pourrait être divisée en quatre catégories : les voix superbes, les voix qui font parler d'elles, les voix non-conformistes, les voix des anciennes. Quelle est la meilleure voix de la chanson tchèque ?
C'est certainement Lucie Bila, la chanteuse qui a remporté, plusieurs fois de suite, le Rossignol d'or, le concours de la chanson tchèque. Son style ? On la qualifie souvent de caméléon de la chanson. En effet, elle est capable de métamorphoser son style d'une chanson à une autre. Populaire, elle se donne une image de diva un peu fofolle, mais sincère. Son public ? Au début, un peu tous les âges. Ces derniers temps, elle perd les faveurs des teens.
Une autre belle voix, Bara Basikova. Une carrière assez rocambolesque, écrivaine à ses heures. Basikova avait une réputation de chanteuse intellectuelle. Aujourd'hui, elle reste la chanteuse la plus technique. Un grand succès, au début des années quatre-vingt-dix: un album de chansons en latin, Gregoriana. Depuis, rien ou presque rien, à part des rôles dans des comédies musicales, ou des shows télévisés.
Leona Machalkova, une belle voix qui fait souvent parler d'elle, dans les magazines de la presse à sensation. Une découverte, comme bien d'autres, de la comédie musicale: une alternance dans Jésus Christ Superstar, Marie-Madeleine, mais surtout Adriane dans l'une des meilleures comédies musicales tchèques, Dracula. Demi-succès avec deux albums de chansons de films. Son public: les trente - cinquante ans. Une bonne technique, mais pas de succès notoire. On parle plutôt de la plastique de son nez et de sa vie érotique. Trop d'apparitions, selon les experts du show-biz, dans des émissions de télévision bon marché.
Iveta Bartosova, une jeune découverte et même compagne de Ladislav Staidl, ancien musicien de Karel Gott, grand chanteur tchèque, interprétant de la chanson guimauve, avec d'assez belles apparitions dans la comédie musicale. Meilleure avec les années, mais même public et mêmes canards sur sa vie privée que Machalkova.
Anna K, avec Lenka Dusilova et Monika Naceva, représentent le refus du conformisme, une sorte d'avant-garde de la chanson tchèque. Caractéristique pour toutes les trois: elles ne font pas souvent leur apparition, ni à la télé, ni à la radio. Leur public ? Les trente ans et moins, surtout les hommes. Anna K est, certainement, la plus connue. Elle s'est fait remarquer, d'une manière agréable, dans plusieurs comédies musicales. On dit d'elle qu'elle interprète des chansons dont les textes sont de moins en moins compréhensibles, mais avec un charme qui leur donne un sens...
Helena Vondrackova, la chanteuse des années soixante, soixante-dix, la collègue de la grande Marta Kubisova, une svelte blonde qui porte, allègrement, ses 54 ans ! Une ancienne de la scène musicale tchèque, mais qui vient de faire un remarquable come back, avec un album aux rythmes contemporains et, surtout, dansant, s'adressant un peu à tout le monde. On ne peut pas dire que sa voix soit superbe, mais elle est un véritable maître du labeur, dans son domaine. Elle a longtemps, sous le communisme, balancé ses hanches au rythme de ce qu'on appelle en Tchéquie « le courant du milieu », en d'autres termes la chanson guimauve, sans pour autant vouloir être despectueux à son égard. Aujourd'hui, elle possède toujours son public, dans les plus de quarante ans, et occupe les premières loges aux concours de la chanson. Un bon retour, à la différence d'autres anciennes, comme Hana Zagorova, Petra Janu, Marie Rotrova ou autres, qui font plutôt les shows télévisés.
Je vous ai donc présenté le nec plus ultra de la chanson féminine tchèque. Force est de constater que les stars ne sont plus toutes jeunes et leur public non plus. Alors, vous vous demanderez, un peu comme moi, d'ailleurs : que diable écoutent donc, les teen-agers ? Les quinze - vingt ans ? Je crois qu'il ne leur reste, comme un peu partout dans le monde, que les Britney, Anastazia et compagnie. En effet, la boîte à écran et la boîte à cadran (numérique aujourd'hui), ne nous présentent vraiment pas grand chose de jeune. Il existe, pourtant, un grand nombre de concours de chant : à la télévision, même deux fois par semaine. Malheureusement, il n'en sort pas de stars, comme à... excusez le jeu de mots, et je n'en fais aucunement la publicité, Star Academy, en France. La télé tchèque vous présente un show, avec des chanteuses et chanteurs en herbe, mais l'émission terminée, on n'en entend plus parler. Vraiment du pain sur la planche, encore, pour les producteurs et réalisateurs.
Petit côté sympathique : après la partition de la Tchécoslovaquie, plusieurs chanteurs et chanteuses slovaques sont aussi populaires des deux côtés de la frontière :
Richard Müller, Jana Kirschner, ou le Lennon slovaque, Miro Zbirka. Mais les chanteurs, tchèques étrangers, la pop tzigane même, ce sera pour une autre fois.