Tout ce qu'on ne savait pas sur les exilés tchèques et slovaques...

"De tous les droits de l'homme, nous n'en avions, en fin de compte, qu'un seul : celui de s'enfuir. Ceux qui sont restés, n'en avaient aussi qu'un seul. Celui de feindre"... Ces propos sont ceux du célèbre journaliste tchèque, Ferdinand Peroutka, qui s'est fixé, après le putsch communiste de 1948, aux Etats-Unis. Aujourd'hui, trois millions et demi d'exilés tchèques et slovaques vivent dans les cinq coins du monde. Cette émission leur sera consacrée, ainsi qu'à leurs ancêtres qui n'ont pas vu leur patrie se libérer du totalitarisme.

Tout ce qu'on ne savait pas sur les exilés tchèques et slovaques...

Exposition sur l'exil tchèque et slovaques

C'est une grande première dans l'histoire de la République tchèque. Et une première très attendue. En effet, c'est pour la première fois, depuis la chute du communisme, que s'ouvre, en Tchéquie, un débat sur l'exil tchécoslovaque. Une exposition inédite, ouverte samedi dernier dans la deuxième ville de République tchèque, Brno, est à l'origine de ce débat. Installée dans quatre centres culturels de Brno, elle nous présente les destins et les activités de ces hommes et femmes qui ont fui, dans des conditions parfois incroyables, les fascistes, puis les communistes. Une partie de l'exposition explique comment fonctionnait, au tout début du XXe siècle, la poste - à l'époque l'unique moyen de communication des exilés avec leurs proches. Dans une autre salle, on suit des pilotes et des parachutistes tchèques, membres des armées étrangères, lors des batailles de la Deuxième Guerre mondiale. On voit leurs uniformes, leurs cahiers de notes, leurs lettres. Un peu plus loin, on nous parle de leurs tristes expériences avec les communistes, de leur emprisonnement et de leurs nouvelles fuites à l'étranger. On nous explique aussi comment on se débrouillait pour franchir les frontières de la République, comment travaillaient les groupes de passeurs. Et nous voilà, enfin, devant les panneaux qui nous rappellent tous ces écrivains, hommes de théâtre, peintres, photographes, journalistes, représentants du clergé ou encore ces organisations sportives dissoutes par les communistes, telles que les scouts ou Sokol... Voilà des livres, des tableaux, des exemplaires de journaux tchèques, publiés en période d'exil... Et puis, n'oublions pas... la radio ! Une salle à part lui est réservée. Sur les murs, les noms de toutes les stations occidentales et américaines qui diffusaient en tchèque : en tête, bien sûr, Radio Europe Libre et La Voix d'Amérique, mais aussi Radio Vatican, Radio Madrid et beaucoup d'autres. Il vous suffit de mettre le casque pour écouter un morceau d'une émission...

Mais nous, nous allons écouter maintenant Jan Kratochvil, organisateur, avec sa société pour la culture et le dialogue K 2001, de l'exposition. Son père s'est exilé, dans les années 50, aux Etats-Unis. Son frère Jiri est auteur de nombreux romans, dont certains ont été traduits en français. Jan Kratochvil, lui, dit avoir vécu, sous l'ancien régime, aussi en exil. Dans son exil intérieur...

« Je suis ravi de voir combien de Tchèques, installés à l'étranger, sont venus au vernissage de l'exposition. Ils sont contents qu'ici, on parle de nouveau d'eux, qu'ils soient perçus positivement. C'était, d'ailleurs, notre objectif. Nous voulions mettre en évidence les liens des exilés avec la Tchécoslovaquie. Le fait qu'ils l'ont toujours soutenue. Notre projet ne se termine pas avec cette exposition. Dans un mois, on va projeter, à Brno, des films sur l'exil. On a prévu aussi des conférences à l'université Masaryk et la publication d'ouvrages concernant ce sujet. Le 21 mars, notre exposition sera présentée, en russe, à Moscou. En avril, elle voyagera à Bratislava et à la fin de l'année, à Prague. Comme je l'ai déjà dit, il s'agit d'un projet à long terme. Il commence par cette exposition, axée sur la période 1900-1958. Dans deux ans, nous ferons découvrir au public l'exil entre 1958-1968. Dans quatre ans, nous terminerons avec les années 1968-1989. Enfin, en 2008, un musée de l'exil tchèque et slovaque devrait être inauguré ici, à Brno. »

Exposition sur l'exil tchèque et slovaques

Des anciens dissidents, des hommes politiques, des Tchèques et des Slovaques, toujours installés à l'étranger ou revenus dans leur patrie ; ils ont tous assisté, à Brno, au vernissage de l'exposition sur l'exil. Le poète Petr Kral, un grand amoureux de Paris, de la culture et de la littérature françaises, a bien voulu me parler de sa vie d'exilé. Et aussi de l'exposition...

Écoutez en RealAudio

Le vernissage de l'exposition sur l'exil tchèque et slovaque fut clôturé par un concert de musique classique et par un happening au centre de Brno. Il y a cinquante ans, les journalistes de Radio Europe Libre lâchaient des ballons, avec des tracts, histoire d'encourager les Tchèques et les Slovaques dans leur lutte pour la liberté. Pour célébrer cet anniversaire - on a aussi lâché les ballons avec des tracts pour symboliquement rassurer l'Occident, que celui-ci sache que dans nos pays règne aussi la démocratie.

Dimanche prochain, nous reparlerons de l'exil, mais sous un autre angle : nous évoquerons l'histoire des émigrés russes en Tchécoslovaquie. Et puis, vous aurez l'occasion d'entendre un psychiatre, une chanteuse et une journaliste tchèques, qui ont trouvé leur bonheur en Belgique, en Allemagne et en France.