« Kveten », nom tchèque du mois de mai et adaptation de la « lune des fleurs » de Chateaubriand

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Salut à tous, les tchécophiles de Radio Prague - Ahoj vám vsem milovníkum cestiny Radia Praha. Après les mois de mars - brezen, et d'avril - duben, nous allons poursuivre notre recherche de proverbes, dictons - pranostiky, se rapportant au deuxième mois du printemps, le mois du renouveau, de l'amour et des fleurs, comme son nom l'indique d'ailleurs en tchèque, bref le joli mois de mai - kveten. Mais avant cela, il convient, une nouvelle fois, de procéder à quelques rappels et précisions sur l'étymologie des appellations tchèque et française du mois de mai - kveten, et procéder à une étude étymologique passionnante.

Salut à tous, les tchécophiles de Radio Prague - Ahoj vám všem milovníkům češtiny Radia Praha. Après les mois de mars - březen, et d'avril - duben, nous allons poursuivre notre recherche de proverbes, dictons - pranostiky, se rapportant au deuxième mois du printemps, le mois du renouveau, de l'amour et des fleurs, comme son nom l'indique d'ailleurs en tchèque, bref le joli mois de mai - květen. Mais avant cela, il convient, une nouvelle fois, de procéder à quelques rappels et précisions sur l'étymologie des appellations tchèque et française du mois de mai - květen, et procéder à une étude étymologique passionnante.



Si le nom tchèque « květen » tire son origine du verbe « fleurir » - « kvést », cette appellation reste toutefois relativement récente puisqu'elle ne fut employée pour la première fois qu'au début du XIXe siècle. Avant cela, c'est le nom « máj » qui était utilisé, nom qui provenait alors, comme en français, du latin « maius », lui même tiré, selon l'une des deux hypothèses les plus répandues parmi les étymologistes, du nom de la déesse Maïa, déesse de la Rome antique qui serait à l'origine de la joie, du réveil de la nature ou encore de la fécondité terrestre.



Mais pour en revenir à l'appellation tchèque du mois de mai - květen, il est intéressant de noter que le tchèque fait partie des rares langues, avec le polonais parmi les langues slaves, dont les noms des mois ne sont pas basés sur une racine latine. Pourtant, malgré cela, « květen » reste bien le mois des fleurs, puisqu'à l'origine, et comme nous l'avions déjà constaté lors d'une émission précédente, il s'agit d'une traduction, ou plutôt d'une adaptation de l'expression française « lune des fleurs », expression que l'on retrouve dans le roman de Chateaubriand « Atala ou les Amours de deux sauvages dans le désert ». Notons encore que dans l'esprit et dans leur logique de formation, les noms tchèques sont très proches de ceux adoptés par un calendrier aujourd'hui disparu, le calendrier républicain, aussi parfois appelé calendrier révolutionnaire.



Ce calendrier avait été inventé au lendemain de la Révolution française, institué par la Convention en 1793 et commençait rétroactivement le 22 septembre 1792, jour de l'établissement de la République, mais aussi de l'équinoxe d'automne dans l'hémisphère nord. La République, qui s'appuyait sur les connaissances astronomiques, décida alors d'abandonner le calendrier grégorien, celui qui, pour l'anecdote, est aujourd'hui reconnu par la majeure partie des nations et qui fut réinstauré par Napoléon le 1er janvier 1806.



Mais quel rapport, nous direz-vous, avec les noms tchèques des mois ? En fait, c'est très simple : la Révolution française était une période propice à la remise en question de toutes les idées reçues et de toutes les institutions, et notamment de l'Eglise, qui s'entêtait alors à ne pas reconnaître les découvertes et théories de Copernic ou Galilée. Ainsi, le calendrier républicain visait à rationaliser la mesure du temps et toutes les références à la religion furent supprimées. Contre la superstition et le fanatisme, le dimanche, les fêtes chrétiennes furent abolies et les noms des saints remplacés par des noms de plantes ou d'outils au nom de la Raison, la science ou encore de la nature. Et si le calendrier utilisé en République tchèque aujourd'hui est bien le calendrier grégorien, en revanche, les noms de tous les mois ont un rapport avec la nature, comme cela était le cas dans le calendrier républicain. Et c'est ainsi qu'on en revient à mai - květen, mois des fleurs, puisque dans ce fameux calendrier républicain, mai se disait alors « floréal », nom donné par le poète français Fabre-d'Eglantine, auteur également de chansons sentimentales comme la célèbre « Il pleut, il pleut, bergère ».



En conclusion, et pour en revenir à la langue tchèque, précisons encore que l'origine des noms tchèques des mois reste un mystère culturel et historique. On connaît certes l'étymologie de toutes les appellations de mois, mais on ne sait donc pas pourquoi et quand la langue tchèque a adopté et commencé à utiliser ces appellations. Et l'emploi de ces noms n'est donc sans doute pas à relier, comme on aurait pu le penser, à la période baptisée « renouveau national » ou « réveil national » - národní obrození, dont les principaux objectifs, à partir des années 70 du XVIIIe siècle, étaient l'émancipation de la nation, avec l'adoption des réformes des Lumières, et la création d'une culture nationale à proprement parler, et ce notamment à travers le renouveau de la langue tchèque par rapport à l'allemand.



Là-dessus prend donc fin ce « Tchèque du bout de la langue » consacré au mois de mai, floréal, en un mot « květen », le mois des fleurs. Dans notre prochaine émission, nous nous intéresserons de plus près aux dictons météorologiques se rapportant à « květen ». D'ici-là, portez-vous du mieux possible - mějte se co nejlíp !, portez le soleil en vous - slunce v duši, salut et à bientôt - zatím ahoj !