Escalade : Adam Ondra en France à la conquête de son ticket pour les JO 2020
A partir de jeudi et jusqu’au 1er décembre, se tiendra à Tournefeuille, près de Toulouse, le tournoi de qualification olympique d’escalade. Pas moins de 44 grimpeurs tenteront de décrocher leur sésame pour les Jeux de 2020, qui auront lieu à Tokyo, et prétendront ainsi à la première médaille olympique d’escalade de l’histoire. Parmi eux, cinq Français et un seul Tchèque, mais pas des moindres, puisqu’il s’agit du meilleur grimpeur au monde : Adam Ondra.
« Pour moi, c'était à peu près le seul sport naturel qui manquait aux Jeux olympiques. Les règles sont très simples puisqu’il suffit de grimper le plus haut possible. Et je pense que c'est inscrit dans notre code génétique : nous voulons tous grimper ! »
Si, à en croire Adam Ondra, nous avons tous la grimpe dans la peau, ils ne seront que six athlètes sur 22 dans chaque catégorie à remporter ce week-end leur ticket pour les Jeux Olympiques de Tokyo. Les autres athlètes devront attendre les championnats continentaux au printemps prochain, parmi lesquels le Championnat d’Europe où seul le meilleur grimpeur de chaque catégorie sera qualifié. Autant dire qu’il s’agit presque de la dernière opportunité pour eux d’espérer fouler le sol - ou plutôt les murs - nippons !
C’est en France, à Tournefeuille, que les grimpeurs s’affronteront dans les trois disciplines de compétition combinées, à savoir la vitesse, le bloc et la difficulté. L’épreuve de vitesse consiste à escalader une voie officielle de 15 mètres, connue de tous, le plus rapidement possible. Vient ensuite le bloc, soit un circuit très court et à faible hauteur, à réaliser sans assurage en un minimum d’essais et dans un temps défini. Le combiné s’achève enfin par la difficulté, où il s’agit pour les athlètes d’escalader en tête, soit en reliant la corde à des dégaines au fur et à mesure de son ascension, une voie inédite de 15 mètres en allant le plus haut possible. Un exercice dans lequel Adam Ondra excelle particulièrement, bien qu’il se définisse plutôt comme un grimpeur d’extérieur :
« Je me considère comme un ‘rock climber’. De temps en temps je suis motivé à m’entraîner en salle pour les compétitions, qui se font seulement en intérieur, mais à choisir, je préfère l’escalade en falaise. Aujourd’hui, c’est différent : les Jeux Olympiques c’est un rêve, un objectif tellement exceptionnel que je grimpe la plupart du temps en salle, même si c’est une sorte de sacrifice. Je sais qu’une fois les Jeux terminés, la première chose que je ferais, c’est aller grimper en extérieur. »En août dernier, le champion tchèque n’était pas parvenu, à la surprise générale, à compter parmi les huit têtes de classement des Championnats du monde de combiné d’Hachioji, laissant passer sa chance de se qualifier directement pour les Jeux de 2020. Il avait été disqualifié pour prise d’appui sur un spit au cours de son ascension, le propulsant à la 19ème place du classement général. Cela a fait le jeu du bloqueur français Mickaël Mawem, qui est arrivé 8ème et compte donc parmi les 16 grimpeurs (8 par catégorie) qualifiés pour les JO. Chaque pays disposant d’un maximum de quatre places pour les Jeux, il ne reste que trois places tricolores potentielles pour cinq prétendants, dont le double vainqueur de la Coupe du monde de vitesse et frère de Mickaël, Bassa Mawem, qui entend bien faire des JO 2020 une affaire de famille.
Egalement en lice, Julia Chanourdie, qui a réalisé son troisième 9A l’an dernier, la double championne du monde de vitesse Anouck Jaubert, et la bloqueuse Fanny Gibert, qui compte six médailles de coupe du monde à son actif. Enfin, le polyvalent Manu Cornu, qui a remporté l'or lors de la dernière coupe du monde de bloc, constitue « une chance de médaille française » si l’on en croit Romain Desgranges, le leader de l’équipe de France. Ce dernier a par ailleurs confié à Radio Prague Int. « être blessé et donc pas qualifié pour la compétition ».
Les 16 grimpeurs d’ores et déjà qualifiés ne participant pas au tournoi qualificatif, la désillusion d’Ondra à Hachioji constitue une chance pour les passionnés présents à Tournefeuille ce week-end, qui verront grimper celui qui est tombé dans la marmite de l’escalade quand il était petit :« Je suis né dans une famille de grimpeurs : dans ma famille tout le monde grimpe. J’ai commencé à grimper quand j’avais peut-être quatre ou cinq ans, et j’ai très vite réalisé que c’était quelque chose où j’étais bon. J’ai commencé à faire des compétitions à six ans, je réussissais, et déjà à sept ans je me disais : ‘Être grimpeur professionnel doit être la chose la plus cool du monde !’ Et j’ai continué sur ce chemin… »
Un chemin qui l’a conduit aux portes de la première compétition olympique d’escalade de l’histoire, qu’il aborde avec un calme… olympien :
« Le côté complexe de cette compétition, c’est que je n’ai pas à faire une performance exceptionnelle. A moins que je ne fiche tout en l’air, je vais participer aux Jeux Olympiques. Aujourd’hui, à Toulouse, tout ce que j’ai à faire, c’est me placer dans le top 6. En même temps, je ne peux pas me permettre de grimper très différemment de ce que je fais d’habitude, parce que je sais que l’enjeu c’est les Jeux Olympiques. Je dois faire tout mon possible pour gagner l’épreuve de difficulté. »
Il s’agit en effet d’exceller en vitesse, bloc et difficulté, puisque seuls les six meilleurs finalistes dans les trois disciplines combinées tenteront leur chance à Tokyo. C’est d’ailleurs le format du combiné qui sera de nouveau de mise lors des prochains Jeux Olympiques. Un cadeau empoisonné pour beaucoup grimpeurs, parmi lesquels le champion tchèque :« Le format combiné pour les JO est très spécifique puisqu’il réunit difficulté, bloc et vitesse. La vitesse, c’est une nouveauté pour moi : je ne m’y suis jamais entraîné auparavant. C’est vraiment difficile de jongler avec ces trois disciplines radicalement différentes. Le fait que l’escalade entre aux JO est formidable, mais je ne suis pas du tout satisfait du format de l’épreuve. J’espère qu’il ne s’agit que d’une première étape et qu’à l’avenir, il y aura trois séries de médailles pour trois disciplines d’escalade indépendantes les unes des autres. Je pense que si vous proposez quelque chose pour les JO, ça doit être quelque chose de bien défini avec un lien historique et logique. Malheureusement, avec le format combiné, ça n’est pas le cas. »
En effet, le Comité International Olympique (CIO) a décidé que l’escalade ne disposerait que de deux sets de médailles en 2020, un féminin et l’autre masculin, seule condition pour que les disciplines soient toutes trois médiatisées. En 2024 à Paris, il y aura vraisemblablement une épreuve de vitesse à part entière, et un combiné de bloc et de difficulté, ce qui pour Adam Ondra ferait sens.Celui qui a sorti le premier 9C au monde vient tout juste de publier son autobiographie ‘Lezec tělem i duší’ - que l’on pourrait traduire par ‘Grimper corps et âme’ -. Passionné et fort de ses capacités mentales et physiques, il reste lucide sur les difficultés du tournoi de demain :
« Bien sûr, je m’entraîne dur, parce que je veux être dans la meilleure forme possible. Mais en même temps c’est la fin de la saison, et normalement à partir de fin novembre je ne fais plus de compétition. Donc la difficulté va être de ne pas être épuisé par excès d’entraînement. En termes de volume, je ne m’entraîne pas autant que je le ferais au printemps par exemple. Le plus important c’est d’arriver à Toulouse frais, en forme, et surtout confiant. Pas trop nerveux, sans pour autant être trop confiant (rires). »