Chine: les échanges culturels menacés par les prises de position du maire de Prague ?
Le président tchèque a terminé sa visite en Chine dimanche. Miloš Zeman y était accompagné par une délégation de ministres et d’hommes d’affaires. Le ministre de la Culture Antonín Staněk (ČSSD) en faisait partie et selon lui Pékin aurait l’intention d’annuler la venue de plusieurs institutions culturelles et d’artistes tchèques, en plus de l’annulation de la prochaine tournée d’un orchestre pragois. En cause : le maire de Prague et ses prises de position, qui ne sont pas dans la ligne du Parti communiste chinois.
« Je suis en Chine et je constate que la société informatique Huawei a tout simplement trop de succès, c’est tout et cela suscite la jalousie ! Donc si vous accusez cette firme sans preuve, alors cela devient de la concurrence déloyale. »
La loyauté de Miloš Zeman ne suffit apparemment pas. Notamment dans le domaine culturel. Ce sont d’abord les quatorze concerts classiques de la PKF – Prague Philharmonia, prévus à l’automne prochain, qui viennent d’être annulés par Pékin.
Martin Klimpl, le président du conseil d’administration de PKF s’est déclaré très surpris par cette annulation soudaine et il a ajouté que la tournée aurait pu être autorisée de nouveau si la direction avait publiquement critiqué les positions de la mairie de Prague envers la Chine.
Pour Martin Klimpl, « conditionner la tenue d’événements culturels à des prises de position politiques est inacceptable ».Zdeněk Hřib, maire de Prague issu des rangs du Parti pirate, s’est démarqué ces derniers mois de la ligne très pro-chinoise imposée par Miloš Zeman.
Récemment, il a reçu le président du gouvernement tibétain en exil, dont il a fait hisser le drapeau sur un bâtiment officiel de la ville.
Contrairement à la ministre de l’Industrie démissionnaire, le maire a également refusé de céder aux injonctions de l’ambassadeur chinois visant à faire sortir d’une réunion le représentant de Taïwan, pays où Zdeněk Hřib s’est d’ailleurs rendu il y a quelques semaines, dans l’espoir notamment de mettre en place une liaison aérienne directe entre Prague et Taipei.
« Les politiciens tchèques ne doivent pas se soumettre de manière servile aux souhaits de l’ambassadeur chinois, nous sommes un Etat souverain », avait déclaré fin mars le maire de la capitale tchèque.
C’est d’ailleurs avec l’ambassadeur chinois que le chef de la diplomatie tchèque Tomáš Petříček (ČSSD) veut s’entretenir dans les prochains jours pour obtenir des explications quant à l’annulation d’événements artistiques tchèques en Chine, car toutes les institutions culturelles comportant le nom « Prague » pourrait être concernées par ce nouvel interdit.
« Je n’ai pas encore d’informations détaillées. C’est une décision malheureuse qui limiterait la communauté culturelle à cause de certains désaccords politiques », a déclaré le ministre tchèque des Affaires étrangères.
Pour sa part, le maire de Prague ne semble pas vouloir changer de cap. Zdeněk Hřib :
« Prague s’efforce d’avoir avec ses villes partenaires des partenariats apolitiques, qui sont basés sur des échanges culturels et je crois que cette annulation en Chine peut être remplacée par des prestations dans d’autres pays et je vais utiliser dans ce sens les contacts que j’ai pu me faire récemment lors de mon voyage à Taïwan. »
Selon l’agence ČTK, la ville de Prague envisage même de faire retirer sa reconnaissance du principe de la Chine unique dans l’accord passé avec Pékin par la précédente administration. Ce n’est pas le genre d’initiative qui plaît au Château de Prague. « Les efforts déployés pour exclure la République tchèque de toute coopération avec la Chine portent atteinte à nos intérêts nationaux et profitent à l’économie d’autres pays », selon le porte-parole du président tchèque.