La République tchèque en fait-elle assez pour son avenir ?
Quels sont les domaines dans lesquels la République tchèque n’avance pas comme il le faudrait ? Quelques éléments de réponse dans cette nouvelle revue de presse de la semaine écoulée. Elle offre ensuite quelques regards sur une nouvelle initiative législative qui a pour but de supprimer la tolérance zéro pour l’alcool sur les routes qui existe en Tchéquie. Les menaces qui guettent l’Union européenne sont le sujet d’un entretien avec un sociologue et juriste reconnu dont elle propose également un extrait. Elle s’intéresse enfin à la possible influence de la pornographie sur les enfants.
« Parallèlement à la publication de ce rapport, la semaine écoulée, le gouvernement a annoncé sa décision d’augmenter les pensions de retraite de 900 couronnes en moyenne (l’équivalent de près de 36 euros) dès l'année prochaine. Le tout au moment où la Tchéquie compte un retraité sur trois personnes entre 15 et 64 ans. Il s’agit d’une démarche qui, humainement parlant, est compréhensible et qui n’aura pas d’impact grave sur le budget de l’Etat. Mais il faut la situer dans le contexte de la précédente série d’augmentations se rapportant aux domaines salarial et social et auxquelles le gouvernement a également donné son aval. Il est évident que maintenir de cette manière et dans une longue perspective le fonctionnement de l’Etat est impossible. »
Le texte publié par l’Office suprême de contrôle, qui est « un document soigneusement élaboré », devrait servir d’inspiration au chef de gouvernement Andrej Babiš. Ce dernier cependant, toujours selon le magazine Respekt, l’a rejeté « comme un commentaire politique déplacé »... L’hebdomadaire Reflex observe pour sa part que l’année dernière, le Premier ministre Andrej Babiš a agi de la même manière en critiquant le rapport annuel du Conseil budgétaire national sur le caractère intenable des finances publiques, le qualifiant de peu sérieux. Les experts mettaient alors en garde contre les écueils du vieillissement de la population et le piège de l’endettement dans lequel le pays pourrait plonger.
La tolérance zéro pour l’alcool au volant mise en doute
La Tchéquie est l’un des rares pays, avec la Hongrie et la Slovaquie, par exemple, dans lesquels l’alcool est totalement interdit au volant. Souhaitant supprimer la tolérance zéro pour les automobilistes, le Parti civique démocrate (ODS) a soumis au Parlement un amendement qui stipule l’autorisation d’un taux d’alcool de 0,5 gramme par litre de sang. Point étonnant que cette nouvelle proposition en quelque sorte révolutionnaire ait provoqué émotions, critiques et réactions, aussi, dans la presse. Sur le site echo24.cz on a pu lire à ce propos :« L’adoption du projet soumis par l’ODS n’entraînera automatiquement davantage d’accidents de la route. C’est d’ailleurs ce que confirment les statistiques de l’OCDE qui indiquent que les accidents causés par l’alcool varient selon les habitudes culturelles des différents pays. On voit qu’en Autriche et en Allemagne où une légère tolérance existe, leur nombre est plus bas qu’en Tchéquie, ce qui n’est pas le cas en revanche dans certains pays de l’Europe du Sud. »
Pourquoi l’ODS soumet-il une telle proposition ?, s’interroge l’auteur d’un texte mis en ligne sur le site aktualne.cz pour répondre sur un ton ironique :
« D’abord, il se peut que ce manque de liberté de boire une bière avant de prendre le volant est pour les électeurs de ce parti insupportable. En outre, il s’agit peut-être de la volonté de faire des Tchèques une partie authentique de l’Europe occidentale ou encore d’une tentative de récupérer, d’une manière typiquement tchèque, des électeurs. »
Tout en estimant qu’il serait préférable de ne pas supprimer la tolérance zéro au volant, l’auteur de ces lignes ne pense pas pour autant que cette initiative constituerait un « mal ». Pour lui, le mieux serait de la mettre en pratique pour une année avant d’en tirer les conclusions... Une note mise en ligne sur le site info.cz souligne pour sa part que ce sont notamment ceux qui revendiquent une inspiration en Europe occidentale qui critiquent le plus la nouvelle initiative sous prétexte que la « nation de buveurs de bière » ne mérite aucune tolérance. Celle-ci, pourtant, « renforcerait la liberté de l’individu amené à ne pas abuser de la confiance donnée par l’Etat ».
Jiří Přibáň : l’Union européenne et ses crises
« Un danger mortel guette l’Union européenne. » C’est du moins ce qu’estime le sociologue et juriste tchèque Jiří Přibáň, de l’Université de Cardiff, qui a donné plus d’explications à ce sujet au quotidien économique Hospodářské noviny :« La période optimiste des années 1990 où tout le monde voulait rejoindre l’Union européenne afin de l’édifier comme un projet politique sinon fédéraliste est définitvement finie. Aujourd’hui, on assiste à trois crises qui demeurent irrésolues. La crise constitutionnelle est liée au manque de consensus sur un approfondissement ultérieur de l’intégration. La crise économique quant à elle a montré que l’euro, appelé à devenir une confirmation définitive du processus irréversible de l’intégration, était pour partie responsable des problèmes économiques. Il y aussi la crise migratoire qui a touché jusqu’au principe même de la libre criculation dans le cadre de l’espace Schengen, ainsi que la crise du Brexit. En fait, depuis quinze ans, on assiste à une succession continue de crises. Et il se peut qu’une nouvelle récession économique provoque tôt ou tard une dislocation de l’Union européenne. A l’heure actuelle, il est vrai que son économie est forte, mais la donne pourra être bientôt renversée ».
La crise qui menace l’Union européenne n’est pas celle des différents « exits », comme le croient les partisants de l’intégration européenne convaincus que le cas du Brexit a de quoi décourager les autres. Or, pour Jiří Přibáň, il y a un risque de voir l’Union européenne éclater suite à une série d’explosions politiques intérieures. L’une des premières crises pourrait survenir en rapport avec les élections au Parlement européen, si les populistes nationalistes devenaient le deuxième groupe le plus important.
La pornographie sur Internet et les enfants
Médecin de profession, le commentateur du supplément Česká pozice du quotidien Lidové noviny de samedi dernier se penche sur l’influence que la pornographie, notamment celle diffusée sur Internet, peut exercer sur les enfants. Il écrit :« L’influence de la pornographie sur les enfants est un sujet qui n’est pas souvent abordé. De ce fait, le public ignore que même les ménages équipés d’internet constituent un milieu à risque pour les mineurs, car le sexe représente jusqu’à un tiers de ce que l’internet propose. Les données ayant trait au taux de visites des pages web avec contenu sexuel ne sont pas tenus secrètes. Ce que l’on ignore en revanche, c’est le nombre d'enfants qui visitent ces pages. Certes, les avis d’experts concernant l’influence de la pornographie sur les enfants ne font pas l’unanimité. Il semble cependant certain qu’elle peut jouer un certain rôle quand il s’agit de l’évolution de la sexualité lors de l’adolescence. »
L’auteur du texte publié dans Česká pozice rapporte que, désormais, les cabinets de sexuologues reçoivent un nombre important de jeunes qui sont confus au sujet de leur identité et orientation sexuelles. Un constat à mettre également en rapport, dans une certaine mesure, avec la consommation de la pornographie sur l’internet qui, d’ailleurs, apporte à ses producteurs d’immenses bénéfices. Et le commentateur de conclure que la Tchéquie se rangerait parmi les principaux producteurs de films pornographiques.